Jacques sur les chemins, et Chantal Bauwens sur le web

Je dois dire qu’en ce moment, niveau lecture, je me régale, et me dénoue, si besoin était, les zygomatiques….
Après l’histoire des amours de Jacques, le Fataliste, de son maître et de leurs rencontres, des aventures conjugales, extras, et extra-conjugales, ou les deux, à tour de rôle ou en même temps, de quiproquos, des illusions, des histoires qu’on leur raconte au fil des auberges… (Ce livre est un régal d’humour et de vocabulaire),
j’ai souri et plus encore en lisant l’histoire des aventures de la quinqua à la recherche de l’amour, ou du moins de ce qui peut s’en approcher, sur les sites de rencontres… Des rencontres, elle en fit, cette Chantal Bauwens ! Elle a son parler franc (parfois cru) pour rafraichir et réfléchir sur les illusions et désillusions des rencontres virtuels, plus directes, plus rapides que dans le réel, mais au final, toujours les mêmes constatations…. Messieurs, enfin ! Un peu de tenue !
 
Des siècles d’écarts, mais au final, toujours les mêmes besoins, désirs, excès,… et toujours les mêmes solitude et ennui, le couple maudit, que l’on essaie de distraire avec ce qu’on a sous la main, ce qui passe à portée, ce qui ne fait pas de chichis, et qui unilatéralement, recherche la même chose.

Et finalement, si ces sites de rencontres n’étaient qu’une façon d’avoir l’impression de faire encore partie de la société ?
C’est aussi une façon d’avoir des messages dans sa boite aux lettres. Qu’est-ce qu’il y a de pire que de rentrer chez soi, où s’annonce une soirée sans paroles, juste Julien Lepers (heureusement très bavard) ? Avant de tourner la clé de la maison, on ouvre la boite aux lettres bien réelle, s’il n’y a pas de factures, si vous avez affiché le slogan "pas de publicités", si vous n’ètes abonné par manque de moyen et de besoin à aucun magazine, cette boite sera le plus souvent vide ! V.I.D.E. de là à considérer sa vie vide… c’est une pensée qui effleure…
Après la clé tournée dans la porte, le sac et le manteau posés, l’ordinateur allumé, on espère encore dans un mot, un clin d’œil dans la (ou les) boite aux lettres virtuelle…
Même si on déteste les diaporamas qui, quand on est en manque de dialogue, sont déjà bien décevant, n’avoir rien, nada, que dalle à lire dans cette boite, c’est une nouvelle gifle, une nouvelle confirmation de solitude. Même pas une pub !!!. Un nouveau V.I.D.E.
Pire encore, quand on a pris un peu de temps, à midi, ou la veille au soir, pour envoyer quelques messages sympathiques… A se demander si l’hébergeur n’est pas en grève, si la live box est branchée, si notre adresse mail n’est pas bloquée… 
 
Alors pourquoi pas s’inscrire, même pour rire, surtout pour rire et se distraire, sur ses sites de rencontres ? Inconvénient pour les fauchés, c’est payant pour pouvoir échanger, même des bétises…  Inconvénient aussi pour les fauchés, ou les fins de mois difficile, pour sortir il faut débourser. Les hommes veulent des retours sur investissement (selon Chantal Bauwens); les rencontres réelles ont un coût: essence, restaurant, entrées de cinéma ou de boites de nuit… Les femmes craignent de tomber sur un obsédé (il y en !). Les deux craignent encore une déception lors de la rencontre réelle, physique, taille, poids, mensonge sur l’âge, déception de la conversation en comparaison aux échanges écrits…
 
On peut toujours se payer l’inscription et rester dans les conservations virtuelles, passer d’un Gentil Internaute (ou d’une Gentille Internaute) à un autre. Le risque est de finir par se faire remarquer. (c’est là que les habitants des grandes villes ont quelques avantages par rapport aux zones dépeuplées: en Province, on risque d’être vite reconnu…). On peut toujours blablater à n’en plus finir, laisser mijoter histoire de s’occuper et d’avoir un courriel sous le clavier, un signe de vie,…
Mais pourquoi diable cette dame Chantal a-t-elle laissé son livre se titrer "Maman drague sur le net" ? Elle voulait d’office ne pas vendre son livre ?  Il n’est pas le livre des lamentations d’une fille que la mère délaisserait pour surfer; sa fille, il n’en est question que trois lignes dans le livre.  "Quinqua cherche homme parfait sur le net" aurait été plus en adéquation…. 😉
  
Rompre la solitude de cette façon ?  attention danger, âmes sensibles s’abstenir, cœurs d’artichaut s’abstenir, grenouilles de bénitiers se boucher les oreilles (enfin, fermer les yeux puisque nous sommes dans le domaine de l’écrit),…  En un mot: prudence tout de même !
Prudence quand on arrive à la cinquantaine, après 20 années familiales et bien rangées, la sortie du cocon peut être stupéfiante !
Ce livre à prendre pour ce qu’il est, pas une œuvre littéraire, mais un témoignage pris sur le vif, est un réel amusement. A souhaiter que des hommes prennent le temps de le lire… (mais oui, elle doit un peu exagérer, ou vraiment, cette dame, n’est pas douée pour sélectionner le compagnon idéal)…

 

Chantal Bauwens, "Maman drague sur le net", témoignage vécu, chez "Les éditions de l’arbre" (les aventures drôles et piquantes d’une quinqua à la recherche de l’amour" – 2010

 

Denis Diderot, "Jacques le fataliste" – édition Le livre de Poche – (illustration de René Lelong, pour Jacques le Fataliste) – première version en 1771…

 

 

2 réflexions sur « Jacques sur les chemins, et Chantal Bauwens sur le web »

  1. Merci pour votre article. Pour le titre, je suis d’accord avec vous mais ce fut le choix de l’éditeur, pas le mien. La première mouture s’appelait : « Chasse@Coeurs ». Si vous souhaitez un exemplaire du premier livre pour vos archives (rires)…
    CB

  2. Merci de votre passage sous mon humble article et surtout d’avoir pris le temps d’y mettre un mot; ça me fait très plaisir
    je me suis beaucoup régalée avec votre livre !
    Chasse@coeurs, ça sonnait bien ;);)
    bonne continuation en tout 😉

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