Fortes paroles bien senties de Christine Boutin : « La preuve est faite que Fillon n’a pas la carrure d’un homme d’État. On saisit les recours au lieu d’étaler sa rancœur en public. ». Question : alors que les caisses de l’UMP sont vides (remboursement de l’emprunt pour le siège, dotation des contribuables réduite de dix millions d’euros), combien espérait-elle racler du côté de Copé ? Toujours est-il que la perspective de voir Fillon obtenir une prise en compte plus exacte des votes des fédérations d’outremer ne semble guère l’enthousiasmer.
Décidément, l’UMP évoque de plus en plus la Roumanie (voir « Nouvelle constitution « anti-Basescu ») avec un Fillon-Basescu et un Copé-Ponta, à moins que ce ne soit l’inverse. Dans un premier temps, Fillon avait semblé concéder le bras de fer initié par Copé, et baissé sa garde.
Dans un second, il évoque une magouille sur l’intégration des votes de l’outremer dans le décompte final entériné par la commission Cocoé. Eh, vous avez oublié les cocotiers !
Plus de réunion dans un café pour le clan, la bande, la coterie (version Copé), ou les amis, soutiens (version Fillon) de l’ancien Premier ministre : on votait dans une école catholique parisienne, on se réunit au… Musée social (rue Las Cases). Tout un symbole : Fillon chez un bonapartiste social !
Après la Cocoé, la commission des recours. Présidée par Yanick Paternotte, soutien de Jean-François Copé. Entouré de membres de la motion La Droite forte et d’autres… copistes ?
Raffarin en rajoute, mais en porte-à-faux. Alors que Copé embraye sur la thèse selon laquelle François Hollande ne serait qu’un vil usurpateur, élu par défaut, de justesse, Raffarin remémore ô combien « classieux » avait été Nicolas Sarkozy, concédant le verdict des urnes.
Fillon a jusqu’à vendredi pour formuler, sans doute assisté de son avocat, des recours. J’avais déjà évoqué l’outremer dans mes précédentes chroniques à l’heure-l’heure (et alpines maritimes). Cela se confirme. Fillon avait 108 voix d’avance en Nouvelle-Calédonie (98 de retard au final métropolitain… élargi ?). À La Réunion, des bulletins n’étaient pas parvenus à des encartés (lesquels au juste ? dont les intentions de vote étaient ou non connues ?). À Mayotte, Fillon récoltait 27 voix de plus que Copé. Et Wallis-et-Funtan (11 de mieux pour Copé) ne pèse guère.
Et l’on retrouve l’insignifiant Frédéric Lefebvre, trop heureux de se poser en arbitre impartial, qui se manifeste de nouveau. Il veut que le vainqueur soit le réel vainqueur.
Philippe Bas (Manche, pro-Fillon) veut voir Juppé en arbitre suprême. Fillon veut éviter, enfin, le disait-il vers 15 heures, d’introduire des recours, mais exige « la vérité ». Sera-t-il exécuté, comme dans la chanson de Guy Béard ? Il aurait au final 26 voix d’avance.
Fillon sera l’invité du JT de 20 heures de TF1. Soit il annonce des recours, soit il s’est plus ou moins mis Juppé dans la poche, lequel saurait ménager Copé mais obtenir que les soutiens de Fillon obtiennent des postes les mettant en valeur (et position de tenter les municipales en meilleure posture ?).
Les proches de Copé distillent à qui veut les entendre que Nicolas Sarkozy aurait pris de fait parti pour leur chef de file. Ceux de Fillon font parler Balladur, partisan présumé d’une direction collégiale. Et pourquoi pas Ségolène Royal pour arbitre ? En duo avec Martine Aubry ? Et en assesseure, Xavière Tibéri ? Ou Frida Umpathétique ?
Guaino veut une grande purge : que ceux qui persistent à contester Copé prennent la porte. Et ne renouvèlent pas leur cotisation ? Passent chez Borloo ?
Les pro-Fillon passent pour des partisans de Mélenchon : on ne lâche rien !
En face, Baupin ironise en comparant l’UMP à la planète des Shadocks.
