La bobine d’Edward Byrne Breitenberger (Juil. 1933, New York) vous dit confusément quelque chose et vous inspire vaguement une idée ? Alors, vous regardez trop les télévisions étrangères. Ou alors, vous revoyez trop de western spaghettis de médiocre facture. Car pour se souvenir d’Edd, ou Ed Byrnes, dit aussi Ed « Kookie » Byrnes, dans son rôle de Vince Fontaine dans Grease (1978, Randal Kleiser), il faut être sacrément physionomiste. Mais, dans la catégorie seconds rôles, Ed Byrnes est une grande figure du cinématographe. Une Vieille Gloire argentée comme sa chevelure, mais plutôt décatie…


Ce vieux beau d’Ed Byrnes est tellement odieux avec ses admiratrices et admirateurs que certains organisateurs d’événements genre salons et foires commerciales ne veulent plus lui confier des ménages ou l’autoriser à dédicacer ses vieilles ou plus récentes photos. Il a mal tourné, l’animateur de la version originale – étasunienne – de La Roue de la Fortune.

 

Si Byrnes a été initialement sélectionné pour cette Wheel of Fortune qui l’a rendu aussi fortuné, c’est qu’il n’était pas du tout inconnu du grand public vers 1975. Il était Kookie. Soit le mauvais garçon de 77 Sunset Strip qui passe son temps à soigner sa coiffure et à se la lisser d’un coup de peigne expert. D’ailleurs, on l’a carrément ressuscité pour ce faire. Car au départ, ce tueur en série de Kookie avait été attrapé, flanqué dans le couloir de la mort. Oui, mais, les foules adoraient sa petite gueule de frappe. À moins que ce soit les annonceurs qui parrainaient la série. De toute façon, le public a toujours raison et Byrnes plaisait fort aux chalands d’alors.

 

Son style capillaire n’a pas pris, comme celui de Fawcett-Majors, son patronyme. En effet, il avait été surnommé auparavant : c’est une coupe queue de canard (ducktail haircut). Faut brillantiner. Une anecdote sans doute un peu exagérée veut qu’il recevait jusqu’à 15 000 demandes de dédicaces par semaine en 1961.

Doté d’un contrat d’exclusivité avec la Warner, c’est un acteur très recherché mais qui ne peut qu’accepter des rôles dans des productions de la Warner, de 1957 à 1960. Ne me demandez pas les titres en français de ces quasi navets, mais retenez qu’il parvient à négocier son contrat et de ce fait il obtient un rôle dans le grand prédécesseur des Douze Salopards (de Robert Aldrich). Il s’agit de L’Invasion secrète (1964, Roger Corman).

 

Son premier petit rôle est celui d’un gamin dans Prisonnier de la peur (1957, Robert Mulligan). Il n’est même pas sûr qu’il ait été mentionné en petit sur l’affiche. Il joue ensuite les mauvais garçons, les Rangers, les desperados, dans des trucs aussi inoubliables que Je vais, je tire et je reviens (en fait, pour ce film, d’Enzo G. Castellari, de 1967, il interprète un banquier). Dans Sette Winchester per un massacro, il est Stuart, nous indique Wikipedia. Au cinéma toujours, il a des rôles dans Stardust (1974, Michael Apted), dont un premier dans Erotic Images (1983, Decla Langan, avec Alexandra Day et Britt Ekland). Mais sa dernière apparition notable est pour la télévision, dans une série Amours et rock’n’ Roll de 1999. Comme ses films ont été adaptés en allemand et en polonais, il a donc au total quatre pages dans Wikipedia. Cela étant, il sera plusieurs fois primé ou détenteur d’un trophée allemand Bravo Otto, décernés par le lectorat du magazine Bravo. Il le doit à l’élargissement, en 1962, du prix à plus de douze catégories. N’empêche, il se veut, en Allemagne, de ce point de vue, l’égal de James Dean, Maria Schell ou Romy Schneider (primé·e·s avant 1962).

 

Formidablement apprécié des adolescents de son groupe d’âge, il sera second rôle ou figurant à court texte dans des films pour ados de la génération suivante. De ce fait, son Kookie reste aussi connu que le Pee-Wee Herman de Paul Reubenfeld (Paul Reubens). En tout cas chez les Nord-Américains. Bref, si vous en rencontrez, vous pouvez leur fredonner le Kookie’s Boogie ou le Kookie’s Cha Cha Cha, car il a aussi enregistré un album musical. Mais il n’est pas sûr qu’ils puissent siffler la suite. Mais le nom leur dira immanquablement quelque chose. À moi, à peine. Et vous ? Et pourtant, pourtant, c’est sûr, j’ai déjà vu la tête d’Edd « Kookie » Byrnes quelque part… Mais ce n’était pas dans un Trinita. Car si on continue à appeler Terence Hill du nom de son personnage, pour Edd Byrnes, son nom n’est même plus Personne (Terence Hill dans le Sergio Leone de 1973), mais Kicécuila. Sans le moindre Pierre Vassiliu pour le populariser. Mais cela va-t-il durer ? Imaginer qu’on le prenne pour le rôle principal d’une adaptation d’Un homme et son chien (soit le rôle de Belmondo dans le film de Francis Huster, 2009) ?

 

Eh oui, il faut savoir anticiper sur une éventuelle actualité. Francis Huster confiait « comme le héros du film, Jean-Paul Belmondo a aussi été abandonné par le monde du cinéma qui a cru qu’il ne reviendrait jamais… » (entretien pour Senior Actu daté du 14 janvier 2009). Imaginez que je me retrouve en position de m’entretenir avec lui, Kookie, à l’occasion de la sortie en France de la VF de A Man and his Dog. J’aurais l’air fin avec cette chronique que je traînerai telle une casserole. Et si cela se trouve, son press officer rétorquerait : « SiFourEnne ? Don’t tel me you mean ComeFo’rNews ? Are you kidding ? Get off, it’s a NO ! ». Ah, oui, au fait, le Man and his Dog serait peut-être réadapté de l’Umberto D de Vittorio De Sica (1952). Si on achève bien les chevaux, on a plutôt tendance à recycler les acteurs et les bons scénarios… Et en journalisme, fusse-t-il en ligne, il ne faut pas trop vite tirer sur le pianiste… euh, le journaleux. Ne jamais vendre la peau d'un cabot avant de l'avoir soi-même abattu…