Banksters : les vieux paieront !

Si cela sort au Royaume-Uni, cela risque très fort d’arriver sur le continent :  la NHFA, filiale de la banque HSBC, fourguait des placements pourris à des seniors. Âge moyen des investisseurs, environ 83 ans. Les plus âgés avaient 94 ans. Et des associations charitables, telles Help the Aged ou la Royal British Legion (anciens combattants), prêtaient leur concours pour conseiller de vendre la maison familiale et tout placer chez HSBC.

Question placements risqués, le Royaume-Uni en connaissait déjà quelques uns, comme ceux fondés sur les calculs d’actuaires en assurances. Cela revient à parier sur la mort, celles d’assurés de telle ou telle compagnie. Plus les assurés meurent vite, meilleur est le rapport. À l’inverse, s’ils vivent un peu trop longtemps, le rendement baisse…

Un investissement très risqué, proposé par divers courtiers ou banquiers britanniques, que la Banque d’Angleterre a vraiment très fortement déconseillé, sans l’interdire toutefois. Et comme d’habitude, un « peu » sur le tard, quand les dégâts étaient déjà forts.

Mais, là, cette fois, la Financial Services Authority (l’équivalent de l’autorité française des marchés financiers, AMF) a carrément vu rouge.

HSBC se voit infliger une amende de 10,5 millions de livres et la banque est enjointe de rembourser 29,3 millions à des personnes, pour la plupart, très âgées.

C’est la Nursing Home Fees Agency (NHFA), filiale à part entière d’HSBC depuis 2005, qui faisait le tour des popotes, des maisons de retraites, pour trouver des gogos, révèle le Daily Mail. Pire, des charities, des associations caritatives, comme Help the Aged ou la Royal British Legion, jouaient les rabatteuses, contre commissions.

Des retraités étaient incités à vendre leurs véhicules ou habitations afin de placer tout ou presque dans des plans d’investissement pourris. HSBC visait en priorité le quatrième âge (les 80, 90 ans et davantage).
2 485 gogos, des papis et des mamies, s’y sont laissé prendre, fournissant chacun une moyenne de 115 000 livres (plus de 134 000 euros), soit le bas de laine de toute une vie.

Bien sûr, on leur promettait un rendement mensuel au-dessus des loyers des maisons de retraite, et de quoi nantir des petits-enfants, s’ils en avaient.

Le hic, c’est qu’il s’agissait de placements bloqués à cinq ou six ans ou davantage. L’os, c’était que les commissions (soit le « chargement » en termes d’assurance) des contrats, était vraiment très copieux. Près de 5 800 livres pour un contrat de 137 000. À la signature, 5 % du montant. Plus de mille chaque année ensuite (pendant toute la durée du contrat), soit un pour cent. Certains y aillaient vraiment fort. Ils ne laissaient aux retraités qu’un an de liquidités pour payer leur maison de retraite. Ensuite, s’ils n’étaient pas morts dans l’année, ils devaient régler des amendes pour retirer partie des fonds ainsi placés. S’ils décédaient avant terme, les héritiers devaient se substituer. S’ils n’avaient pas d’héritiers, eh bien… En général, estime le Daily Mail, les charitables « conseillers financiers » pouvaient se faire 11 500 livres par contrat. Comme la maison mère prenait aussi sa part, les retraités perdaient en moyenne 11 790 livres par contrat.

Le système a perduré jusqu’en juillet dernier, quand la FSA est intervenue. Elle a aussi infligé des sanctions à Barclays, qui avait aussi concocté des produits financiers pour le quatrième âge. Évidemment, le scandale ayant éclaté, HSBC s’est empressée de déclarer que sa main droite ignorait ce que faisait sa main gauche, sa filiale, radiée depuis juillet dernier. Sur le site de la NHFA, HSBC se garde de bien d’expliquer pourquoi elle a renoncé à poursuivre ces juteuses activités.

Seule info pour les victimes : « Si vous êtes un client de la NHFA, une lettre vous sera envoyée rapidement pour vous fournir de plus amples informations… ».

 

La NHFA plaçait des publirédactionnels sur de nombreux sites, la plupart peuvent encore être consultés. Comme par exemple sur le site de Dementia and Alzheimers Resources. Ou Patient.co.uk. On lisait le témoignage d’une certaine Diana Roberts, aux accents compassionnels. Sur le site de la British Legion, on trouve encore ce jour le téléphone (en 0800 évidemment) de la NHFA, avec un lien vers son site. De nombreux sites de maisons de retraite conseillaient, de facto, de contacter la NHFA (ou la référençaient en bonne place).

Le Financial Times n’en a pas moins, sous la plume de Jonathan Guthrie, des mots très durs pour l’autorité des marchés britanniques, la FSA. Selon lui, Sherlock Holmes aurait senti le « loup » avant même de se pencher sur un mégot « de la scène du crime ». « Nos chères vieilles dames sont comme un appât pour les vendeurs », poursuit-il. Mais la FSA n’avait rien vu, rien entendu, avant qu’un audit de la HSBC lui soit communiqué.

On se demande bien ce que feraient, en France, les quotidiens régionaux appartenant au Crédit mutuel si de telles informations venaient à être divulguées. La solidarité des banquiers est bien connue…

P.-S – pour les médialogues : l’article d’Harry Wilson, du Telegraph, sur le « mis-selling » d’HSBC était, sur le site du quotidien, surmonté d’une publicité « ciblée » d’HSBC pour les expatriés. Living and working abroad ? The Expat Guide… Click Here. Et pourquoi pas, « pour votre retraite à l’étranger… profitez à fond de nos opportunités » ? En France, on a déjà vu le Crédit mutuel retirer sa publicité et ses abonnements aux Échos (quotidien financier) parce qu’un article avait déplu… Nous en avions fait état sur Come4News.

 

 

Auteur/autrice : Jef Tombeur

Longtemps "jack of all trades", toujours grand voyageur. Réside principalement à Paris (Xe), fréquemment ailleurs (à présent, en Europe seulement). A pratiqué le journalisme plus de sept lustres (toutes périodicités, tous postes en presse écrite), la traduction (ang.>fr. ; presse, littérature, docs techs), le transport routier (intl. et France), l'enseignement (typo, PAO, journalisme)... Congru en typo, féru d'orthotypographie. Blague favorite : – et on t'a dit que c'était drôle ? Eh bien, on t'aura menti !

3 réflexions sur « Banksters : les vieux paieront ! »

  1. Et si on condamnait Nicole Garcia qui s’est fait payer ( certainement un bon prix) pour la publicité en faveur de cette banque ?

  2. Article genialissime! L e R-U à l’avant garde sur tout, meme dans l’escroquerie de ses vieux! Parions que cette avancée sera introduite en France avant 10 ans

  3. [b]Là nous sommes dans l’indignité, ces banques devraient subir une purge, que dis-je des saignement pour vider leurs humeurs nauséabondes et que les 10 revenus les plus élevés soit placés en garde à vue pour malhonnêteté et inhumanité avec mise sous séquestre de tous leurs avoirs ainsi que ceux de leurs collatéraux mêmes les plus lointains.[/b]

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