Un groupe de dix chercheurs en sciences économiques des Universités de Caen, de Strasbourg et du CNRS ont mené à bien un nouveau projet du Centre d’analyse stratégique sur l’organisation des consultations électorales.
L’étude vise à attirer l’attention sur les différentes façons dont les électeurs raisonnent selon le mode de scrutin. Ainsi, certains modes de scrutin poussent au « vote utile » quand d’autres permettent d’exprimer davantage nos préférences.
Trois communes, Illkirch en Alsace, Louvigny en Basse-Normandie et Cigné dans les Pays de la Loire, ont participé à l’expérience, lors du premier tour des présidentielles, d’autres modes de scrutin que le scrutin uninominal à deux tours. Le vote par note et le vote par approbation ont ainsi été testés dans quelques bureaux de vote. Un pré-rapport vient d’être édité en vue du séminaire portant sur ce sujet prévu le 28 juin 2007 à Paris.
Le vote par note revient à attribuer une note à chaque candidat (0, 1 ou 2), est élu celui qui obtient le total le plus élevé. Le vote par approbation permet à chaque électeur d’accorder son soutien à autant de candidats qu’il le souhaite (aucun à tous), est élu celui qui rassemble le plus grand nombre de soutien.
Les électeurs ont été invités, à la sortie du scrutin officiel et sur la base du volontariat, à participer aux votes expérimentaux. Plus de 60% des électeurs ont accepté de se prêter au jeu. Des questionnaires sur leur façon de voter et sur l’expérience leur ont ensuite été proposés.
L’étude vise à attirer l’attention sur les différentes façons dont les électeurs raisonnent selon le mode de scrutin. Ainsi, certains modes de scrutin poussent au « vote utile » quand d’autres permettent d’exprimer davantage nos préférences.
Cette expérimentation est née de deux constats.
Le premier repose sur les résultats du premier tour des élections présidentielles de 2002.
Appuyés par l’analyse des questionnaires, les chercheurs pensent que si les électeurs avaient eu connaissance et conscience des conséquences de voter pour les « petits partis », ils auraient opté pour un « vote utile ». Le système électoral actuel incite donc les électeurs à taire leurs véritables préférences électorales pour voter utile. Or, le vote est également un moyen d’envoyer un signal précis aux hommes politiques. Le mode de scrutin doit pouvoir offrir à chaque électeur les moyens d’exprimer ses préférences et d’en retirer de la satisfaction.
Le second constat se rapporte aux résultats théoriques sur les modes de scrutin.
Les théoriciens du vote (issus des mathématiques, des sciences économiques ou de la science politique) étudient les propriétés des différentes méthodes de scrutin. En particulier, le problème du vote stratégique est très étudié : on sait à présent que certains modes de scrutin sont meilleurs que d'autres sur ce point. Les discussions portent ainsi sur les qualités relatives du vote plurinominal (un seul candidat dans une liste), du score de Borda (classement selon l’ordre de préférence), du vote alternatif (comme le score de Borda ; si aucun n'obtient la majorité absolue des premiers choix, celui ayant le plus petit nombre de premier choix est éliminé, et ainsi de suite), du vote par approbation (ou vote par assentiment) ou de la méthode par note (ou vote par évaluation).
Si les conclusions des scientifiques ne sont pas unanimes pour sélectionner un mode de scrutin optimal, elles le sont en revanche pour en écarter d'autres, dont le vote majoritaire à deux tours, abondamment utilisé. Plusieurs explications peuvent être avancées pour expliquer le fait qu’on n’utilise pas d’autres modes de scrutin en France, notamment le fait que les modes de scrutin alternatifs seraient compliqués à comprendre pour les électeurs et difficilement applicables à grande échelle. Le mode de scrutin doit être simple à comprendre pour tous les électeurs et à mettre en oeuvre dans les bureaux de vote.
Ce sont donc le vote par approbation et le vote par note à 3 niveaux qui apparaissent comme les modes de scrutin les plus opportuns et les plus aptes à remplir ces deux conditions.
Les résultats de l’expérimentation
Vote par approbation
François Bayrou arrive en tête, alors que ces mêmes électeurs ont voté officiellement pour Nicolas Sarkozy.
Vote par note
Même résultat final que le vote par approbation.
Pour en savoir plus et télécharger le pré-rapport : Centre d’analyse stratégique