Nucléaire : les Français en ont peur !

Selon une consultation en ligne du Parisien-Aujourd’hui en France, les Françaises et les Français sont majoritairement inquiets : les centrales nucléaires ne sont pas sûres. Alors que Dominique Minière (EDF) tente de rassurer l’opinion après l’intrusion de Greenpeace à la centrale de Nogent, Le Parisien a titré fort justement « Nucléaire : Greenpeace parvient à remettre en cause la sécurité des centrales » tandis que Nicolas Sarkozy critiquait l’opération.

Les pourcentages peuvent varier, et à 07:00, l’échantillon de la consultation en ligne du ParisienAujourd’hui en France n’atteignait pas encore 1 200 répondants. Mais il est néanmoins assez significatif car plus de 67 % d’entre eux considéraient que les centrales nucléaires français n’étaient pas sûres.

Effectivement, nous sommes peu rassurés. EDF assure que « les équipes de surveillance avaient tout de suite compris qu’ils avaient affaire à des "militants pacifiques" et non armés. ». Bien, et si ce n’avait pas été le cas ?
C’est quoi, une arme capable de faire des dégâts dans une centrale ? Un char d’assaut ?

Et la prochaine fois, si un petit avion de tourisme, en perdition, s’aventure au-dessus d’une centrale nucléaire, la DCA tirera à vue ? Ou sera-t-il, si la radio de l’appareil est aussi en panne, décidé que le pilote est un militant pacifique et non armé ?

Dans son édition du 30 novembre, Le Canard enchaîné consacrait un « portrait » à Luc Oursel, d’Areva, surnommé le « kung fou du roi ». Celui de « Sarkotomic », le très rassurant et protecteur Nicolas Sarkozy qui a critiqué Greeneace pour son initiative. Il avait sans doute obtenu le feu vert de Besson, ministre de l’Industrie, ou de Baroin, pour annoncer qu’Areva allait liquider 1 200 emplois, mais Besson, selon Le Canard enchaîné, s’est ravisé. Certes pas en raison des questions de sécurité…

Il n’aurait fallu qu’un quart d’heure aux militants de Greenpeace pour pénétrer dans la centrale.

Réactivité radioactive

La seule victime, pour le moment, c’est Maxime Buizard, un militant de l’UMP d’Orléans qui avait estimé, sur Twitter, que « la gendarmerie aurait dû abattre les terroristes de Greenpeace… ». Oh, comme ce n’est pas tout à fait un appel au meurtre, le Garde des Sceaux n’a pas activé le parquet. Buizard retrouvera ses fonctions au sein des Jeunes populaires, et on se contentera de ses excuses. Mais il est aussi révélateur, peut-être, que le sondage du Parisien : « Sarkozy, je te vois… » (rappelons qu’un tel placard avait valu des poursuites judiciaires à un manifestant tout aussi pacifique, non armé…). Mais bon, péché véniel de jeunesse…

Pour Greenpeace, 58 réacteurs, c’est 58 points de vulnérabilité. On peut ajouter des sites de traitement ou retraitement des déchets nucléaires. Mais ce sont bien sûr, pour Nicolas Sarkozy, les antinucléaires qui sont des « irresponsables ». Un peu comme ceux qui doutent que les mesures prises par Merkozy sont réellement susceptibles de rassurer les marchés.

À Cruas, on peut déposer un gros sac contenant deux personnes « aux abords immédiats de la clôture » du site. Combien de temps a-t-il fallu pour se rendre compte qu’ils avaient aussi découpé un grillage ? Il faudra en tout cas, alors que l’on sait qu’à Nogent il s’est produit un incident, jusqu’à 14 heures pour localiser les deux intrus. Rassurant. On imagine qu’en cas d’incident, la Défense civile est prévenue par pigeons voyageurs… En tout cas, quelle réactivité !

Pipotage

L’espiègle sarkoboy Christian Estrosi, le failli de Suzuki, s’était esclaffé : « ce sont des pitreries, on ne braque pas une banque en entrant dans son hall… ». Sans doute plus habitué des tribunaux de commerce que des assises, Christian Estrosi ne doit sans pas non plus se rendre dans des banques, ce sont les banquiers qui viennent à lui… Les clients des banques ayant été pris en otages s’en souviendront sans doute.

