J.-0. de Londres : budget explosé

Heureux, Julien Laurens, du Parisien, de titrer « JO 2012 : Londres est quasiment prêt ». Ravi, Boris Johnson, « maire » de Londres, d’aller faire fondre au Forum de Davos une statue symbolique des Jeux en eau de la Tamise congelée. Beaucoup moins béats, les Britanniques, surtout ceux que les sports indiffèrent, de constater que, comme prévisible, le budget initial est explosé, que les investissements et coûts induits sont déjà dix fois plus lourds de prévus… pour un incertain bénéfice.

Rien n’est jamais trop beau pour des JO et c’est à grand frais, à double titre, que Boris Johnson a fait acheminer au Forum mondial économique de Davos une statue de glace symbolisant Londres et ses Jeux. Mais, hormis pour le beach-ball féminin (disputé en tenues affriolantes, on ne peut dire que les places s’arrachent pour assister aux Jeux Olympiques. Déjà, s’y rendre coûtera fort cher (les tarifs des transports ou des parcs de stationnement sont faramineux), et loger à ou près de Londres coûtera fort cher (surtout si on a réservé une chambre fictive auprès d’escrocs). Les recettes seront, compte tenu aussi du renchérissement de la livre, qui peut dissuader, sans doute inférieures aux prévisions…

Dix fois la mise

Les projections, en 2005, étaient de 2,37 milliards de livres. À l’arrivée, c’est plus de dix fois pire, avec une première estimation révisée en 2007 (9,3 Mds £), et à présent plus de 24 milliards (soit près de 29 milliards d’euros).

Cela, pour du matériel flambant neuf, qu’il faudra ensuite entretenir, rentabiliser, ou… détruire.
Le Parisien est admiratif. Rien que pour « l’écrin » du stade olympique circulaire (80 000 places), c’est déjà près de 0,59 milliard d’euros. Et combien d’euros, avec le change, pour s’y rendre ? Et donc voir de loin la fameuse tour d’acier d’Anish Kappor (120 m de hauteur, à 0,2 million du mètre, soit 23 M€) ? Penser aussi à confectionner des en-cas en sur le continent, à dissimuler à l’entrée des stades. Le Parisien est en extase : 3 700 m² pour la « boutique » des produits dérivés (à 23 livres la mascotte, et elles sont deux). Il va falloir remplir les 4 000 poubelles du site…

Les policiers anglais se plaignent d’être en sous-effectif. Qu’à cela ne tienne, on emploiera des vigiles (600 M£, plus 271 pour la sécurité générale). Sky Sports estime que le coût global pourrait atteindre, clefs en mains, jusqu’à 29 milliards d’euros. Et puis, il y a eu des coûts supplémentaires imprévus. Transport for London a baladé 30 000 employés sur le site et les conducteurs des métros se sont vus accorder 500 livres de primes (ils sont 13 000). Les fortes hausses des transports à Londres sont intervenus avant que les conducteurs menacent de se mettre en grève. Du coup, sur le Docklands Light Railways, il y aura peut-être une nouvelle augmentation tarifaire. Car, pour ses employés, ce sera un bonus de 2 500 £. Allez, si vous résidez à l’opposé, dans le Grand Londres, comptez 7,30 livres l’aller-simple.

« Tout n’est pas rose » : c’est la fameuse litote d’Amyas Morse, le contrôleur de gestion, adepte de l’understatement radical. « Il y a un risque réel qu’une rallonge soit nécessaire, » a-t-il poursuivi. Boris Johnson s’inscrit bien sûr en faux.

De la pierre… précieuse

Les villes britanniques vont dépenser aussi pour l’acheminent de la torche olympique et ont été incitées à « s’offrir » des entrées, pour un total de 407 102 £. Les risques sont pour les contribuables, les gains pour le Comité olympique et quelques (très, nombreux) bénéficiaires.
Dont le sculpteur Richard Harris, qui a déniché des « Jurassic Stones », des blocs de pierre, qu’il fait disposer sur piédestaux d’environ quatre mètres de hauteur. Seize.
Coût unitaire : près de vingt-et-un mille livres. Total : 335 400. Plus de 400 000 euros. Au moins ne seront-elles pas onéreux à entretenir, contrairement à d’autres œuvres d’art tel le Torchlike Chandelier qui deviendra très vite crasseux. Lord (Sebastien) Coe, le responsable britannique des Jeux, était, lui aussi, extatique, à Davos. Il a peut-être distribué des entrées gratuites à des personnalités : le contribuable payera mais pourra les voir dans les tribunes d’honneur, à la jumelle. 

Des JO Creosote

Ces Jeux ont remémoré à Robert Hardman, du Daily Mail, l’imposante figure du dîneur Creosote dans le sketch du restaurant des Monty Python (The Meaning of Life, Le Sens de la vie). Déjà formidablement gras et volumineux, il se gave tant qu’il finit par exploser et répandre ses tripes sur la table, la moquette, les murs. C’en était au point que le Locog, le London Organising Committee, avait un temps songé à faire payer les entrées aux enfants en bas âge, et même aux nouveaux-nés conçus avant d’avoir acheté les tickets. Bien sûr, leur place réservée aurait été sans doute loin de celles des parents. Cette mesure devrait être révisée. Mais pour les plus de quatre ans, ce sera le demi-tarif (pas pour autant réduit de moitié, mais moins cher que celui des adultes).

 

Cela étant, il y aura des revenus provenant des parrainages. Par exemple celui de Dow Chemical (responsable de la catastrophe de Bhopal, en Inde).

Soyez sûr que la contribution de Dow Chemical sera retrouvera compensée par des hausses tarifaires qui, que vous alliez ou non assister aux JO, vous seront répercutées (plus TVA).

 

Note d’optimisme cependant, pour qui aime la musique pop. Les Spice Girls pourraient se reformer pour les Jeux. Tout cela pour ça ? Geri Harlliwell et Mel sont pour. Victoria Beckham hésite.

Ah, G4S, chargée de la sécurité, a reçu plus de trois candidatures pour chaque poste de vigile.

En sus, il y aura 3 000 bénévoles. Et 13 500 militaires (seulement 10 000 en Afghanistan pour le Royaume-Uni). Eux ne devront pas payer l’équivalent de deux heures de travail pour se rendre sur place. Mais il faut bien cela.

En cas d’attentat ou d’accident un peu trop meurtrier, les primes d’assurance d’un peu tout le monde grimperaient. Ah, le rêve olympique. Les Grecs en ont encore le regard qui brille… Des étoiles de l’Europe plein les yeux…

Merci, disent les Grecs, à David Cameron, de nous faire encore vibrer avec l’hymne olympique !

 

Auteur/autrice : Jef Tombeur

Longtemps "jack of all trades", toujours grand voyageur. Réside principalement à Paris (Xe), fréquemment ailleurs (à présent, en Europe seulement). A pratiqué le journalisme plus de sept lustres (toutes périodicités, tous postes en presse écrite), la traduction (ang.>fr. ; presse, littérature, docs techs), le transport routier (intl. et France), l'enseignement (typo, PAO, journalisme)... Congru en typo, féru d'orthotypographie. Blague favorite : – et on t'a dit que c'était drôle ? Eh bien, on t'aura menti !

Une réflexion sur « J.-0. de Londres : budget explosé »

  1. Et dire qu’on est en période de crise!
    Boycottons ces jeux qui donnent des médailles pour les supprimer quelques mois plus tard pour cause de dopage.

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