Dans un monde de plus en plus connecté, il semble paradoxal de constater que l’art traditionnel occupe une place de plus en plus importante. Dans les publicités, dans les jeux vidéo et ailleurs, on voit régulièrement des œuvres d’art anciennes ou contemporaines. Je vais donc vous parler d’un livre qui veut revisiter de grands tableaux façon manga. Continuer la lecture de « Quand le Manga réinvente les Grands Classique de la Peinture – Avis »
Catégorie : Culture, Livres, Poésies
Mai 1968 et l’« Émilie jolie » de la Grande Guerre, grand écart…
D’un côté, je dois chroniquer le roman Émilie, de l’ami Aïssa Lacheb (Diable Vauvert éd.) – ce que je ferai ici-même, en évoquant la couv’ à la Tardi – et de l’autre, Le Monde demande à ses lecteurs « racontez-nous vos souvenirs du mouvement de protestation » (de mai 1968). Alors, histoire de faire « palper » le dérisoire…
J’ai frôlé deux guerres. Celle des Six Jours (à la frontière irakienne), la serbo-croate. La Grande Guerre, connaît pas. Si ce ne fut par les récits de l’écrivain Yves Gibeau et les photos de Gérard Rondeau (deux amis défunts). Mai 1968, là, j’ai connu, vécu. Or donc, j’écris foutraque, car si las d’avoir rédigé conforme, des myriades d’articles de presse. Donc (bis), M, le magazine du Monde, veut des témoignages de soixante-huitards. Allons-y. Voici le texte titré « Je l’ai vécu, mais non Nantes, ou Strasbourg, l’année d’avant ». En 1969, j’étais étudiant buissonnier à Nantes, plus tard, jack of all trades et journaleux (Agence de presse Libération, Uss’m Follik) à Strasbourg. D’où ce titre. Et voici ce texte, à un caractère près (espaces inclus) de la jauge de l’interface du site du Monde. C’est décousu, voir supra. Tant mieux. Il (le texte) n’apparaîtra qu’ici car « une erreur est survenue, veuillez réessayer ultérieurement », qu’il « dit », Le Monde.
« Mai 1968 a ‘débarqué’ à Angers sans vraiment crier gare. J’avais des copains PSU qui envisageaient d’occuper le château médiéval, ce fut le théâtre de la place du Ralliement. Mais j’ignorais tout, tant du Conseil de Nantes, l’année précédente, réunissant ouvriers-paysans-étudiants, avec des étudiants angevins, ou d’autres, comme Narvor, bientôt qualifiés d’anarco-étyliques (j’en fus), en 1969, à Nantes, par les ‘gauchos’ dits ‘organisés’ (maoïstes, troskards…), ou de paléo-situationnistes. Aucune idée de ce qui s’était passé à Strasbourg en 1967. De la misère en milieu étudiant avait été publiée dès nov. 1966 (nous la republierons avec la Librairie de Veaux et Uss’m Follik, ‘issu du peuple’, quelques années plus tard). J’étais un Fabrice à Valmy. En première au lycée Saint-Martin. Cogné par un assistant de chimie, avec mes profs qui, devant moi, envisageaient de revêtir le treillis de leur guerre d’Algérie. Bof. J’occupais donc le théâtre. Avec les potes, fils de gens de l’OAS, mêlés aux blousons noirs de la ‘bande des plantes’, rétribués par les chrétiens-démo pour nous vider. Les pompiers nous aidaient en les aspergeant d’eau, les anars ardoisiers de Trélazé faisaient parfois le coup de poing avec nous. Je faisais l’estafette (en auto-stop) avec l’Odéon occupé : difficile de coordonner les actions au niveau national. J’avais 16-17 ans et enfin l’impression de vivre intensément sans voyager en beatnik (Moyen-Orient en 1967, plein de voyages). Nostalgie. Aucun regret. »
De toute façon, c’est tellement incompréhensible pour les moins de 70 ans que cela n’avait aucune chance d’être reproduit. Les journaleux, dès la cinquantaine, sont poussés vers la sortie. Au Monde, plus aucun condisciple ou confrère, j’imagine. À Libé non plus. Mais passons du coq à l’âne. À Émilie, très jeune orpheline axonaise, qu’Aïssa Lacheb fait revivre à Beine-Nauroy, village rasé par l’artillerie. Je ne sais si j’avais été l’Émile de Nauroy, mué en comte de Saint-Germain immortel, traversant mai 1968, toute cette agitation ne m’aurait pas paru dérisoire (en dépit des morts, car il y en eut sous les coups des CRS ou de la police ; peu, et j’avais rencontré le général commandant des CRS par la suite, et nous avions convenu que cela aurait pu être « si pire », comme on dit au Québec).
