Si autrefois, nous nous devions de saluer le château en passant devant sous peine d’être mis au cachot, aujourd’hui nous ne pouvons que saluer la renaissance de cet édifice classé monument historique qui à bien failli passer aux oubliettes. 

 

 

 

L’atmosphère mystérieuse de st Saturnin.

  Non loin de la petite ville de la Canourgue en Lozère, au pied de l’impressionnant rocher des trois dents, le pittoresque village de st Saturnin peut désormais s’enorgueillir de ce qu’il a de plus beau, son château fort.

Au centre de ce hameau de pierres et d’ardoises qui voit passer autant de vaches que de voitures, il règne une atmosphère particulière. Il suffit de s’asseoir sur l’un de ses bancs, à l’ombre des tilleuls odorants, pour s’en rendre compte. Alors, dans le silence écrasant d’un après-midi d’été, peut être entendrez-vous ce que les murs du château ont à vous dire de plus secret. Peut être comprendrez-vous la douce mélodie de la source  qui coule depuis toujours, charriant l’histoire de cette forteresse ayant traversé les âges et qui aujourd’hui, renaît de ses ruines. La résurgence de Roquaizou, qui est  le plus vieux témoin de ce site historique, confiera à qui voudra l’entendre, dans un léger murmure, que c’est elle jadis qui faisait vivre les habitants en alimentant les moulins de la région.

 


L’état du château.

  Dans la grande et belle salle du château où trônent deux immenses cheminées, M. Vaysset, responsable des travaux de restauration, me dit du haut de son échafaudage, qu’il aura fallu huit années de travail pour arriver à ce résultat. C’est qu’il y avait beaucoup à faire dans cette forteresse du treizième siècle. Les quatre tours, dont le magnifique donjon, partie la plus ancienne de l’édifice,  ont été restaurées. L’architecture a été restituée à l’identique, et la toiture entièrement refaite. Il est vrai, qu’au-dessus de nos têtes, les charpentes massives sont neuves.

Pourtant, à bien y regarder, on comprend que cette construction moyenâgeuse a souffert. Les pierres délabrées de certains pans de mur qui portent encore les stigmates du passé laissent échapper leurs plaintes aigues au contact du vent.

« Mais la tour carré et la tour nord ouest sont emménagées », s’empresse de me dire M. Vaysset. Et il faut bien reconnaître que l’ensemble du bâtiment principal est en assez bon état.

Mais il n’en fut pas toujours ainsi !

 

Le dernier Seigneur du dix-neuvième siècle.   De comtes en comtes, de guerres en guerres, de pillages en pillages, le château en a vu de toutes les couleurs. Une habitante du village m’apprend que le dernier seigneur du dix-neuvième siècle ayant habité le château était le comte Casimir de Freissinet. Sa tombe se trouve dans le petit cimetière du village, tout contre l’église qui était autrefois la chapelle du château. On dit que le comte n’avait plus toute sa tête à la fin de sa vie. Il charriait des pierres sur le causse pour faire pénitence. Il gravait des inscriptions incohérentes sur les murs et avait même offert à une de ses servantes, une tunique portant une tête de mort. La pauvre servante en fut si malade qu’elle en mourut. Le comte termina sa vie dans un hôpital de Mende où on soignait ses dérives mentales. Avant de mourir, il légua le château à l’évêché.

Mais à qui appartient le château aujourd’hui ?

 

Les propriétaires du vingtième siècle.

  On m’apprend que l’ancien propriétaire habite à deux pas du village. C’est monsieur Agnel. Celui-ci me confirme que le château fut en sa possession  dans la seconde partie du vingtième siècle. Mais le château a d’abord appartenu à son grand père, M. Camille Samson dès 1906 qui le racheta à l’évêché de Mende pour la somme de 800 francs.

« Le château à été vandalisé à moult reprises », déclare M. Agnel. D’ après ce dernier, à l’époque, beaucoup de gens provoquaient la perte des châteaux en les pillant. Certains, pour des questions de jalousie ; Car ces nobles constructions représentaient la puissance et la richesse. D’autres pour s’enrichir tout simplement. Ainsi retrouve-t-on le linteau de la porte principale dans le château de la Caze, non loin d’ici. Quand au blason, c’est M. Samson qui le vendit pour 500 anciens francs à ce même château.

Mais il y eut plus grave. M. Agnel, prenant un ton plus solennel, me confit que le château détenait la plus belle et plus importante bibliothèque de toute la région. Malheureusement, les magnifiques manuscrits qui ornaient cette dernière furent entassés dans la cour et brûlés. Par qui et pourquoi ? M. Agnel n’en dira pas plus…

Il avouera cependant que le château était en déperdition bien qu’il tenta en vain de le rénover en 1975. Il acceptera de le vendre en 1995, à madame Feydeau, fille du comte de Laubespin. Ces derniers obtinrent la même année, de le faire classer au titre de monuments historique, et entreprirent les travaux de restauration qui le sauvèrent, quelques années plus tard, définitivement de la ruine. Ces nouveaux propriétaires qui réussirent ce tour de force grâce à leur passion pour le château de st Saturnin ne sont autres que les descendants de Béranger de Sabran-Montferrand, grand-père du célèbre pape Urbain V. Et n’oublions pas qu’ l’époque du pape, Grégoire de Grimoard de son vrai nom, les gens qui passaient devant le château étaient dans l’obligation de le saluer sous peine d’être emprisonné.

Alors, si vous passez dans le coin…

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