Réalisateur : Sidney Lumet
Date de sortie : 4 octobre 1957
Pays : USA
Genre : thriller, huis clos
Durée : 95 minutes
Budget : 340 000 dollars
Casting : Henry Fonda (M.Davis, juré n°8), Martin Balsam (juré n°1), John Fiedler (juré n°2), Lee J.Cobb (juré n°3)
Un crime a eu lieu, la Justice prend le relais. Un jeune homme modeste dans le box des accusés doit être jugé pour le meurtre de son père. Un jury composé de 12 membres se retire dans une pièce pour délibérer et rendre son verdict à l’unanimité. Une seule voix qui discorde et c’est un nouvel arrangement qui doit se négocier. Bref, la soirée risque d’être longue car un homme ne se range pas du côté des onze autres, un homme pour qui le doute persiste.
Après Le château de l’Araignée, on continue dans la lignée des classiques. Encore une fois, nous sommes dans les années 1950, le cinéma américain connaît un âge d’or où les cowboys, les péplums et les comédies musicales trustent les premières places et participent au rayonnement culturel des États-Unis. 12 hommes en colère est devenu avec les années un chef d’œuvre des huis clos et démontre à lui seul ce qu’est ce genre bien particulier : un affrontement entre des personnages isolés dans un endroit clos, à l’extérieur du monde. Malgré cette contrainte d’un lieu unique, Sidney Lumet pour qui c’est le premier long métrage, réussit à faire vivre au spectateur une « aventure » trépidante, une enquête hors du lieu du crime, une prouesse ! Celle de rendre vivant quelque chose qui ne l’est pas. Par des reconstitutions dans l’unique salle où se déroule le film, les membres du jury tentent de démonter l’accusation et les témoignages, pièce par pièce. N°8 incarne à lui seul la présomption d’innocence et pose la question : « et si tout cela n’était pas si évident ? », « et si l’origine sociale peu élevée de l’accusé aurait précipitée le verdict ? ». Le moindre détail est passé au crible, de la déposition d’un vieil homme qui prétend avoir mis 20 secondes pour se rendre dans la cage d’escalier et voir l’assassin fuir à toute vitesse à la trace de lunettes laissée sur le nez de la voisine de l’immeuble d’en face venue raconter son histoire à la barre. Tout cela est enivrant ! Un Cluedo filmé avec des joueurs talentueux.
Avec intérêt, les membres débattent, se disputent, mettent en avant leur conviction, élaborent des théories, expérimentent des choses pour prouver qu’il y a bien un doute sur cette affaire. Il est également passionnant de voir comment un homme charismatique et persuasif parvient à retourner la situation. Lui qui était seul à être contre la condamnation à mort, obtient des 11 autres une révision de leur sentence. Une véritable partie de ping pong se met en place, comme si chaque camp gagnait ou perdait des points au fur et à mesure des votes successifs, qu’ils soient anonymes ou à main levée. Henry Fonda est solaire et monopolise le film même si les autres acteurs sont justes et ont des caractères bien précis. Entre le vieux sage, l’homme désintéressé, le timide ou le bourreau en puissance, pas facile de trouver sa place.
Sidney Lumet signe un film bouleversant sur la Justice, implacable et cruelle, aveugle mais heureusement pas sourde. Par la parole vient la raison et même les plus fervents partisans de la peine de mort peuvent évoluer et admettre qu’ils se trompent. Ce qui est troublant c’est l’absence complète du « monde extérieur », on ne saura jamais si le verdict du jury aura sauver ou non le présumé coupable. Dans la même idée, on ne saura le nom que de deux personnages, les autres resteront à jamais des numéros.