Le bilan de mai 1968, c’est avant tout qu’il n’y eut pas de guerre civile, comme en l’Espagne de 1936-1939. « Nous » l’espérions presque. Les aînés nous l’ont évité. Et en vieux réac que je suis devenu, pour un peu, je les en remercierai. Ne faut quand même pas pousser. Staliniens et mafieux (genre Pasqua-Papon) du cloaque gaulliste, démochrétiens aux « dents blanches » (Lecanuet), comprenaient dans leurs rangs de multiples crapules. Défaite : on leva l’occupation du théâtre d’Angers parce que des jeunes gens plus âgés que moi me firent savoir que la une du Courrier de l’Ouest (dit « le quotidien de l’évêché ») était déjà composée avec ce titre en gras : « Les gauchistes incendient le théâtre avant de l’évacuer ». Comme des niais, nous avions convié toute la population à venir débattre, sans filtrer les fachos, les bourges venus avec des fioles d’essence, &c. Et nous avons eu les foies. Peut-être aussi parce que parmi nous, les étudiants et lycéens, il y avait des « fils de famille », et des pères de famille (les anars des ardoisières de Trélazé), qui n’auraient pas supporté les conséquences. Judiciaires et familiales. S’ensuivront des dégâts, peut-être moindres que ceux d’une guerre civile : années de came, de sida, de misère et déclassement, &c. Bah, pas plus qu’à Cuba, qu’en la Chine des Habits neufs du président Mao de Simon Leys. Cela rend supportable la cohabitation avec les bouffons, genre BHL ou les amuseurs télévisuels, les jeunots tel Emmanuel Macron, les contemporains du genre Luc Ferry (faiseur et quasi-escroc qui dut rembourser ses émoluments à Paris-Diderot), et avec les conchieurs de Mai, Mais, Paris Mai (Claude Nougaro). Oui, « la Seine de nouveau ruisselle d’eau bénite », les féministes rances pompent les subventions, honnissent les hédonistes, et n’ont plus qu’une avidité d’exposition médiatique et de fric. Bof. « Ces temps-ci, je l’avoue, j’ai la gorge un peu âcre », mais avec mes allocs de retraite sans cesse réduites, je peux encore acheter du thé et du miel, et soigner mon dégoût supportable. Je n’ai que le cerveau d’estourbi, pas la gueule cassée des Poilus de Lacheb. Désormais, tant qu’on m’foutra la paix, j’me tairai. Juste un truc. À l’intention de nos « dirigeants » : les vieillards de 1968 ne supporteront pas qu’on fasse trop la vie dure à leurs enfants et petits-enfants. Et contrairement à Daesch, ils cibleront soigneusement en se faisant sauter ; préférable à l’euthanasie, non ?
Versus Fighting Story : le manga esport 100% français qui assure !
