« Quand on se noie dans une rivière, on peut même s’accrocher à un serpent pour se sauver » avait confié un opposant camerounais, pour justifier son revirement à 180°. Et, c’est finalement ce qu’aurait fait l’actuel président ivoirien en 2010, alors qu’il était en difficulté face à un Laurent Gbagbo très aimé de sa population, mais très détesté par la communauté internationale et la France en particulier.
En effet, au lendemain du premier tour des élections présidentielles de 2010, Alassane Ouattara, en ballotage très défavorable, choisi au second tour de se tourner vers son ex-bourreau et ancien président Henri Konan Bédié, afin que celui-ci l’aide à battre un Laurent Gbagbo devenu invincible. Et, dans une logique de « tous sauf Gbagbo », l’ancien président enterre juste pour cet instant le concept « d’ivoirité » qu’il avait inventé au lendemain de la mort de Houphouët Boigny pour écarter Ouattara du jeu, et accepte l’offre de ADO, contre un modeste poste de premier ministre qui reviendrait à son parti le PDCI, au cas où Ouattara arrivait à être élu. C’est ainsi qu’ils ont mis sur pieds ce qu’ils ont appelé le rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP). Un mouvement politique éphémère n’ayant pour seule finalité que l’écartement de Laurent Gbagbo du fauteuil présidentiel.
Une fois élu, comme conclu, les postes promis au camp de Bédié lui sont attribués. Et jusqu’à tout récemment, tout semblait fonctionner normalement entre les deux frères « ex-ennemis ». Il a donc fallu attendre la semaine dernière pour que suite à un désaccord à l’assemblée nationale, le président Ouattara décide de dissoudre le gouvernement, tout en remettant totalement en cause l’accord passé entre lui et le PDCI. Une mesure très mal prise par les militants du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire, qui y ont vu une volonté manifeste du RDR d’Alassane Ouattara, pour les écarter de la mangeoire.
Afin de rassurer ces derniers, Alassane Ouattara est allé au domicile d’Henri Konan Bédié ce lundi dans la soirée, pour discuter directement avec lui des futures modalités de leur union. Bien qu’il n’y ait pas encore eu d’annonce officielle après ce tête-à-tête qui a duré une trentaine de minutes, de nombreux observateurs pensent que les débats auraient été francs et houleux entre ces deux houphouétistes. En attendant la formation d’un nouveau gouvernement qui devrait intervenir dans les tous prochains jours, c’est une véritable lutte de positionnement qui fait rage dans le parti de Konan Bédié ; chacun s’estimant « premierministrable ». Espérons que cet autre scénario ne viendra pas aider à diviser davantage un pays qui l’est déjà très fortement depuis l’arrivé d’Alassane Ouattara au pouvoir.