Un vautour qui attend que meurt un enfant pour le dévorer.

Cette image fit le tour du monde et causa le désarroi du reporter photographe qui se donna la mort !

 


En mars 1993, au Soudan Sud, le village d’Ayod fut dévasté par la famine, cet enfant prostré sur le sol n’en peut plus, squelettique et près de la mort le vautour attend pour le dévorer./@ Kevin Carter /Sygma/ Corbis/Kevin Carter, document le Monde.fr.

 

Support Wikipedia Dans l’histoire de cette image tout le destin d’un homme, reporter photographique sud-africain, Kevin Carter de 33 ans qui se trouva devant un enfant soudanais affamé, presque sans vie, au bout de son existence pour cause de famine. Lorsque survint un vautour se posant derrière lui à quelques mètres attendant calmement qu’il meurt. De quoi être troublé, révolté, crier au secours pour donner à manger à cet enfant, le secourir et chasser ce charognard. Et bien non, Kevin Carter prit cette photo et attendit une vingtaine de minutes que cette bête affreuse s’envola. Et bien, non c’est lui qui chassa le vautour et s’en alla plusieurs kilomètres pour s’effondrer en larmes. L’enfant resta prostré sur le sol. Kevin Carter ne pensa pas une seconde, troublé par cette scène, poussé par son métier de chasseur d’images, le scoop mondial peut être, que l’enfant squelettique pouvait être secouru au centre alimentaire voisin. Cette image qu’un reporter photographe peut prendre une fois dans sa vie, lui donna une gloire éternelle puisqu’il reçu en 1994 le prestigieux prix Pulitzer, mais lui causa son suicide.

Il rentra dans l’histoire du photojournaliste puisque le 26 mars 1993 le New-York Times publia la photo et l’impact mondial fut immédiat, elle fit le tour du monde.

A cette époque le Soudan est en proie à la famine consécutivement à la seconde guerre civile Soudanaise qui dura de 1983 à 2005. Un conflit sanglant qui fit 2 millions de morts déplaçant 4 millions de civils qui fuirent vers les villes plus au sud, telles que Djouba, d’autres marchèrent vers le nord, jusqu’à Khartoum voire jusqu’à l’Éthiopie, le Kenya, l’Ouganda, l’Égypte, et d’autres pays voisins. On estima à 500 000 le nombre de soudanais ayant fui le Soudan.

C’est en mars 1993 que Kevin Carter accompagné d’un membre du Bang-Bang Club, Joao Silva, se rendit au Soudan Sud pour enquêter sur la guerre civile et la famine qui frappaient le pays, et dans le village d’Ayod, il tomba sur cet enfant qui se trainait lamentablement. Le Bang-Bang Club est une association de quatre photojournalistes actifs dans les townships, zones urbaines ou quartiers sous équipés et pauvres, d’Afrique du Sud entre 1990 et 1994, pendant la transition entre l’apartheid et les premières élections générales multiraciales.

Joäo Silva un des membres du Bang-Bang Club retrouva son ami Kevin Carter sonné par ce drame. Vingt années après il raconte, «il était clairement désemparé. Pendant qu’il m’expliquait ce qu’il avait photographié, il n’arrêtait pas de montrer du doigt quelque chose qui avait disparu. Il n’arrêtait pas de parler de sa fille Megan, il avait hâte de la serrer dans ses bras. Sans aucun doute, Kevin a été très affecté par ce qu’il avait photographié, et cela allait le hanter jusqu’à la fin de ses jours».

Le prix Pulitzer qu’il reçu apporta de ses pairs une reconnaissance mais en même temps beaucoup de critiques. La plupart portèrent sur l’éthique du photographe dans une telle situation. «L’homme qui n’ajuste son objectif que pour cadrer au mieux la souffrance n’est peut-être aussi qu’un prédateur, un vautour de plus sur les lieux», écrivit le St. Petersburg Times, quotidien publié en Floride. Beaucoup se demandèrent à voix haute pourquoi Carter n’aida pas l’enfant ?

Le New York Times après avoir publié la photo, reçut une quantité de courriers pour connaître le sort de l’enfant de l’image si bien qu’un éditorial dut être rédigé quelques jours plus tard pour informer que l’enfant regagna le centre mais sans que l’on sache s’il survécu.

Un photojournaliste espagnol du quotidien El Mundo se rendit à Ayod préoccupé par cette histoire et voulant en savoir plus sur l’enfant. Il ne trouva que des écrits accablant sur Kervin Carter laissant croire qu’il l’avait laissé mourir. Son enquête allait peut être lui rendre justice.

Ce journaliste rencontra un autre journaliste espagnol également présent dans ce camp en 1993. Son témoignage marqua un tournant dans la recherche de la réalité sur l’enfant. Constatant bien qu’une organisation humanitaire avait existé, cette information pouvait «laisser espérer que l’enfant survécu à la famine, au vautour et aux mauvais présages des lecteurs occidentaux». Il continua son enquête en rencontrant des employés de Médecins sans frontières qui travaillaient sur place à l’époque. Puis il se rendit sur les lieux.

Au terme d’une enquête de plusieurs jours, il rencontra le père de l’enfant de la photo de Kevin Carter. Dans le petit village, personne n’avait jamais vu la photo et ne savait qu’elle avait fait le tour du monde. La présence du vautour, tant décriée en Occident, ne frappait personne, tant ils étaient très nombreux dans la région. L’enfant avait effectivement survécu à la famine mais était mort quatorze ans plus tard des suites de fièvres intenses provoquées par une crise de paludisme.

On sait désormais que l’enfant livré à la mort par la famine et au dépeçage du charognard s’en fut sorti. Le destin de l’enfant répara la faute de Kevin Carter, mais, il ne fut plus présent pour en profiter. Le 27 juillet 1994, trois mois donc après l’attribution de son prix, Kevin Carter se donna la mort en s’empoisonnant dans sa voiture. Sur la note qu’il laissa, il évoqua «les souvenirs persistants de massacres et de cadavres» qui le hantaient. Rien sur l’enfant soudanais et le rapace. C’est pourtant cette image et le paradoxe du photojournaliste qu’elle incarne aujourd’hui encore que Kevin Carter symbolise, observer immobile l’horreur pour mieux la combattre.

Cette situation d’horreur devant l’enfant prostré et le vautour prêt à le dépecer pose sur le moment une prise de conscience et de sang froid. Le photojournaliste doit certes prendre la photo, chasser le charognard, mais surtout secourir l’enfant. On ne comprend donc pas qu’il se fut enfuit et après quelques kilomètres parcourus s’effondrer en larmes. Le remord de n’avoir pas secouru l’enfant ?