Les mangas sur le sport sont nombreux et remportent un franc succès. Il y a aussi plusieurs mangas sur les jeux vidéo qui commencent à émerger. Mais un manga sur l’esport, ce n’est pas courant. Surtout quand il est français. Versus Fighting Story est une curiosité qui attire déjà l’attention. Disponible depuis le 7 mars 2018 chez Glénat, voyons donc ce qu’il vaut. Continuer la lecture de « Versus Fighting Story : le manga esport 100% français qui assure ! »
Le Death Cleaning, la méthode de rangement iconoclaste venue de Suède
Tout récemment traduit de l’anglais, le livre « The Gentle Art of Swedish Death Cleaning: How to Free Yourself and Your Family from a Lifetime of Clutter », qui pourrait se traduire par « L’art délicat du rangement pré-mortem suédois : comment se libérer soi et sa famille d’une vie de désordre ». Tout un programme ! L’auteur et avant tout artiste Margareta Magnusson y explique comment on peut vivre mieux, et plus sereinement en se séparant de l’inutile.
Dans le sillage du livre de Marie Kondo
Ce nouveau livre s’inscrit sur la thématique popularisée par Marie Kondo, considérée par certains comme la papesse du rangement. Cette dernière, Japonaise trentenaire, a écrit un ouvrage intitulé « La Magie du rangement », dans lequel elle expose différents préceptes pour mieux ranger. Cet ouvrage allie des conseils résolument pragmatiques comme se débarrasser par sac poubelle entier de tous les objets « qui ne donnent pas de joie » à leur propriétaire avec des considérations un peu plus curieuses comme celle de devoir saluer sa maison avant d’y entrer.
Il s’agit donc d’un guide pour détoxer votre maison où vous apprendrez la nécessité de ranger et donc d’avoir des rangements adaptés à tous les objets et à toutes les pièces. Sur les rangements comme les penderies, vous en saurez plus sur veillon.ch.
Cependant, même si le livre de Margareta Magnusson s’inspire résolument de celui de Marie Kondo, il y apporte une souplesse, une légèreté et un second degré frôlant parfois l’absurde, propre à la culture scandinave.
Préparer sa mort par le rangement
En Suède, la « mort » et le « rangement » font appel au même mot, döstädning. Cette bizarrerie linguistique a, semble-t-il, transpiré dans la culture suédoise, puisqu’il est assez courant que les Suédois se débarrassent du superflu à l’approche de leurs derniers jours. Ceci afin de faciliter la vie de leurs proches, qui n’auront pas s’occuper du rangement et de la distribution des biens post-mortem. Il y a bien plus joyeux comme occupation, mais on ne peut pas reprocher à cette philosophie de manquer de pragmatisme.
La méthode proposée par l’auteur n’est donc pas révolutionnaire, mais consiste davantage à préciser pour les lecteurs étrangers cette spécificité culturelle, sur un ton résolument humoristique, afin que les conséquences pratiques d’un deuil ne viennent pas rajouter à la tristesse du deuil en lui-même.
Selon Margareta Magnusson, le döstädning ou death cleaning dans sa traduction anglo-saxonne, se base sur le principe de ne conserver que ce qui vous rend heureux ou pourra rendre heureux un de vos proches après votre mort. Tout le reste doit être jeté ou donné.
Cela peut se faire lors de repas, où vous invitez une personne susceptible d’être intéressée par tel ou tel objet devenu inutile pour vous. Vous pourrez ainsi juger de l’intérêt de la personne pour l’objet, lui raconter son histoire, et voir si le fait de lui donner cet objet pourra la rendre plus heureuse que vous en le gardant.
Cependant, cette approche peut ne pas vraiment convenir à tout le monde puisqu’il est d’abord nécessaire d’accepter l’idée de mourir avant de se lancer dans ce grand nettoyage.
