Les Sentiers de la Gloire : Kubrick instaure le devoir de mémoire

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Contrairement aux idées reçues, les Sentiers de la Gloire n'ont pas été "censurés officiellement". Le long métrage est sorti le 25 décembre 1957 et en France le 26 mars 1975.

Longtemps catalogué antimiltariste, Stanley Kubrick nous délivre un pamphlet résonnant contre l'instrumentalisation de la guerre, tombant dans l'horreur la plus profonde, sur fond d'injustice martiale.

Une oeuvre majeure dans l'univers de Kubrick, le visage bestial de l'humanité explose sur le grand écran.

Paths of Glory…le best seller d'Humphrey Cobb, revu et corrigé par le maitre, qui s'est largement inspiré de l'affaire des "Caporaux de Souain'".

D'une discussion entre deux généraux "carrièristes", la trame se lance. Le général Brouilard incitant insideusement le général Mireau, a prendre d'assaut la "fourmilière", une position allemande quasi-imprenable, l'ambition primaire dictant le débat. Mireau ordonne au colonel Dax et du 701éme régiment d'attaquer la position. Un véritable déluge de plomb attend les courageux soldats…le général Mireau ordonnant aux batteries françaises…de bombarder ses propres hommes…Dax dans l'incapacité de mener à bien ce projet…se replie avec les survivants…

Mireau ordonne un conseil de guerre, pour le 701éme régiment, coupable de lacheté envers l'ennemi. Trois hommes seront tirés au sort…fusillés…pour donner l'exemple. Dax contre attaque, et dénonce au général Broulard, le bombardement, celui ci s'empresse de destituer Mireau..offrant le poste au colonel Dax, persuadé que cette démarche n'avait que vocation…d'ambition personnelle.

Les faits sont réels, 2500 soldats français furent condamnés…600 fusillés pour servir d'exemple. Les exactions de ces généraux, avides de gloire…."carrièriste à l'extrême, ne méritent-elles pas un devoir de mémoire…

 La mise en scène maitrisé, les longs travellings parcourant les tranchées…et pour ceux qui n'ont pas vu ce chef d'oeuvre, un épilogue d'une intensité émotionnelle, nous clouant littérallement sur le fauteuil. La juxtaposition des scènes finales..le sinistre peloton d'éxécution…la mort qui arrive. Dans un bistrot, les soldats français se libérant, en poussant la chansonnette, avec une prisonnière allemande nous plonge dans une émotion palpable. L'actrice incarnant cettte chanteuse…Christine, la future Madame Kubrick, ce qui ajoute une intensivité au drame.

La face obscure de la classe dirigeante de l'Armée Française…Entre gloire conduisant aux pires exactions et l'absurdité de la guerre. Le génie dévastateur de Stanley Kubrick…bien avant Full Metal Jacket. Sans doute également, une des plus belle prestation de Kirk Douglas.

Le New-York Times Magazine du 12 octobre 1958 , Stanley Kubrick nous confie :

Le soldat est fascinant parce que toutes les circonstances qui l'entourent sont chargéers d'une sorte d'hystérie. Malgré toute son horreur la guerre est le drame à l'état pur car elle est une des rares situations ou des hommes peuvent se lever et parler pour des principes qu'ils pensent leurs. Le criminel et le soldat ont au moins cette vertu d'être pour ou contre quelque chose dans un monde ou tant de gens ont appris a accepter une grise nullité, a affecter une gamme mensongère déposée afin qu'on les juge normaux…Il est difficile de dire qui est pris dans la plus vaste conspiration : le criminel, le soldat…ou bien nous."

 UIn long métrage qui devrait être diffusé dans les lycées…L'instrumentalisation de la guerre mérite le devoir de mémoire.pfilm36001880666355.jpg