Rangée au rayon des mauvais souvenirs, la crise politico-militaire qui a divisé la Côte d’Ivoire jusqu’en avril 2011 a laissé place à un dynamisme quasiment inégalé en Afrique. Depuis cinq ans, le gouvernement ivoirien multiplie en effet les réformes pour renforcer la stabilité du pays et faire émerger son économie à l’échelle mondiale.
Après une décennie de conflits meurtriers, la Côte d’Ivoire assiste depuis cinq ans à une véritable résurrection. Avec le taux de croissance le plus élevé du continent depuis 2012 (9,2 %), le pays de 24 millions d’habitants présente tous les signes d’un développement vertueux. Et ce, à l’intérieur comme à l’extérieur de la société ivoirienne. Tandis que le salaire moyen a quasiment doublé en quatre ans (de 36 000 à 60 000 FCFA), les investissements étrangers ont augmenté de 42 % entre 2012 et 2014. La Côte d’Ivoire est ainsi devenue l’économie la plus attractive de l’Afrique subsaharienne, selon le rapport 2015 Africa Prospects Indicators du cabinet d’études Nielsen.
Cette pôle position fait notamment suite aux multiples réformes engagées pour soutenir les entreprises ivoiriennes, comme le nouveau code des investissements, le guichet unique pour la création d’entreprises ou encore la plateforme d’échanges pour développer les affaires. Et avec les fluctuations des cours pétroliers, les inquiétudes à propos des pays fortement dépendants de leurs ressources fossiles ont dopé encore plus l’attractivité de la Côte d’Ivoire. Depuis 2012, l’outsider ivoirien a gagné 25 places dans le classement Doing business de la Banque mondiale (142e en 2016), loin devant le Nigéria (169e) et l’Angola (181e), qui ont subit de plein fouet l’effondrement du prix du baril.
Réformer pour émerger
Déterminé à hisser la Côte d’Ivoire parmi les 50 premières économies mondiales dans les cinq prochaines années, Alassane Ouattara, réélu à la présidence du pays en 2015, a su mobiliser des moyens à la hauteur de ses ambitions. En mai 2016, il a obtenu à Paris la promesse de près de 30 milliards d’euros d’investissements en provenance de fonds publics et privés étrangers. Au total, le président ivoirien prévoit un financement de 45 milliards d’euros pour son Programme national de développement (PND), qui vise à changer en profondeur les structures du pays d’ici 2020.
Le 30 octobre constituera à ce titre une étape cruciale dans le projet gouvernemental, puisque les Ivoiriens seront invités à s’exprimer sur le projet de réforme constitutionnelle. Le futur texte prévoit plusieurs nouveautés, avec en premier lieu la création d’un poste de vice-président dans un premier temps désigné par Alassane Ouattara, puis élu au suffrage universel en même temps que le président à partir de 2020. Son rôle de remplaçant en cas d’absence prolongée ou de décès est présenté comme gage de stabilité, à l’image des transitions apaisées qu’ont connues le Nigéria en 2010 et le Ghana en 2012 suite à la mort de leurs présidents respectifs.
Ceux qui, dans l’opposition, y voient plutôt une manœuvre d’Alassane Ouattara pour placer son successeur, protestent également contre la proposition de création d’un Sénat, élu aux deux-tiers par le peuple mais complété au bon vouloir du président. Autre nouveauté, très bien accueillie : l’assouplissement des conditions liées aux origines des candidats. Plus aucune exigence d’une « ivoirité » qui remonte à plusieurs générations ; seulement celle d’être de nationalité ivoirienne, peu importe que le candidat ait un ou plusieurs ascendants étrangers.
L’électricité ivoirienne dépoussiérée
En marge du dossier constitutionnel, la Côte d’Ivoire s’est également attaquée depuis plusieurs années au chantier de l’électrification rurale, axe majeur du PND. Avec un taux de couverture électrique de 33,4 % et un accès à l’électricité de 74 %, l’objectif de raccorder 100 % du territoire en 2025 semble encore un brin lointain. Mais là aussi, le plan de marche est clair et ambitieux : relier 500 nouvelles communes à l’électricité chaque année, malgré un nombre de procédures plus élevé que la moyenne de l’Afrique subsaharienne (huit contre cinq).
Grâce aux milliards levés à l’étranger, le pays multiplie ainsi les projets de barrages hydroélectrique et de centrales à gaz afin de doubler sa capacité électrique d’ici 2020 et atteindre une production énergétique de 4,5 GW. Le développement du réseau électrique s’accompagne également d’une modernisation du secteur électrique, monopolisé depuis plus d’un quart de siècle par la Compagnie ivoirienne d’électricité (CIE). Le 12 octobre, le conseil des ministres ivoiriens a voté six décrets visant à libéraliser le marché et à ouvrir la quasi-totalité de ses segments d’activité sous la supervision de la nouvelle Autorité nationale de régulation de l’électricité de Côte d’Ivoire (Anaré-Ci).
Pour assurer un niveau de service à la fois fiable et durable, l’État mise également sur la diversification du mix énergétique avec la création d’un groupe de députés en charge des Actions parlementaires pour les énergies renouvelables (APER). Ils auront notamment pour mission de rendre l’énergie solaire plus accessible dans les zones encore privées d’électricité, notamment en réduisant les coûts d’installation de structures photovoltaïques. Autant de mesures qui entendent faire connaître le premier producteur mondial de cacao pour ce qu’il est : un pays aux précieux atouts naturels et à l’énergie débordante.