Avis Fallout 4 Imaginer l’Apocalypse (Artbook)
Depuis le 4 janvier 2018, les fans français de Fallout 4 peuvent se procurer l’artbook officiel en français du jeu. Une bonne initiative qu’on doit une fois de plus au tout récent label Mana Books. Cet ouvrage est-il à la hauteur ? La réponse un peu plus bas. Continuer la lecture de « Avis Fallout 4 Imaginer l’Apocalypse (Artbook) »
Metal Gear Solid Projet Rex, le jeu version papier
Metal Gear Solid est une série de jeux vidéo d’espionnage/infiltration imaginée par Hideo Kojoma et éditée par Konami. Cette série se caractérise par des scènes très cinématographiques, des valeurs pacifistes et une grande réflexion sur la guerre. On peut maintenant se procurer Metal Gear Solid Projet Rex, la BD adaptée du premier jeu, en version française, grâce à Mana Books. Mon avis sur ce nouveau comics. Continuer la lecture de « Metal Gear Solid Projet Rex, le jeu version papier »
Thomas Ward l’Epouvanteur
Thomas Ward l’Epouvanteur est le quatorzième tome de la saga de l’Epouvanteur commencée par l’écrivain britannique Joseph Delaney en 2004. C’est un tome un peu spécial puisqu’il est en réalité le premier d’une trilogie.
Avertissement : Il est fortement conseillé d’avoir lu le livre en question, ou au moins de connaître un minimum la saga afin de ne pas risquer d’être spoilé ! Les informations suivantes ne racontent en aucun cas le déroulement du livre mais il reste néanmoins une critique littéraire et donc certains éléments vont être cités.
Titre initial : A New Darkness.
Date de sortie française : 22 novembre 2017.
Edition : Bayard Jeunesse.
Nombre de pages : 352.
Note Subjective : 16 / 20.
« La créature me gratifia d’un sourire hideux qui retroussa ses babines : — Ton pays appartiendra bientôt à mon peuple. Vos femmes seront soumises à nos lois. Quant aux mâles, hommes et garçons, ils mourront. »
Voilà trois mois que des jeunes filles meurent dans des circonstances mystérieuses. On les retrouve dans leur lit, couvertes de sang, une expression terrifiée sur le visage. Leur fantôme hante les lieux, attendant que quelqu’un comprenne de quelle horreur elles ont été victimes. Depuis la mort de John Gregory, Thomas Ward est l’Epouvanteur chargé de protéger le Comté des êtres qui errent sous le couvert de la nuit. Et il faut faire vite. Car la bête qu’il va traquer pourrait bien tuer encore.
Et ce n’est que le commencement : une armée de monstres se rassemble dans les terres du Nord et menace la survie de l’humanité…
Quelle surprise d’avoir trouvé un quatorzième tome de la saga l’Epouvanteur dans une librairie, par pur hasard. Ma cœur a d’abord battu la chamade, puis mon esprit rationnel s’est finalement exclamé : « Quoi ?! » En effet, j’ai mentionné une série dérivée lors de mon dernier article sur La revanche de l’Epouvanteur où j’avais conclu qu’il y avait une intrigue qui reprendrait l’histoire de Tom Ward avec A new darkness et A dark army. Les éditions françaises ont certainement décidé de continuer la série pour ne pas risquer de perdre des lecteurs… Hypothèse purement subjective ! Enfin bref, cette nouvelle trilogie semble donc correspondre aux tomes 14, 15 et 16 de la saga l’Epouvanteur : raisonnement dommage lorsqu’on sait que les treize premiers livres faisaient partie de Wardstone chronicles tandis que les trois nouveaux sont Starblade chronicles.
Inconsciemment, on a du mal à rentrer dans l’histoire à cause de ce choix éditorial. Car même si de nombreuses questions sont restées sans réponse à la fin de La revanche de l’Epouvanteur, c’était fini ! Or là, très sincèrement, on se demande vraiment l’intérêt d’avoir écrit une suite !
