Bambin dévoré vivant : Brigitte Bardot à Bucarest ?

Le 29 septembre prochain, un référendum local sera organisé à Bucarest. Le sort de quelques dizaines de milliers de chiens de la capitale roumaine en dépendra. Brigitte Bardot viendra-t-elle adopter la meute de chiens errants qui ont dévoré vivant Ionut Anghel, 4 ans, sous les yeux de son frère de 6 ans, ou rapatriera-t-elle sur la Côte d’Azur un peu plus de 60 000 fauves ?

Ionuţ Anghel

Citeste mai mult: adev.ro/msp15p

Ionuţ Anghel

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Ionuţ Anghel

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Le président roumain, Traian Basescu, s’est prononcé pour euthanasier tous les chiens errants de Roumanie.
Bien sûr, son opposant et allié du Premier ministre Ponta, le président du Sénat, Crin Antonescu, a protesté : les hommes (dont le président Basescu ?) sont responsables de la mort du petit Ionut, pas les chiens qui l’ont dévoré vif.

Antonescu risque de ne pas être écouté par les habitantes et électeurs de la capitale roumaine qui sont appelés par leur maire, Sorin Oprescu, à répondre par da o nu à la question de l’euthanasie des chiens errants de la capitale.
Il faut dire que l’édile est fort critiqué pour des tas de raisons (des problèmes de circulation, de pollution, d’équipements…) et le fait qu’entre 60 000 et 65 000 chiens errants posent de multiples problèmes. Or, au bout de cinq ans de mandat, le maire se voit reprocher d’avoir facilité la mort d’un jeune garçon de quatre ans, laissé jouer dans un jardin accessible au public, le parc Tei. Sa grand-mère l’avait confié à son frère aîné (six ans) pour aller s’asseoir quelques instants. C’était en début de semaine, cela fait depuis la une d’Adevarul, d’Agenda, et de la presse roumaine.

En de nombreuses villes roumaines, en raison de la prolifération d’animaux laissés à l’abandon, il est interdit de détenir plus d’un chat ou d’un chien par foyer. Le problème est national, pas du tout nouveau, mais davantage marqué dans la capitale qui jouit d’un statut comparable à celui de Paris (municipalité, conseil général, et siège préfectoral).

Évidemment, après le drame, les débats et témoignages se sont multipliés, les associations (d’un peu tout, de défense de l’enfance, des animaux, d’aide aux personnes âgées…) ont été sollicitées. Brigitte Bardot aussi. Dans une lettre datée d’hier 5 septembre, elle s’est adressée au président Basescu, exprimant son « infinie tristesse ». Tellement infinie que, dès le paragraphe suivant, elle se déclarait « extrêmement choquée d’apprendre qu’une vengeance, qui n’a pas lieu d’être, va s’abattre sur tous les chiens de Roumanie, même les plus gentils… ».

Parmi les plus gentils, peut-être le chien de l’association Caleidoscop, présidée par Carmen Secareanu, qui aurait été adopté mais aurait pu participer à l’assaut puis à la curée. Un parlementaire européen a déposé une plainte contre l’association.

La Fondation Brigitte Bardot fait valoir qu’elle a contribué à ce que la situation des chiens errants soit résorbée à Brasov, l’une des plus importantes villes du centre de la Roumanie. Brigitte Bardot préconise stérilisations et adoptions massives. Fort bien, mais nombre (en fait, la majorité) de foyers roumains ne pourraient même pas entretenir un chat. Brigitte Bardot entend porter l’affaire devant les instances européennes. L’infinie tristesse n’exclut pas la menace. La Fondation Bardot, dont il est permis de se demander pourquoi elle a été reconnue d’utilité « publique » et peut recueillir des fonds donnant lieu à dégrèvement fiscal, pourrait réclamer que le principe « un chien, une voix » s’applique, il n’est pas sûr que l’électorat de la capitale roumaine veuille se considérer putatif complice passif d’une future curée d’enfant(s).
On notera que la Fondation n’a pas daigné faire traduire la lettre ouverte de sa présidente en roumain… Par respect pour son âge, je ne traduirais pas vers le français les commentaires des Internautes roumains, pour la plupart outrés, ou franchement ironiques. Parmi les suggestions, des lâchers de loups un peu partout dans les villes françaises : histoire de voir si l’adoption serait préconisée.

La presse roumaine a tenté d’équilibrer la présentation des faits, notamment par l’iconographie. Évidemment, pas de juxtaposition de gentil toutou et de petit cadavre humain déchiqueté, mais des photos montrant des chiens susceptibles d’être adoptés et d’autres, de canins furieux montrant les dents, se battant, bref, révélant une nature animale guère plus aimable que l’humaine (hier, des supporters d’un club de foot hongrois et les fans roumains d’un club local en sont longuement venus aux mains dans la capitale).