En fait, déjà, il faudrait comparer ce que les fédérations ont communiqué à chaud à la presse régionale et aux locales du Parisien avec ce qu’a retenu la Cocoé. On dispose en tout cas des listes finales, transmises à la presse par le camp Fillon. Pour l’outremer et les Français de l’étranger, on a 759 voix pour Copé et 849 pour Fillon.
La Cocoé aurait recensé 1 608 votes par correspondance pour… les seules motions. Il faudrait croire, selon le camp Fillon, que tous ceux ayant voté par correspondance se seraient abstenus de voter pour la présidence de l’UMP. Bah, après tout, des coïncidences, cela se produit, n’est-il pas ?
Danrmanin (Nord) voudrait que Chirac, Sarkozy et les sages disposant « d’un magistère moral incontestable » soient réunis pour se prononcer. Ambiance : « Jacques, dis-moi, au fond des yeux, tu as voté Hollande ? », dixit Sarkozy devant tout le monde.
Chartier (pro-Fillon) explique le non-recours. Il exige simplement « les résultats complets », soit de fait « l’addition définitive » (et non plus la partielle). Le raisonnement se tient.
En sus, cela obligerait Copé, président autoproclamé par avance, à intenter un recours. Ce serait alors lui qui passerait pour le mauvais joueur, mauvais perdant.
Libération a cette fois compris la leçon. Il s’est lancé, dès que possible, dans un « heure par heure » rétroactif (reprenant des déclarations de la nuit, ou du matin, avant le revirement de Fillon, dont celle de Xavier Bertrand, finaud à présent d’avoir demandé à Fillon, son candidat, d’accepter l’accolade étouffante de Copé).
En fait, Ciotti avait fléchi. Pécresse, Wauquiez et Fillon l’ont convaincu de déposer, vers 14:30 la demande de réintégration des votes par correspondance.
David-Xavier Weiss a eu les mots qui fâchent. Fillon est un lâche, un pleutre, qui préfère « une UMP décomposée à une droite décomplexée ». Pourquoi pas aussi perverse, trouvant naturels tous ses excès, tous ses dérapages verbaux. Raffarin accuse la centaine de députés pro-Fillon de n’être que des vilains « démolisseurs ».
Le Figaro expurge tous les propos mettant trop d’huile sur le feu.
Sur le fond, il avait été communiqué un chiffre rond : 170 000 votants. Il y en a eu 176 608 en comptant l’outremer, et c’est indéniable. C’est reproduit noir sur blanc par Le Figaro, sans commentaire.
Alain Juppé n’est plus droit dans ses bottes, mais dans ses petits souliers. Il accepterait de venir faire un tour à Paris, mais « si Jean-François Copé en est d’accord ». Ouaf ! Le meilleur d’entre tous lève le doigt et dit « J’peux m’sieur ? ». Mais c’est selon Philippe Goujon. L’intéressé se tait. Pour le moment. Mais Franck Riester évoque les statuts : l’intérim Juppé ne serait pas statutaire.
Au final, Juppé accepte, mais si béni des deux boxeurs du ring. Eh, un crochet ou un uppercut est si vite décoché que les neutres mal placés risquent plus que des bleus.
Bientôt des manifs militantes devant le domicile de Carla Bruni et scandant « Reviens Nicolas, reviens, parce que l’UMP, elle a besoin de toi, tralala ».
Dord en profite pour refiler à un autre le bébé hérité de Woerth, soit le remboursement de l’emprunt du siège, le bilan rendu encore plus fragilisé par la baisse de la dotation des contribuables. Le trésorier de l’UMP est « en pleine réflexion » et n’exclut plus rien. Il est pro-Fillon et se demande si Copé et consorts ne vont pas lui pourrir la vie, que ce soit Copé qui l’emporte ou Fillon. Si c’est Fillon, et qu’il reste, il sera chipoté sur tout. Si c’est Copé, et qu’il part, il risque de se voir reprocher d’avoir gaspillé (voire piqué dans la caisse ?).
Là, Le Figaro reprend l’info, trop dure à escamoter ?
La Marine canonne, avec pour aviso Philippot pour qui « l’UMP est en combustion spontanée ». En fait, il aurait envoyé un homme-grenouille porteur de poix pour en badigeonner la coque. Laquelle, bourrée d’explosifs, ne devrait pas tarder à lancer des fusées. Comme un point presse de Copé qu’on attend vers 19 heures ou un peu auparavant.