Heureusement, cette décision n’empêche pas le fait que Thomas Ward l’Epouvanteur reste un très bon livre. Le manque de John Gregory est cruel et mais on le ressent à travers le chagrin de son apprenti devenu Epouvanteur. Par ailleurs, l’absence du personnage d’Alice (qui créait une dualité parfaite avec Tom) est comblée par l’apparition d’une nouvelle protagoniste : Jenny. Oui ! Les fans l’ont reconnu ! Son arrivée répond à une des nombreuses questions laissées en suspens à la fin du tome précédent. Par ailleurs, nous avons également le plaisir de revoir des personnages laissés de côté mais indispensable tels que la fameuse Grimalkin, Judd Brinscall, Sang et Os.
Ce livre recèle néanmoins certains défauts qu’il serait judicieux de mentionner dans cet article. En tant que premier roman d’une trilogie, il doit poser les bases (même si celles-ci sont déjà plus ou moins posées dans les tomes précédents). Et souvent, ce procédé amène des lenteurs abusives dans la continuité du récit.
De plus, ce roman manque de créatures : on aperçoit quelques mages kobalos, deux varteki, trois/quatre esprits ; rien d’autre… pour un quatorzième tome (dommage pour Bayard), je trouve cela dommage.
Enfin, la fin est beaucoup trop abrupte. Je n’ai rien contre les fins qui suscitent un certain engouement pour lire la suite, mais là, je l’ai trouvé beaucoup trop cassant. De plus, en deux tomes, on perd nos deux personnages principaux ; Joseph Delaney a fait fort. Reste à savoir par quel miracle Tom Ward va ressusciter… et expliquer l’intérêt d’avoir lu un tel livre alors qu’il se termine ainsi !
Bis placent : L’Étrange questionnaire d’Éric Poindron repointe & bourgeonne
Ah, que voilà un livre qu’il est bon à remanier ! Soit à reprendre en main, relire. L’auteur, Éric Poindron, l’a retravaillé, tel un enfant de laboureur (et il en rapporta davantage, dirait Jean de la Fontaine). Votre propre trésor d’imagination affleurera « dedans » cet Étrange questionnaire.
Car d’écrire, j’en ai soupé (chichement ou, ma foi, convenablement rétribué), je n’ai pas participé – répondu – à ce Questionnaire. Lequel vous invite à le faire, je vous redirai plus loin pourquoi. Oh, et puis, non, ici même : car j’avais déjà, naguère, chroniqué ce L’Étrange questionnaire d’Éric Poindron ou le livre qu’il vous faudra en partie écrire (ou dessiner). Mais je l’ai soigneusement lu, et partant partiellement relu. Car ce qui vient de paraître au Castor astral est loin d’être la réédition dite revue et simplement augmentée du précédent ouvrage sorti par les éditions Les Venterniers (tirage épuisé, retirage improbable, la nouvelle version est une coédition). Notez qu’il n’est pas rare que divers éditeurs publient – hors réédition – des livres ou romans à titre rigoureusement identique. Il en est ainsi deux Au bout du monde, l’un d’un auteur dont j’avais retrouvé, circa 1990, le nom et l’éditeur (devenus inconnus même de Google), l’autre de Tom Corraghessan Boyle, que je voulais titrer (en vf) Aux diables vauverts, et même un titre de nouvelle, une pièce de théâtre. Et je ne vous mentionne qu’à peine les Le Bout du monde, de Marc Victor (Lattes éd.), ou de Maxence Trièves (éds du Mot Passant) et nullement les multiples variations livresques ajoutant un poil de ceci, un crin de cela (La Maison au… ; La Source au… ; Escales au… ; &c.). J’exclus d’ailleurs Au Bout du monde ou la passion du reportage de Dan Mitrecey (Cerf volant éd.), puisque le « ou la passion… » n’est pas sous-titre. Cela pour vous dire deux choses. Qu’onc ne vit deux titres identiques tant longs chez deux éditeurs – mais que l’auteur soit unique, à savoir Éric Poindron en personne, signant à même le titre comme à même le ciel et le sol réunis à l’horizon, autorise cet autoplagiat – et ce, surtout, à moins d’un an de délai. Je ne me calque pas (en redites et sur), mais m’inspire de, nuance, cet ouvrage étonnamment questionnant en ceci qu’il abonde en multiples