Brigitte Bardot n’a pas cherché à connaître le rapport du légiste, ni à entendre Andrei, l’enfant survivant, ou sa grand-mère, Aurica Anghel. Le Dr Salem Abdo a considéré que l’enfant a été dévoré, mordu et mordu encore « des centaines de fois » par au moins cinq chiens. 

La stérilisation (et même sans doute l’adoption, en tout cas pas immédiatement) ne résoudra pas les morsures aux chevilles ou mollets des personnes âgées qui, parfois, se cassent le col du fémur ou le bassin. De janvier à mai 2013, il n’y a eu, à Bucarest, « que » six mille cas de personnes (dont mille d’enfants) mordues à être recensés. Comprenez qu’il y en a bien davantage : à quoi bon se signaler aux autorités ? En 2010, on n’en recensait que le double sur toute l’année. En fait, ne sont recensées que les personnes mordues ayant nécessité des soins un tant soit peu importants, lesquels soins représentent, au total, des sommes considérables. Davantage peut-être que celles dérivées de la TVA sur l’alimentation et les produits pour animaux.

On compte environ, dans la capitale, un chien errant pour 30 humains (et avec les domestiques, beaucoup plus d’animaux quadrupèdes dits de compagnie, dont certains mordent et mutilent aussi). Une proportion parfois égalée dans de grandes villes en dépit des mesures prises, ou surtout annoncées, budgetées, financées…
Mais très souvent, l’argent s’est envolé ou à fini surtout par enrichir des associations, des fondations, sans résultats réellement probants.

Trian Basescu considère que si la stérilisation s’accompagnait de l’arrachage des dents de tous les chiens (ce qui ferait hurler Brigitte Bardot), elle serait envisageable, quoique beaucoup plus coûteuse. Le président avait donné l’exemple en adoptant et entretenant trois chiens, à l’occasion d’une précédente campagne. 

Carmen Arsene, une Brigitte Bardot locale, plaide logiquement pour la stérilisation, appliquée en Turquie et en Bulgarie ou dans des villes comme Oradea. Sauf que les parents d’élèves voient l’immédiat. L’association de protection de l’enfance Despre Copii organisait, ce vendredi soir (à 19 heures locales), une marche blanche place Romana. Des slogans réclamant la démission du maire ont été scandés. D’autres manifestations sont prévues.

L’Aspa (la SPA roumaine) a reçu de la mairie de Bucarest la somme de 18,6 millions de lei pour l’année en cours (près de cinq millions d’euros). C’est plus que ce qu’avait reçu, en 2006, la famille d’un Japonais de 68 ans, mort à Bucarest, mordu par des chiens.

En avril 2008, c’était le tour d’une fillette de six ans. Le 25 janvier 2011, un homme de 49 ans succombait. Puis, en mars, une femme de 62 ans, cette fois à Albota (Arges). 

Les défenseurs sincères (et non intéressés) des animaux se disent toujours profondément désolé en cas de morts d’enfants, de mutilations à vie d’humains, &c. Mais cela dure moins que leur deuil de leurs animaux de compagnie ; sauf quand cela n’arrive pas qu’aux autres et que c’est son propre enfant ou petit enfant qui est défiguré ou estropié. Là, bizarrement, la perception change.

C’est beaucoup plus porteur, internationalement, de venir au secours des chats ou des chiens. L’actrice Hilary Swank était venue, en 2012, parader avec son chien, Kai. Elle n’aurait pas laissé son chien, un jack russell, jouer avec les fauves, mais elle a pu poser pour des photos.

Les maïdazeni (chiens errants) sont beaucoup trop nombreux pour être adoptés en Roumanie. Que les bonnes âmes des autres pays se dévouent, à leurs risques, et ceux de leur progéniture.

Brigitte Bardot va encore avoir l’occasion de s’émouvoir. Le Parisien rapporte ce jour que « deux enfants, âgés de 4 et 6 ans ont été agressés par un chien, ce samedi 7 septembre, vers 18 h 30, villa Curial dans le XIXe arrondissement ». L’un est à l’hôpital, l’autre a pu être soigné (pansé). Le chien devant faire l’objet d’un placement, la Fondation Bardot va peut-être s’en charger et lui réserver un traitement royal canin.

Auteur/autrice : Jef Tombeur

Longtemps "jack of all trades", toujours grand voyageur. Réside principalement à Paris (Xe), fréquemment ailleurs (à présent, en Europe seulement). A pratiqué le journalisme plus de sept lustres (toutes périodicités, tous postes en presse écrite), la traduction (ang.>fr. ; presse, littérature, docs techs), le transport routier (intl. et France), l'enseignement (typo, PAO, journalisme)... Congru en typo, féru d'orthotypographie. Blague favorite : – et on t'a dit que c'était drôle ? Eh bien, on t'aura menti !

