Tout le monde a entendu parler du sondage Washington Post/ABC News qui annonçait une victoire de Hillary ou Obama sur McCain. Peu, en revanche, ont pris connaissance du sondage LA Times prédisant une victoire de McCain sur les deux candidats.
Encore moins de Français ont reçu les outils pour mesurer réellement les enjeux en cours. Nous vivons comme si le prochain président des Etats-Unis s'appelait déjà Barack Obama, et que rien ni personne ne pouvait inverser cette tendance. Au crédit de cette croyance, des chiffres flatteurs : une mobilisation massive de l'électorat et des levées de fonds records en faveur du candidat de l'Illinois. Mais ni l'argent ni la base partisane n'ont décidé d'une élection. Surtout, comme c'est le cas avec Barack Obama, si les chiffres cachent une vérité bien plus sombre, que personne ne rapporte. Procédons par étape.
1. Unifier le parti
Selon un sondage du centre de recherche Pew, 20% des électeurs blancs du parti démocrate affirment qu'ils voteront McCain si Obama remporte l'investiture ! C'est un exode massif, qui serait contenu à 10% si, à l'opposé, Hillary Clinton menait son parti en novembre. Qui a dit que Barack Obama assurait l'unité de son parti ? Cette défection se retrouve également dans les chiffres Post/ABC, qui montre que Hillary a plus de facilité à réunir ses troupes que son adversaire. Plus troublant encore, le sondage montre que le candidat le plus entouré par sa base (91%) est… John McCain.
2. L'Irak
Les Américains sont devenus optimistes sur l'Irak. 64% d'entre eux estiment que l'effort de guerre "va dans le bon sens", une moyenne exceptionnellement haute après cinq ans de conflit, et dans laquelle les indépendants sont décisifs (58% à être optimistes). Résultat : les arguments antiguerres si efficaces durant les législatives de 2006 ne pourront être utilisés à nouveau durant les élections à venir.
3. La personnalité des candidats
Aux Etats-Unis, la personnalité des candidats compte autant que leurs programmes. Interrogés sur les qualités de chaque figure, les Américains ont jugé Obama "charismatique et intelligent", Clinton "expérimentée et douée" et McCain "patriote et honnête". Au nombre des défauts, les Américains estiment qu'Obama "est inexpérimenté", Clinton "n'est pas fiable" et McCain "est vieux", des handicaps beaucoup plus importants pour les prétendants démocrates que pour leur adversaire.
4. L'économie
Le Président Bush l'a annoncé récemment : les Etats-Unis vont connaître une période de récession. Or autant Clinton qu'Obama annoncent des dépenses faramineuses (surtout Hillary) au profit d'un système santé universel. Il n'est pas certain que le contexte favorise cette offre. De plus, comme l'ont noté deux analystes, les sondages montrent la première percée républicaine depuis 1988 en… Californie, un Etat pourtant jugé acquis à la gauche. La raison en serait l'annonce de l'augmentation des impôts voulue par les deux candidats démocrates. D'autres Etats "bleus" seraient dans la balance pour 2008, particulièrement le New Jersey, l'Oregon, Washington ou le Connecticut.
Voilà, en quatre points, un panorama plus juste des défis qui attendent le parti démocrate avant les présidentielles de novembre. Les Européens ne devraient pas ignorer ces faits au risque de se tromper sur le résultat final, encore une fois.