références à d’autres livres d’auteurs proches ou lointains dans le temps et l’espace. D’où le « érudit » de ce « fantasque, érudit, malicieux, inclassable », de Jérôme Leroy (Prix Renaudot) et du bandeau orange portant au revers cette appréciation de Philippe Chauché (de La Cause littéraire) : « même en cherchant bien, aucun livre publié en ces temps ne ressemble à cet étrange questionnaire ». Paradoxe, car pourtant, pourtant, cet aimable questionnaire vous ressemblera, à vous, forcément vous, et je ne vous réexpliquerai pas pourquoi infra, il sera de vous-même. Ce serait verbiage puisque le titre est suffisamment explicite. La seconde explication étant superflue, je vous renvoie aux diverses critiques de la première parution, et vous en dispense volontiers. Déjà, je vous barbe jusqu’aux confins des finisterres avec mes Au bout… (à bout) dont transparaît la ficelle, mais pour la bonne cause : c’est, à l’inverse, pour souligner que les multiples références livresques de Poindron sont surprenantes et, ô joie, distrayantes.
Miscellanées et autres calembredaines
Parlons donc d’autres choses – que de la trame, ou l’ossature en creux, du Questionnaire (à vous de remplir le blanc des pages par vos réponses ou d’autres considérations ou crobars) – qui ne sont ni plus, ni moins essentielles que le susdit, mettons, squelette. Mais quand même… Ce bis repetita placent, qui appelle un ter, lope plus que phone, comporte cette fois 60 questions (dont trois numérotées 26, donc total 62), et surtout de nouveaux chapitres, des illustrations, soit 40 pages de mieux. Avec, en sus, des bonus dedans les nouvelles pages, des références qui peuvent induire vos réponses ou les détourner de leur version initiale. Chauché dixit (voir supra), ce livre est à nul autre pareil ; ajoutons qu’il résiste à la description au débotté. Le prière d’insérer, reproduit (mais différent de celui de l’édition antérieure) en quatrième de couverture, ébrèche plutôt bien l’obstacle : cherchez, et trouvez-le ! Évoquons d’abord la couverture campant l’écrivain en pied et posture d’auteur ésotérique. De quoi attiser votre curiosité et sans doute la convoitise de vos connaissances. Placez le livre bien en vue (munissez d’une chaînette ou d’un fin filin ce filon littéraire, heureusement exempt de trop fréquentes allitérations – Poindron n’est pas Truman Capote, je le place ici différemment en nouvelle allusion aux siennes, d’auteurs, qui auraient justifié un index – car il est d’un format aisément escamotable). Succès garanti. De quoi fournir un réel agrément conversationnel lors d’un dîner en ville languissant. Ce n’est guère plus onéreux (14,90 euros) qu’un coussin péteur, mais l’effet en sera plus durable et bien moins malséant. Quoique… Oscar Wilde et son « les questions ne sont jamais indiscrètes ; les réponses le sont parfois » peuvent revenir hanter votre salon (ou cuisine à l’américaine). Tout impétrant écrivain, auteures incluses, sera tenté·e de transformer ce questionnaire en keepsake à jalousement préserver ou offrir à, aux aimé·e·s. Parfait aussi, au gré des indices dans les réponses, pour présager d’une rupture : c’est vous faire subodorer la versatilité de cette rareté. Quant au style, il est à la fois fort divergeant de et fort similaire à celui de l’auteur de Comme un bal de fantômes, honoré d’un « meilleur recueil poétique de l’année » (en cours toujours, fin 2017) par un jury de 150 votants l’ayant auparavant sélectionné finaliste parmi 16 concurrents (sur une centaine d’entrants). Cet auteur, c’est Poindron, Éric, ici en mode bibliographique, idem, quoi, qu’Éric Poindron. Celui aussi, strictement un et indivisible, de pas moins de huit livres à paraître en 2018, dont un Je me souviens de Reims (ouvrage collectif au titre explicite, rien à voir avec le fameux Babylone, nue parmi les bananiers, de René Ehni, qui ne traite ni de Ninive, ni de monocotylédones). Un autre titre (encore