Guéant a le culot d’affirmer : « toutes les recommandations de l’autorité de sûreté seront prises en compte dans l’adaptation des centrales… ». Il ne doit pas lire la presse. Même l’EPR, en construction, n’est pas conforme aux recommandations. Alors les anciennes centrales… Il ne se passe pas un trimestre sans que la fameuse autorité récrimine, considère qu’il n’a pas été tenu compte de ses avis.

Mais effectivement, l’alarme a fonctionné dès 06:32, lundi dernier, sur le site de Caradache. Les militants de Greenpeace ne sont pas des Jack Bauer… Parfois, ils se font repérer.

Tout cela laisse franchement songeur.

À 07:42, ce mardi matin, la consultation du Parisien atteignait les 1 200 répondants. Avec un pourcentage de 66,7 de dubitatifs (contre 33,3 % de personnes estimant que les centrales nucléaires françaises sont sûres). Un tiers. C’est à peu près le nombre des personnes satisfaites de Sarkozy, enfin, les grands mois. Les mêmes ? On dirait qu’ils ont été rameutés. Vers 16:30 ce jour, sur plus de 3 300 répondants (ou votants), le pourcentage fléchissait vers les 65 %.
Mais les commentaires sont intéressants, genre « 
à en croire les ingénieurs d’EDF en retraite, la gestion du risque lié au fonctionnement est très, très limite, les incidents techniques sont courants, les sueurs froides et les sommeils difficiles des agents en témoignent, les affaires restent internes mais le risques liés aux centrales est plus que réel. ».
Mais il y a aussi ceux qui bottent en touche, qui mettent en cause le financement de Greenpeace. Ou qui reprennent des argumentaires de l’UMP, avec des variantes.
Tiens au fait, rendez-vous le 20 janvier, pour le procès des militants. Et vous savez pourquoi certains seront poursuivis ? Cinq ont refusé de se soumettre au prélèvement d’ADN.
Bon, sang, mais c’est bien sûr : qui viole une centrale viole un enfant !

Auteur/autrice : Jef Tombeur

Longtemps "jack of all trades", toujours grand voyageur. Réside principalement à Paris (Xe), fréquemment ailleurs (à présent, en Europe seulement). A pratiqué le journalisme plus de sept lustres (toutes périodicités, tous postes en presse écrite), la traduction (ang.>fr. ; presse, littérature, docs techs), le transport routier (intl. et France), l'enseignement (typo, PAO, journalisme)... Congru en typo, féru d'orthotypographie. Blague favorite : – et on t'a dit que c'était drôle ? Eh bien, on t'aura menti !

5 réflexions sur « Nucléaire : les Français en ont peur ! »

  1. [u]info complémentaire[/u]
    [b]- ou souvenir passé d’un à_venir présent[/b]

    [url]http://www.gilblog.fr/vu_sur_le_web/nouvelles-de-fukushima.html[/url]

    (voir aussi les feuilles de RUI on this subject)

    ô bout l’eau…

    le ti poulpe entre deux eaux

  2. Bien trouvé, le titre de[i] La Tribune[/i] :
    « Sécurité nucléaire : la preuve par le toit

    « [i]Des militants de Greenpeace sont parvenus à atteindre le dôme de l’un des réacteurs de la centrale de Nogent-sur-Seine pour y déployer une banderole[/i] « Le nucléaire sûr n’existe pas ». »

  3. [b][i] »Des militants de Greenpeace sont parvenus à atteindre le dôme de l’un des réacteurs de la centrale de Nogent-sur-Seine pour y déployer une banderole »[/i]
    Compte tenu du recrutement du personnel qui surveille les centrales et de leur encadrement, aucun étonnement de ma part![/b]

  4. Qui prend les sondage au sérieux n’est pas sérieux

    Qui utilise « Les Français » ou « Les Allemands » ou « Les Parisiens » ou « Les X »
    donc qui globalise ou « unanimise » n’est pas sérieux non plus

    Sachons résister à ces conditionnements subtils

  5. Oui, Danièle. Cette utilisation est effectivement une « facilité journalistique » (très difficile de titrer autrement).
    Par ailleurs, je me méfie comme vous des sondages.
    Cela étant, cette consultation reflète une réalité : le discours d’un Allègre, pour qui, au Japon, il n’y a pas eu de « catastrophe nucléaire » passe de moins en moins et les infos sur les centrales françaises, pour lesquelles les incidents récurrents sont toujours officiellement minimisés, sont à mon sens davantage mises en doute que par le passé.

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