La dégringolade de Trump, désavoué par les économistes et les « siens »

Jusqu’à dix points d’écart pour Clinton, d’éminents républicains le reniant, les analystes économistes le déconsidérant, est-ce le début de la fin pour Donald Trump ?

donald-trump-Fox-NewsAncien de la CIA puis de Golman Sachs, surdiplômé, républicain, Evan McCullin annonce sa candidature en indépendant. Il est le dernier en date à se présenter, pousser à le faire par des élus du Grand Old Party voulant rassembler les républicains disant s’abstenir, voire voter Hillary Clinton.

Ce n’est pas son entrée en lice qui fait reculer Tromp dans les tous derniers sondages. Il n’est pas assez connu, il est d’autres candidats (une écologiste, un libertarien…). Mais cette fois l’écart se creuse vraiment entre Trump et Clinton. Jusqu’à dix points… 41 contre 51 pour Clinton.

Pourtant, Trump croyait vraiment à un rebond. Sa phraséologie détestable semblait abandonnée, il n’a pas élargi son florilège de blagues douteuses après son discours de Detroit (Michigan). Une ville qui a perdu des milliers d’emplois industriels du fait de la concurrence étrangère et se délite à cause, selon Trump, de la politique économique d’Obama.

Mais cesser d’invectiver, voire d’éructer, n’a pas suffi à le faire rebondir. Hormis chez les électeurs vraiment sensibles à ses promesses, et déconsidérant toute critique venant de l’establishment, du « système », il passe désormais pour un impulsif, incompétent, si ce n’est pathologiquement atteint.

L’agence de notation Moody’s a comparé ce qu’il reste de son programme économique – pourtant élagué pour sembler plus crédible – et celui des démocrates. Les projections pour la fin de la mandature (2021) sont toutes défavorables à Trump. Chômage, coût de la vie, prix de l’immobilier : Clinton ferait mieux. Et surtout, Trump ferait exploser dans le rouge le rapport dette/PIB. Bref, il a tout faux.

Une partie de l’électorat n’y prêtera guère attention. Elle sera peut-être plus sensible aux indications voulant que les mesures fiscales qu’il envisage vont encore favoriser davantage les plus richissimes et les plus aisés. Quant à celles bénéficiant aux familles avec enfants, elles peuvent paraître illusoires. Alors qu’il les annonçait, la presse dénonçait la politique sociale de sa fille Ivanka, dont la société (une firme de prêt-à-porter) n’accorde que le minimum de jours non rétribués requis pour les congés parentaux.

Plus grave encore. Les défections républicaines se succèdent et s’amplifient. Cela semblait avoir culminé la semaine dernière avec l’annonce officielle que le club républicain des anciens élèves de Harvard déconseillait de voter pour lui en des termes très durs. Parmi ces anciens, certains voteront même Clinton et Trump ne pourrait compter que sur les 10 % d’indécis pour tenter d’en convaincre une fraction.

Mais non, ce n’était pas le coup le plus dur à venir. La presse a largement répercuté une lettre ouverte de 50 très hauts fonctionnaires ou responsables républicains des administrations Bush père et fils. Les paragraphes font succéder des volées de bois vert à des allers-retours de gifles avant de se conclure par un véritable coup de pied au derrière : allez, ouste, Trump met en danger l’État fédéral, les principes républicains, l’influence des États-Unis dans le monde, qu’il pourrait conduire à la catastrophe. Si ce n’est pas un appel au meurtre, c’est flèches, banderilles, estocades à foison. Les exagérations de Trump lui valent des effets boomerang.

Cela ne suffisait pas. Après tant d’autres, mais sans doute avant qu’il lui soit emboîté le pas, la sénatrice républicaine du Maine, Susan Collins, lui a encore plus coupé l’herbe sous le pied, si ce n’est fauché les chevilles. Voter pour cet individu malfaisant, dangereux, à la limite timbré, ce sera sans moi, conclut-elle. Elle a multiplié les qualificatifs franchement vindicatifs avant de le déclarer félon, traitre aux valeurs républicaines.

Par ailleurs, le succès d’une pétition en ligne sur Change.org, lancé par une élue démocrate, se confirme chaque jour : déjà, ce mardi soir, près de 35 000 signatures. Il s’agirait d’obtenir que Trump soit soumis à des tests psychologiques. Constatant que divers de ses membres, dont des professeurs, avaient déjà mis en doute les capacités mentales de Trump, l’association américaine de psychiatrie a enjoint ses membres de s’abstenir de se prononcer (en tout cas publiquement). Le narcissisme compulsif du candidat républicain ne semble pourtant faire aucun doute.

Trump, dans son discours de Détroit, s’en prend pratiquement au monde entier. Il promet une guerre économique à la Chine, veut renforcer la présence militaire en Asie… en passant la note au Japon, à la Corée du Sud, aux Philippines pour assurer leur sécurité. C’est la politique du « le Mexique paiera » la construction d’un mur frontalier, étendue, pour les pays européens, à un très important renforcement de la contribution à l’Otan avec compensation pour les États-Unis. Les accords de Paris sur le réchauffement climatique seront dénoncés, les mesures de protection de l’environnement nationales seront simplifiées ou annulées, les importations taxées davantage en contradiction d’accords ratifiés, et la croissance réduira d’elle-même la dette sans qu’il soit besoin de réduire les dépenses budgétaires qui pourront même être augmentées pour le profit de tous les Américains. Il n’y a plus guère que le Ku-Klux-Klan et divers groupes nazis à sortir du bois pour se prononcer pour Trump.

Et si cela peut lui valoir des soutiens financiers individuels, cela ne suffira pas. C’est pourquoi il sollicite à présent les plus importants donateurs républicains traditionnels. Certains ont déjà viré de bord et soutiennent la campagne d’Hillary Clinton ou se sont vertement prononcés contre Trump. Lequel devra mettre de sa poche au train où vont les choses. Il est certes milliardaire, mais il a déjà dû vendre des casinos ou des hôtels en catastrophe. A-t-il autant de répondant qu’il le prétend ? Le doute est permis.

Or, il reste quatre mois de campagne.

Steven Mnuchin est devenu le directeur des leveurs de fonds pour Trump. Son nom reste associé à celui de Bernard Madoff : il a bénéficié des escroqueries de ce dernier, a pu se dégager à temps, et n’a échappé que de peu à des poursuites judiciaires. Le camp Clinton conserve d’autres révélations à venir dans sa manche, qui pourraient forcer Trump à éviter tout face-à-face télévisuel non seulement avec Hillary Clinton mais avec les plus célèbres chroniqueurs. Ne plus apparaître que sur Fox News sans avoir à craindre le ridicule ou des questions vraiment très embarrassantes, c’est un immense handicap…