incertain) retracera le périple d’un animal passant encore à l’époque pour relevant de la cryptozoologie. J’ai nommé Zafara (?, Soudan-1845, Paris), inspiratrice de décors et bibelots dits « à la girafe », qu’immortalisa Brascassat, Langlumé et tant d’autres artistes et illustrateurs, ainsi qu’un taxidermiste qui n’était pas Delalande (Després, peut-être… à moins que ce ne fut Duterrail). Poindron fut aussi un surprenant voyageur, sur les traces humaines de Stevenson et asiniennes de Modestine, aux doux yeux de mulâtresse. Et son Belles Étoiles, avec Stevenson dans les Cévennes reparaîtra, non plus chez Flammarion mais en autre demeure. Mais revenons à notre interrogatif ovin (au si significatif palindrome, ovni, mais en terreau littéraire le v peut prêter à confusion : objet volé non identifiable si vous ne marquez pas votre exemplaire d’un ex-libris). Poindron se livre écrivain-écrivant, cheminant et trottinant, à grands pas, plus volens (à nous, que du bien) que nolens, mais son introspection à la vulpine (de Renard, Jules) éclaire toute la gent de lettres en son for intérieur, tant antérieure que postérieure (à, par exemple, Raymond Queneau). Profond dans l’acte et la démarche (idem, car la lecture remémore et anticipe, l’imagination se remémore et projette), il nous la met – en scène et même en selle – l’écriture. Il consigne d’ailleurs une mini-anthologie, intitulée « aveux, paradoxes & spicilèges aux allures d’incitation à l’écriture », de mots d’écrivains célèbres ou obscurs, agrémentée d’un florilège de considérations de son cru (voire d’un feint double, à l’Ajar-Gary) sur les dessus et dessous de ce à quoi je mets fin provisoire : écrire, décrire, réécrire et se récrier pour (et tout contre) l’écriture. Juste une chute valant esquive : dans Poindron, il y a « poindre » (et non du moindre, que du meilleur).
Bloodborne, l’artbook officiel enfin en Français
Mana Books continue de faire la joie des joueurs en proposant toujours plus de livres dédiés aux jeux vidéo. Juste après Halloween, l’artbook Bloodborne débarque parfaitement dans l’ambiance de la saison automnale, sombre et morose. Continuer la lecture de « Bloodborne, l’artbook officiel enfin en Français »
Charly mouche et fouette Macron et Ça sent la rose !
Déjà auteur d’un Le Pot aux roses consacré à François Hollande, Charly (Charles Duchêne de son pseudo antérieur) récidive, toujours aux éds JBDiffusion, en décochant des piques à Emmanuel Macron dans un (prématuré ou prémonitoire, c’est selon) Ça sent la rose !.
Si la première impression compte, celle de Ça sent la rose collera durablement aux basques d’un président que Charly, devenu féroce pamphlétaire tel le père Duchesne (1789 et suivantes, pseudo collectif d’un précurseur du Marat publiciste de L’Ami du peuple), poursuivra sans doute de son exécration. Car ce petit opus d’une petite centaine de pages, quinzième du genre (depuis Il présidera, 2005), aura assurément une suite. Toujours en compagnie du caricaturiste du Canard enchaîné, Jean-Michel Delambre (auteur de maintes illustrations aérant la lecture des ouvrages charlyesques). Ça sent la rose brosse les quelque trois premiers mois de l’actuelle présidence et ambitionne, faute de pouvoir tirer la chasse, de créer un appel d’air. Qu’actionneront peut-être les plus prometteurs et douées de la jeune garde de la France insoumise. C’est du moins ce que pressent Charles « Charly » Duchêne, en froid avec un Méluche méluchonnant (et ses groupies Voix de son maître) au point de faire fuir un électorat qui le trouvait, naguère, prometteur. Mais, chez Charly, si l’observation des évolutions politiques reste primordiale, le style, direct, familier, prime tout autant, mis au service d’un humour, acerbe, narquois, primesautier, tintinnabulant en jester à clochettes agitant ses klappersteins, titillant aux dépens d’un peu tout de ce qui le défrise (et chagrine, voire souvent offusque la gent plébéienne).
