L’effritement et l’effondrement conséquent des systèmes, libéral ou communiste, trouve son explication dans leur application. Pour les systèmes dirigistes ou non-dirigistes, ceux qui représentent la force et ceux qui représentent le droit ont été les mêmes ; à partir de cet instant, la force faisant office de droit, c’est le règne de la force qui prime et non plus celui du droit. Qu’est-ce donc qui pourrait garantir le Droit de se libérer de l’emprise la Force ? L’homme ne peut-il échapper à ce dilemme ?

L’effritement et l’effondrement conséquent des systèmes, libéral ou communiste, trouve son explication dans leur application. Une théorie en elle-même n’est jamais fausse ; c’est quand elle est confrontée à l’expérience que se révèle la solidité du modèle qu’elle propose. Le système communiste aurait pu marcher si la corruption n’avait grippé les rouages de cette organisation de redistribution attribuant à une caste tous les pouvoirs, toutes les richesses et laissant en conséquence le reste de la population presque sans biens ni initiative. De la même façon, le système libéral aurait été viable si les acteurs les plus puissants de l’économie ne s’étaient entendus pour supprimer la concurrence, c'est-à-dire le moteur même de cette organisation, et n’avaient falsifié la finance qui en est le second mécanisme. Une théorie est donc applicable à partir du moment où on ne change pas ses paramètres en cours de route. De la même manière, le jeu s’arrête quand les partenaires n’en respectent plus les règles.

Faut-il attribuer ces disfonctionnements aux seules faillites humaines ? Lorsqu’une théorie ne trouve pas d’application convenable, c’est qu’elle-même est défaillante et comporte des lacunes. Le libéralisme préconisant la liberté totale octroyait également la liberté de changer ses règles. Le communisme prévoyait une redistribution des richesses mais, du fait de son organisation pyramidale, la confiait à un seul individu. L’unicité et la pluralité sont des antagonismes irréconciliables. De plus les mains qui prennent peuvent-elles être celles qui donnent ? Dans un cas comme dans l’autre, pour les systèmes dirigistes ou non-dirigistes, ceux qui représentent la force et ceux qui représentent le droit ont été les mêmes ; à partir de cet instant, la force faisant office de droit, c’est le règne de la force qui prime et non plus celui du droit.

On peut se demander alors si, dans toutes entreprises humaines, cette contamination est inévitable. La faillite des systèmes nous fait prendre conscience d’une chose, c’est que, pour le moment, nous n’avons pas trouvé de fonctionnement où la force et le droit ne soient pas concentrés dans les mêmes mains.

Forcément, ceux qui exercent le droit, et qui donc pourront en étudier le fonctionnement, appartiennent ou vont appartenir à une caste de privilégiés. Devrions-nous alors exclusivement recruter ceux qui vont l’exercer dans la partie la plus défavorisée de la population ? Cet autoritarisme choque et ne peut produire que des injustices. On pourrait au moins faire en sorte qu’aucune barrière économique et sociale ne puisse empêcher ce recrutement.

L’autre solution serait que tout le monde accède à une même compétence juridique ce qui, vu la complexité de notre société actuelle, ses niveaux de spécialisation et de concentration, semble tout à fait illusoire. Une solution supplémentaire serait d’édifier un contre-pouvoir à la force où s’allieraient le droit et l’information afin que le droit ne puisse être condamné au silence par la force. Il faut dire que cela fonctionne déjà, mais qu’au lieu d’être amenuisé par certaines manœuvres politiques, cela devrait être renforcé, officialisé, légiféré.

Mais la promulgation de lois n’est pas suffisante non plus. Leur mise en application est indispensable ; sans elle, l’exercice de ce contre-pouvoir ne reste qu’un vœu pieux, qu’un rêve, qu’une utopie. Le droit, de nouveau, se retrouve confronté à la force. Que peut le droit s’il n’a pas les moyens de fonctionner ? Qu’est-ce donc qui pourrait garantir le Droit de se libérer de l’emprise la Force ? L’homme ne peut-il échapper à ce dilemme ? Est-il dans sa nature de ne le pouvoir ?

Généralement, dans ce genre de situation, on invoque la volonté politique. Et nous revenons au point de départ, aux systèmes économiques et politiques auxquels vont se référer nos dirigeants. Quel système peut garantir que la force ne s’imposera pas au droit ? Existe-t-il un tel système ? A-t-il un nom ? Est-il à inventer, à préciser, à inventorier, à explorer ?

Pour conclure, disons que, quand deux systèmes se trouvent être défectueux, il faut bien en trouver un troisième qui nous permettent de tirer les leçons des erreurs mais également des demi-succès du passé. Nous pourrons donc affirmer une chose, c’est que ce troisième système ne sera ni communiste ni libéral, ni totalement dirigiste, ni exclusivement non-dirigiste. La tâche est-elle insurmontable ? Gageons que cette mise au point prendra du temps et nécessitera encore pas mal d’essais et d’erreurs. Reste à savoir si nous en aurons le temps. Le vaisseau planétaire qui nous porte aura-t-il la patience d’attendre ? En aura-t-il les capacités ?