C’était dans l’air depuis des semaines : le groupe PSA Peugeot-Citroën entend fermer son usine d’assemblage d’Aulnay-sous-Bois et compte supprimer 8 000 emplois sur le territoire français. Inadmissible pour la classe politique ainsi que pour l’opinion publique, la fermeture du site est pourtant devenue inévitable à la vue de la situation de l’entreprise … et de ses choix contestables.

La nouvelle a fait l’effet d’une bombe : PSA veut supprimer 8 000 emplois sur le sol français. Un "tremblement de terre" comme l’a qualifié Arnaud Montebourg, le ministre du Redressement productif au journal de 20H de France 2, mais la secousse était attendue de longue date. Certes, celle-ci est tout de même plus violente que prévue, car le groupe PSA ne se contente pas de fermer le site d’Aulnay-sous-Bois. En effet, il annonce aussi 1 400 suppressions de postes sur son site de Rennes et 3 600 hors-production, c’est-à-dire dans les départements recherche & développement et direction des marques.

 

La direction tente d’apaiser la situation en n’opérant pas de licenciements secs, mais en privilégiant des départs "volontaires". Ce sera le cas des postes supprimés hors-production et de ceux qui voudront quitter le navire PSA sur le site de Rennes. A Aulnay, la solution passera par le reclassement de la moitié des salariés en CDI (1 500) sur le site de Poissy, où ils remplaceront les interimaires. L’autre moitié se verra proposer des emplois sur le site actuel d’Aulnay, dans des activités autres que l’assemblage automobile, ou pourraient être embauchés par des entreprises comme la SNCF, dont le patron, Guillaume Pépy a déclaré qu’il "y a tout un savoir-faire dans les usines automobiles que nous savons, nous, utiliser à la SNCF". 

 

La question qui vient à l’esprit est : ces suppressions de postes sont-elles nécessaires ? Les réponses sont bien sûr contradictoires.

Du côté syndical, on affirme qu’encore une fois, cette réduction de la voilure s’explique par une volonté d’augmenter les bénéfices et les dividendes pour les actionnaires. "Varin a déclaré la guerre aux salariés sur le terrain de l’emploi", a lancé Jean-Pierre Mercier, représentant CGT chez PSA, tout en affirmant la volonté des salariés de sauver leurs emplois et leur usine. Du côté du site de Rennes, on affrime que "rien ne justifie ces suppressions d’emplois au niveau du groupe qui dégage des bénéfices astronomiques.[…]On demande qu’aucun emploi ne soit supprimé. On a besoin de tout le monde, que ce soit les ingénieurs, les cadres, les techniciens et les OS », souligne à l’AFP Noël Alix, ouvrier de production, représentant CGT.

Du côté patronal, on conteste ces arguments pour invoquer les pertes financières : 700 millions au premier semestre dans l’activité automobile. Ainsi que la stabilité de l’entreprise qui nécessite de réduire la voilure, selon Philippe Varin, le président du directoire de PSA : "Nous avons la possibilité de mettre en oeuvre, dans les années qui viennent, les mesures indispensables au retour à l’équilibre financier mais ce délai n’est pas infini, il importe donc d’agir rapidement". Pour autant, il a refusé toute nouvelle aide financière de l’Etat, ce qu’il a résumé par cette formule lapidaire : "Mettre de l’argent dans le groupe n’est pas ce qui remplira nos usines".

 

Maintenant, étant devant le fait accompli, on serait tenté de se demander : Pourquoi ces suppressions de postes ? On l’a vu, la situation financière de PSA est loin d’être bonne, pour de nombreuses raisons.

La première tient au fait que PSA dépend trop du marché européen en repli ces dernières années. On prévoit ainsi une baisse des ventes de 7% pour 2012. Ainsi, PSA vend 60% de ses voitures sur le Vieux Continent, contre seulement 53% pour Renault. Conséquence : le repli des ventes est de 13,3% chez PSA, contre … 3% pour la marque au losange.

On peut aussi y voir une différence dans les coûts de production. En effet, PSA a conservé 43% de sa production sur le sol hexagonal, contre 27% pour Renault, qui a délocalisé rapidement dans des pays à bas coûts de production de l’Est de l’Europe. Or, par exemple, une 208 produite en Slovaquie coûte 700€ de moins que la même voiture fabriquée en France.

Est aussi incriminée la stratégie de montée en gamme risquée menée par PSA, à mi-chemin entre les low-cost Dacia et les voitures allemandes haut de gamme … mais sans le faible prix des premières et sans l’image de marque remarquable et la fiabilité des secondes. Enfin, on reproche à PSA son isolement, alors que Renault a fait le choix judicieux de s’allier à Nissan, pour former le 3ème groupe automobile mondial, ainsi que son attachement à l’Etat, qui a "colmaté" les bréches du navire Peugeot en injectant 4 milliards d’argent public dans le constructeur français durant le mandat du président Sarkozy, tout en offrant sur un plateau la rustine prime à la casse.

 

En somme, les mauvais choix stratégiques de la direction de PSA donnent en partie raison aux syndicats. Mais, pour autant, est-on au bout du chemin ou simplement au milieu du gué ? Malheureusement, on serait tenté de choisir la seconde solution. En effet, le site de Sevelnord (Nord) et ses 2 700 emplois, semble menacé depuis la fin du partenariat avec Fiat pour la production de véhicules utilitaires. De même pour le site de Rennes, où l’on fait miroiter des investissements dans la construction d’une nouvelle plate-forme d’assemblage d’ici 2016… De toute façon, pas d’inquiètude à avoir : si le site d’assemblage de Rennes ferme ses portes, il n’y aura encore QUE 4 200 emplois à supprimer !

 

Sources : Le Parisien, Le Figaro, Le Monde, Le Télégramme, Reuters.