Miscellanées
On trouve de tout au BHV (le Bazar du Marais), idem chez Charly. Lequel écrit souvent aussi précipité et foutraque que votre serviteur (nous nous lisons de longue date, au point peut-être de déteindre). D’où ces digressions récurrentes, d’un essai à l’autre, sur les parcours vers les divers salons du Livre (au nord de la Loire le plus souvent), et les bonnes adresses qui les jalonnent. C’est le petit travers pédagogique de Charly qui ne cesse d’inciter ses lecteurs à dénicher le gîte d’exception ou la cantine hors du commun à tarifs plus que raisonnables. S’il trouve, vous pourrez aussi passer expert dans l’art d’éviter les arnaques au long des routes. Là, avec Emmanuel Macron, c’est pour lui l’évidence, la plupart d’entre nous, gens de peu de revenus, s’est faite filouter. Pédagogique… Soit exposant l’impact de diverses macroniennes mesures budgétaires. Pour un smicard, le bonus sera, sur la fiche de paye, de 2,84 € mensuels ; pour un, une salariée au niveau moyen national, de 8,51 ; et pour une employée à mi-temps en touchant 900, ce sera 1,53 de mieux à la fin du mois. En revanche, les ponctions diverses anéantiront ce pactole. Ce que Charly met en rapport avec le gain pour Bercy de la réforme de l’APL (32,5 millions attendus, soit 0,0068 % de la fortune de Bernard Arnaud). « Pourquoi pénaliser 6,5 millions de personnes, alors qu’une seule pourrait y suffire ? », s’interroge Charly. Le coup de torchon sur l’ardoise de l’ISF l’a sans doute – litote – froissé. Charly saute souvent du coq à l’âne, et s’attarde aussi sur le sort de la musulmane de Laponie, obligée d’enfiler une burqa XXXL sur des empilements de pelisses et subissant, lors du ramadan, un jeûne de 22 heures et quelques (davantage si le calendrier de l’hégire coïncide avec le Midsommar de juin). Charly ne l’exprime pas ainsi, mais son détour à propos du burkini me l’a inspiré. Charly Chapo (voir infra) sautille d’un sujet d’actu à d’autres, proposant par exemple – au nom de la parité –, de remplacer la moitié des coqs des clochers par des poules. Cela étant, le Charly polémiste a parfois le raccourci un peu trop riquiqui, s’en prenant à une Europe dont la dirigeance dépend pour l’essentiel des décisions des chefs d’État et de leurs ministres des finances. Feindrait-il de l’oublier ? Mais qu’on soit en phase ou désaccord avec sa prose, elle vous suscitera maints sourires. Même les analystes d’En Marche, quelque peu éberlués par la chute brutale des sondages, ne sauront s’en empêcher. Ça sent la rose ! est plus présent dans les rayonnages des bibliothèques (même celle de Mouscron, en Belgique, bientôt…) que sur les étals des librairies (mais votre libraire peut le commander : c’est six euros, avec une douzaine d’illustrations de Delambre). Mieux, en prenant langue avec l’auteur (Twitter, @CharlyChapo ; F., idem en deux mots) – repérez aussi l’homme chapeauté sur les salons du Livre – vous pouvez espérer une dédicace.