Mardi 24 juillet dernier, la commission d’enquête du Sénat sur l’évasion fiscale a rendu son rapport après 5 mois d’investigations. Et le bilan est sans appel : 50 milliards d’Euros échappent à l’imposition de l’Etat français.

 

Les contrôles effectués par le Fisc français sont peut-être de plus en plus ciblés, mais les fraudeurs restent toujours plus habiles ! C’est le dur constat que tire la rapport de la commission du Sénat sur l’évasion fiscale, qui a rendu son rapport le 24 juillet dernier. Elle est présidée par le sénateur UMP, Philippe Dominati, et a pour rapporteur Eric Bocquet (Groupe Communiste Républicain et Citoyen).

 

En effet, elle a conclu que 50 milliards d’Euros échappent à l’imposition ! En ces temps de crise économique, ce chiffre est d’autant plus choquant, surtout quand on pense qu’il correspond à la somme du remboursement des intérêts de la dette française… Pour lutter contre la fuite de ces capitaux, la commission émet une soixantaine de propositions, dont une des plus remarquables aurait pour aboutissement la création d’un "Haut-Commissariat à la protection des intérêts financiers publics". Cette autorité servirait de fer de lance dans le cadre de la bataille contre l’évasion fiscale et serait sous tutelle du Premier Ministre. Dans les autres dispositions avancées, on peut évoquer l’idée de mettre en place un indicateur statistique permettant d’avoir une idée plus précise du phénomène, ou bien la création d’un corps spécial interministériel d’"informaticiens-enquêteurs".

 

Les sénateurs aimeraient que certaines des pistes qu’ils proposent soient intégrés à la Loi par le biais du projet de budget 2013. "C’est un axe politique majeur pour le gouvernement, il y a une impérieuse nécessité à faire cesser cette fraude au fisc", font valoir les sénateurs.

 

Le chiffre avancé par les sénateurs est très approximatif, car ils se sont heurtés à la dissimulation d’informations de la part de certaines banques, ainsi qu’à l’opacité au niveau bancaire entretenue dans certains pays – les paradis fiscaux. Selon l’ONG Tax Justice Network, l’argent conservé dans les paradis fiscaux correspondrait à une fourchette entre 21 000 et 32 000 milliards de dollars. Soit le poids associé des économies des Etats-Unis et du Japon !

 

Pour la commission du Sénat, le seul biais pour réduire l’évasion fiscale est d’y impliquer les instances européennes et internationales. Ce qui n’est pas assez le cas au goût d’Eric Bocquet, qui qualifie l’évasion fiscale d"horreur économique". Selon lui, cela vient du fait qu’"elle est paralysée par les concurrences fiscales en son sein" alors que c’est sur son territoire que se trouvent "les paradis fiscaux les plus puissants du monde", comme peuvent l’être la Suisse, le Luxembourg, Monaco ou les îles anglo-normandes (Jersey & Guernesey).

 

Hier, un nouveau jalon a été posé dans la lutte contre l’évasion fiscale, qui reconnaît dans le cas précis l’importance de la coopération internationale. En effet, 5 pays européens (Italie, Espagne, Grande-Bretagne, Allemagne, France) ainsi que les Etats-Unis ont signé un accord permettant la mise en place d’un modèle de coopération bilatérale renforçant la lutte contre l’évasion fiscale, en instituant un échange automatique d’informations sur les comptes des particuliers à l’étranger. Ces accords obligeront les banques à transmettre les informations sur les avoirs détenus par des ressortissants étrangers aux administrations fiscales des pays concernés, alors que jusqu’à présent, les accords sur la fiscalité ne prévoyaient qu’un transfert d’informations "à la demande", nécessitant que le pays requérant soit déjà informé d’une possible évasion fiscale d’un de ses ressortissants.

 

Sources : Le Monde, Europe1.fr