On dit souvent que la parole est d’argent et que le silence est d’or, une vérité pas toujours vraie surtout quand, à côté se jouent des sommes colossales. Le festival de Cannes 2012 vit ses dernières heures, le strass et les paillettes vont bientôt plier bagages et la vie habituelle va reprendre son doux cheminement. Les grosses affiches se présentent progressivement et les "stars" mondiales foulent le tapis rouge.

La joie et la bonne humeur vont de paire avec le business et le marché du cinéma, les distributeurs sont là pour dénicher la perle rare, la pellicule qui pourrait leur faire gagner des millions d’euros. Une intruse a semé les vents de la polémique, une information comme quoi certains journalistes devaient débourser des milliers d’euros pour pouvoir faire leur métier d’intervieweur. Une société canadienne de distribution, assurant la venue des acteurs à Cannes, a senti le bon filon pour augmenter ses revenus durant le festival.

Alliance, pour la nommer, a établi une grille de tarifs fluctuant selon les médias et le type d’entrevue. Pour 1500 euros, les journalistes peuvent avoir 4 interviews télévisuelles en tête à tête, pour 750 euros, une interview écrite en groupe, on partage les frais, c’est mieux et pour 1000 euros, une interview écrite en tête à tête. Une première pour ce festival, on espère également une dernière. Ces prix abusifs sont justifiés, par le groupe Alliance, par le fait qu’organiser ce genre de déplacement engendre d’énormes frais.

Il faut payer l’avion, les stars ne voyagent pas en charter, les réservations d’hôtel, les soins quotidiens, les maquilleurs, les traiteurs, les sorties en discothèques, les déplacements locaux dans des voitures de luxe, le café, etc. Des balivernes, le café est gratuit pour le gotha du cinéma, par contre, pour le quidam, il coûte plus de 2€ ! De plus, les stars sont souvent invités aux soirées privées où ils reçoivent des packs remplis de cadeaux.

En guise de protestation, les journalistes canadiens, également ceux soumis à ces mêmes règles, ont boycotté les séances d’interview. Un geste courageux mais utile, car jouer à ce jeu, c’est favoriser la mercantilisation du journalisme, permettre aux journaux riches de survivre et aux moins fortunés de mourir.

 

L’acteur par qui ce scandale est arrivé est Brad Pitt. Il est arrivé sur la Croisette de façon messianique, les cheveux longs, la barbe de 3 jours, il ne manquait plus que l’aube blanche et son bâton de berger plutôt que le smoking grande classe et le Iphone à la main. Il est venu présenter le film d’ Andrew Dominik, en compétition,Killing them softly, dans lequel il incarne un tueur à gage sans scrupule. Des gages, il en était question quand les journalistes voulaient recueillir des bribes d’informations sur les sentiments de l’équipe du film et de la vedette concernant leur séjour cannois. 2500 euros, les 20 minutes, ça fait cher l’heure !

Je dois avouer, en tant qu’amateur de cinéma et portant un grande admiration à Brad Pitt, j’ai été déçu. Il incarnait jusque là, la célébrité engagée pour les causes humanitaires, adoptant des enfants pauvres avec sa femme Angelina Jolie, grande absente des festivités, un comédien de talent sachant mettre sa popularité à contribution, fortuné mais jamais trop bling-bling. Dans ma grande déception, quelque peu naïve, je l’avoue, j’ai été soulagé de voir qu’il avait suspendu toutes ses interviews afin d’éviter que les journalistes aient à débourser de l’argent pour cela. Grande classe malgré tout, tout comme son costume.