On aura dans l’ordre : le point presse de Copé, la déclaration de Juppé au JT de TF1 à 20 heures. C’est dommage, il y a tant et tant de choses à faire dès 19 heures. Comme la remise du prix littéraire de la gastronomie Antonin Carême (prix spécial Pierre-Christian Taittinger), au Lutétia. J’en prévois certaines et d’aucuns filant subrepticement hors du salon pour aller se planter devant un écran de télévision.
Chatel et Morano se répandront aussi devant les micros des radios. Copé sera sur Europe 1 jeudi matin au micro d’Elkabbach, indique Le Monde qui reste fidèle au dialogue avec ses visiteurs. Un exercice difficile qui oblige à ménager chèvre et choux, ou à éluder les questions dans les réponses.
Dans ce type de couverture, que faire ? Comme L’Express, en donner un peu trop au risque de diluer (et noyer l’essentiel), comme Le Parisien, qui se réfrène un tantinet ? Isabelle Vasseur (pro-Copé, siégeant à la Cocoé) veut absolument que Fillon soit forcé d’intenter un recours mais ne répond pas : oui, ou non, il y a-t-il eu oubli (volontaire ? involontaire ?) de plus de 6 000 votes.
Libération (en sous-effectif ?) est à la traîne. Pour faire « genre », le site ressort des archives de l’Ina sur Juppé. Tandis que la concurrence, à chaque rafraîchissement de page, lance une publicité qui a dû être négociée au prix fort. C’est un peu comme s’il y avait des surenchères en plein match de foot et que les pubs envahissent l’écran.
Au fait, que vont faire les députés proches du « perdant ». Rejoindre les non-inscrits à l’Assemblée. Question de Papy Mougeot sur le schmilblick agrémentée d’un « combien ça coûte ? ». Les députés ont jusqu’à la semaine prochaine pour se rallier à un groupe parlementaire. Problème de foire d’empoigne pour jouer aux chaises musicales et ne pas se retrouver trop près du PS ?
« C’est nous la vraie droite, c’est nous la vraie droite, c’est nous, c’est nous, c’est nous la vraie de vraie droite ! ». « On va gagner, Sarko dans l’nez, vous aller perdre, Fillon dans luc’ ». Ayé, les fillonistes, 110 députés ou sénateurs, sont prêts à créer des groupes séparés dans les chambres si Copé s’entête. Qui aura le meilleur pot de chambre ?
Baroin veut le recours à Juppé. Histoire d’emm… Copé ? Lequel tarde à affronter micros, caméras et carnets de notes. Du coup, pour faire patienter, Le Figaro a recours à un « zapping actu » d’images vidéo.
Qui nous fera demain la plus désopilante revue de presse internationale ?
Copé s’est déclaré : « J’y suis, j’y reste ! ». Si les partisans de Fillon fuient, ce sera « Que d’eau ! Que d’eau ! ». Ce ne fut pas une conférence de presse, il a fui les questions, indiquant que tous les votes devraient être réexaminés un par un. C’est qui le « pleutre », comme disait l’autre (voir supra) ? En tout cas, Copé n’a absolument pas réfuté les chiffres de Fillon & co Ltd.
Juppé se ravise : les conditions qu’il souhaite ne sont pas remplies. Il se défile, quoi.
Eh bien, nous aussi, cela suffit pour la soirée, sauf bien sûr explosion d’une bombe au domicile de Fillon, ou d’une mine sous la voiture de Copé.
En fait, on a compris : Fillon l’emporte d’une courte tête (très courte) mais sait qu’il ne pourra pas prendre la tête de l’appareil. En cas de nouveau vote, il serait minoritaire : selon Yves Jégo, près de 3 000 personnes ont déjà rejoint l’Uni (centristes Borloo), et c’est trop tard pour lui. Copé se retrouve à la tête d’une annexe du Front national. C’est beaucoup plus clair.
Fillon va-t-il, sachant la commission des recours verrouillée par l’adversaire, avoir recours à la justice ou se coucher ? Qu’importe finalement.
Comme l’a exprimé sur Twitter un « rieur » (jaune), l’Union pour Marine Présidente est en ordre de marche !