Conséquence inéluctable de la loi de séparation de 1905 mais aussi du désintérêt croissant pour la religion, la désaffection pose des problèmes difficiles à résoudre.

 

 


 La France, en tant que destination majeure pour des millions de touristes chaque année, dispose d’un patrimoine historique conséquent. Prosper Mérimée et ses successeurs n’ont eu de cesse de parcourir la France pour inventorier ces monuments présentant un intérêt certain pour notre histoire, ou même plus généralement pour les arts. L’Inventaire, voulu par André MALRAUX, n’est qu’une conséquence inéluctable  de cette volonté de protection. Fille ainée de l’Eglise, la France compte parmi ses monuments historiques, bon nombre d’abbayes et d’églises, nous rappelant alors l’importance du clergé au cours des siècles de notre histoire. Mais, nous avons courte mémoire. N’entendait-on pas dénoncer la « grande pitié des Eglises de France » au début du siècle précédent ? Car, si autrefois, l’Eglise se confondait bien souvent avec le royaume, la loi de 1905 a posé la séparation de l’Eglise et de l’Etat, comme étant une règle de notre République. La laïcité s’est imposée, avec une règle simple. Les édifices, construits après 1905, sont de la responsabilité des diocèses, qui en décident l’édification, alors que les édifices antérieurs ont été attribués (un peu vite à mon sens) aux communes. On constate immédiatement le déséquilibre, puisque là où les diocèses ont en charge les quelques 3.000 édifices construits depuis un siècle, les 36.000 communes ont en charge les 45.000 édifices recensés. Parmi ces milliers de monuments, quelques édifices sont régulièrement entretenus et attirent un public friand de découvertes, alors que d’autres sombrent dans l’oubli, la désaffection, puis finalement la démolition. Car, si on se doit de conserver les traces de notre passé, on ne peut pas conserver l’intégralité de ces édifices, d’autant plus que l’entretien de ces églises représentent un budget important, alors que la communauté chrétienne de notre pays ne cesse de se réduire d’année en année. Comme toujours, on attend donc d’être mis au pied du mur pour prendre en compte la réalité, et aujourd’hui, les responsables patrimoniaux mais aussi certaines associations de protection du patrimoine tirent la sonnette d’alarme. Ici, on promet qu’une église sera transformée en fast – food, là un autre édifice devrait servir à l’aménagement de loft. Car, en la matière le droit canonique est clair et simple. Un édifice peut être consacré à un usage profane, qui ne sera pas contraire aux bonnes mœurs et à la morale (il reste alors à définir ces notions de manière précise) , dès lors qu’il n’est plus possible de le réparer. C’est ici, que se pose alors le problème des vocations. En effet, le XXème siècle a vu la France se doter de nouveaux édifices, afin de répondre aux demandes de fidèles de plus en plus citadins. Les milliers d’églises rurales restaient donc à la charge des communes, alors que les diocèses se devaient, surtout après la seconde guerre mondiale, d’édifier de nouvelles constructions dans les villes en plein développement. Seulement aujourd’hui, les fidèles se raréfient, entrainant de manière inéluctable une baisse conséquente des revenus de l’Eglise. Le résultat est donc inévitable : comment faire face à des dépenses de plus en plus importantes avec de moins en moins de revenus.  Le cercle vicieux s’est installé. Alors que faire pour sauver ces édifices ? Doivent – ils l’être ? Chacun a sa réponse, et j’entends déjà les propos se déchainer : « On n’a pas d’argent pour répondre aux besoins vitaux de nos concitoyens, alors sauver les églises, ce n’est vraiment pas la priorité… ». Il n’y a rien à dire à ce genre de réactions, car la visite de la plus belle église romane, qui soit, ne remplacera jamais un repas pour les nécessiteux. On pourra s’émerveiller devant les merveilles d’une abbaye cistercienne et s’extasier devant le génie de ces moines bâtisseurs, sans pour autant pouvoir apporter confort et bien être à ses enfants… Si je n’ai aucune réponse, si ce n’est que mes propres convictions, je tiens néanmoins à vous rappeler un fait concernant le patrimoine historique en général, et donc les églises et autres abbayes en particulier. Nous n’en sommes que les dépositaires. Hérité du passé, ce patrimoine doit être transmis aux générations futures. Si l’intégralité ou l’exhaustivité ne sont pas requises, il faut néanmoins veiller à conserver le témoignage d’un passé, qui ne nous appartient pas…