8 réflexions sur « Bambin dévoré vivant : Brigitte Bardot à Bucarest ? »

  1. Il faut appeler les cuisiniers chinois à la rescousse pour fabriquer des hotdogs et du corned-dog: ils ont toute une variété de recettes plus délicieuses les unes que les autres
    L’autre solution, ce serait de les envoyer directement en chine… 🙂 😉 😀

  2. Ce problème n’est pas nouveau ! La stérilisation pas une solution. Un animal qui a goutté le sang y revient. Que faire alors les tuer tous ? Ou empêcher qu’ils se multiplient ?
    Un appel à l’adoption, puis au bout de six mois les euthanasier ( d’office pour un animal montrant des signes d’agressivité).

  3. Le problème, de la manière dont je vois les choses (mais c’est ma manière de voir les choses, et je n’oblige personne a penser comme moi), ce n’est pas exactement « les chiens »…
    Le problème, c’est … l’humain … qui n’a pas été fichu de laisser vivre normalement certains animaux, et qui a voulu en faire des « domestiques ».
    Alors, à force d’avoir des animaux domestiques, de les voir non plus comme des êtres vivants, mais comme des marchandises qu’on achète, qu’on donne, qu’on jette, l’humain a créé une nouvelle race de chiens errants…
    Difficile de faire marche arrière…

  4. Résident à Bucarest j’ai moi même été mordu début août au dessus du mollet. Je suis pas très à l’aise avec les chiens mais c’est vrai que la plupart des chiens errants sont « inoffensifs ». Malgré ma « peur » des chiens, je trouve cela regrettable de devoir les euthanasier mais c’est malheureusement la seule solution et elle doit être appliquée selon moi

  5. La situation actuelle decoule de l inertie des gouvernements roumains qui ont laissé se multiplier ces chiens alors qu en même temps ils recevaient des subsides de l europe pour les stériliser!
    Et vous qui vous moquez de Brigitte Bardot savez vous que sa Fondation a donne beaucoup d argent pour stériliser des chiens à Brasov et que cette politique commence à payer car le nombre de chiens a fortement diminué?
    Mais c est plus facile d euthanasier à tout va! ET en fait d euthanasie il s agit plus de massacres à coups de pelle,poisons. Des chiots sont même brûlés vifs devant les adultes et enfants qui rigolent!
    Quelle belle humanité!
    Si un homme de 30 ans m agresse dans la rue pour me voler et que je suis gravement blessée dois je demander à ce que soient supprimés de façon barbare tous les hommes de 30 ans ?
    Voyez vous seulementcl absurdité de la situation?
    Rien qui ne doive étonner l humain supplante toutes les autres races dans la barbarie, il l a amplement montré et le montre tous les jours!

  6. Je comprends, Roxane2, votre réaction.
    Simplement, Brasov, comme Sibiu, sont des villes bien différentes de Buc.
    En sus, Sibiu, qui fut capitale européenne de la culture, ne pouvait se permettre de donner le spectacle de meutes aboyantes et menaçantes.
    C’est fort bien de stériliser, mais un chien stérilisé peut mordre combien de temps avant de perdre ses dents ?

    Des gens comme vous, que je respecte, partent généralement du principe que se montrer plus humain avec les animaux concourt à devenir plus humain avec les humains. Les gestapistes aimaient sans doute leurs chiens et la famille al-Assad les poissons rouges.
    Je ne déteste pas les animaux, pas même les moustiques ou les rats, et j’apprécie chats et chiens en semi-liberté (cela semble réciproque).
    Sauf que cela tient à ce qu’il n’y a pas de surpopulation insupportable d’animaux.
    J’apprécie peu en revanche toute cette « industrie animalière ».

    Je connais fort bien les problèmes de corruption en Roumanie. Cela dit, je ne pense pas que des édiles ou des personnes d’affaires vont organiser des sortes de jeux du cirque pour mettre à mort des « toutes » sous les rires et cris de liesse. Faut pas exagérer.
    La SPA (la Royal Society équivalente est devenue un repaire de quasi-truands, je le signale au pssage), la Fondation BB sont très fortes pour attendrir sur le sort des animaux. Si la photo du cadavre de ce gamin était largement diffusée, cela changerait peut-être la donne.
    La presse populaire britannique diffuse les photos de personnes défigurées par des chiens ; cela n’empêche les Britanniques d’apprécier les animaux mais les rend peut-être plus lucides.

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