Face à la multiplication de troubles sociaux liés à la flambée du prix des produits alimentaires, la communauté internationale a reconnu ce week-end l'urgence d'une action concertée au niveau planétaire, qui demande désormais à se traduire dans les faits. "Nous devons mettre de la nourriture dans des bouches qui ont faim. C'est aussi abrupt que cela", a déclaré le président de la Banque mondiale, Robert Zoellick, au terme d'une réunion à Washington du comité conjoint pour le développement de son institution et du Fonds monétaire international.

L'envolée du prix des denrées de base, qui a provoqué de violentes manifestations dans plusieurs pays du tiers monde ces dernières semaines, doit être au centre des préoccupations des gouvernements, ont insisté Zoellick et le Premier ministre britannique Gordon Brown au cours du week-end. Brown a promis de soulever la question lors du prochain sommet du G8, mais "franchement, cette réunion est en juin et nous ne pouvons pas attendre", a souligné Zoellick.

Entre autres denrées, le prix du riz s'est envolé de 75% en deux mois et celui du blé a grimpé de 120% au cours de l'année écoulée. Le problème est d'autant plus aigu que la part du revenu consacrée à l'alimentation atteint jusqu'à 75% dans les pays pauvres, contre 10 à 20% dans les pays riches .

 

37 PAYS MENACÉS SELON LA FAO

En Haïti, dix jours d'émeutes marquées par la mort de six personnes ont conduit à la démission du Premier ministre. Au Cameroun, les manifestations contre la cherté de la vie ont fait plusieurs dizaines de morts en février. D'autres mouvements de protestation ont éclaté en Egypte, au Niger, au Burkina Faso, en Indonésie ou aux Philippines. Selon la FAO (Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture), ce sont 37 pays qui sont aujourd'hui menacés de crises alimentaires.

"On va vers une très longue période d'émeutes, de conflits, des vagues de déstabilisation régionale incontrôlable", prédit le sociologue suisse Jean Ziegler, rapporteur spécial de l'Onu pour le droit à l'alimentation, dans une interview à Libération.

LE POIDS DES BIOCARBURANTS

L'un des facteurs expliquant cette envolée des prix est l'utilisation d'une part croissante et significative des terres arables pour produire des biocarburants. Pratiquement tout le supplément de récolte mondiale de maïs entre 2004 et 2007 a servi à fabriquer aux Etats-Unis cette alternative au pétrole.

"Quand on lance, aux Etats-Unis, grâce à six milliards de subventions, une politique de biocarburant qui draine 138 millions de tonnes de maïs hors du marché alimentaire, on jette les bases d'un crime contre l'humanité pour sa propre soif de carburant", accuse Jean Ziegler. 

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