Un vin qui tourne au vinaigre


Au repas, on a coutume dans notre pays, de faire passer le tout en s’humectant le gossier d’un verre de vin. La France est reconnue dans le monde pour ses productions de grands crus. Des bouteilles de qualités pouvant frôler des sommités. En goûter, c’est atteindre un nirvana, toucher le septième ciel. L’avoir en bouche c’est comme avoir une foule en liesse célébrant en communion la joie de vivre, la fanfare fait battre le cœur dans une douce rythmique, la satisfaction d’un moment unique se manifeste par des larmes de félicité. Le vin ce n’est pas seulement une boisson, c’est le fruit d’une culture de tous les instants, des raisins bichonnés par des vignerons soucieux de produire un nectar digne d’être présent à la table des dieux. Telle une tâche de vin salissant un jean neuf, une affaire de fraude vient écorner cette image prestigieuse.

Il y a quelques semaines, les gérants de la maison de négoce, de Nuits-Saint-Georges, Labouré-Roi ont été interpelés par la police puis placés derrière les barreaux pour avoir jouer les escrocs. Une filouterie concernant 2 millions de bouteilles et plus de 3 millions d’euros. La région est sous le choc, c’est un tsunami rouge qui s’abat sur la profession avec cette affaire. D’anciens démons sont revenus à la mémoire quand le scandale à éclaté. Pour tous les amateurs, en apprenant cela, il y eut la réminiscence de la fameuse affaire des vins de Bordeaux dans les années 1970. Bordeaux, une appelation qui ne seyait guère à ces bouteilles, fruits d’un affreux mélange entre récoltes du Languedoc et d’ Aquitaine.

Une négligence de poids leur a couté cher. En effet, depuis plus d’un an, les enquêteurs et les agents des services de la Direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, avaient des soupçons sur les agissements de cette maison de vin. Ce qui a mis la puce à l’oreille des inspecteurs, c’est la faible différence entre le volume de la production initiale et celle de vin produit. En principe, une partie assez importante de la récolte ne devientt pas un cru mais reste à l’état de « jus de raisin ». L’évolution n’est pas permise à tout le monde. Or dans ce cas, une grosse partie de la ceuillette était vinifiée, la quantité infime de rejet a semé le trouble.

Ils ont été accusés de «tricherie sur les étiquettes», d’utilisation de «fausses médailles», le vin d’une année pouvait devenir le vin d’une autre, une forme de voyage dans le temps si le stock d’un millésime tenait à se tarir. Une cuvée 2006 devenait une 2008 et vice versa, au gré des besoins. En outre, de la même façon, des petites productions sans prétention, devenaient des grands crus adulés par les amateurs d’oenologie. Une mythomanie commerciale pouvant leur faire encourir une peine de prison de deux ans et une amende de 37.500 euros

Malgré cette escroquerie en bande organisée, aucune personne n’a été mise en examen et la Justice semble fermer l’oeil dessus. Il faut avouer que cette maison avec un si grande réputation, créée en 1832, devenue une des trois premières enseignes de négoce de spiritueux, a joué franc jeu.

Durant l’enquête, ils ont été clair comme de l’eau roche, tout le personnel a sué sang et vin pour aider les gendarmes. Alors qu’ils étaient interrogé par les policiers, Louis et Armand Cottin, les deux octogénaires a la tête de l’entreprise depuis 1974, publicité vivante du fait que la consommation de vin permet de vivre vieux en fluidifiant le sang, n’ont pas cherché à nier les faits.

Ils espèrent jouer de leur grand âge, de leur lacunes en informatique et en étiquettage moderne pour atténuer les circonstances. Autre argument de défense, ils auraient agit de la sorte pour assurer la protection des 70 employés. L’entreprise titube, vacille, non pas d’une trop grande consommation de liquide fruité alcoolisé, mais à cause du contexte économique anxiogène. La crise a provoqué une gueule de bois involontaire, les soucis financiers s’amoncellent et les banques ne prêtent plus. Fermer la maison serait synonyme de pertes de travail, des familles privées de revenus, plongées dans la misère.

L’avenir n’est pas si sombre pour Labouré-Roi au regard de ses bilans précédents. En effet, plus de 10 millions de bouteilles chaque année sont écoulées et ses revenus se statuent aux environs de 35 millions d’euros par an, tout en possèdant de grandes perspectives à l’international. Un marché florissant quand on connait le goût des riches chinois ou des jeunes milliardaires russes pour les bonnes bouteilles.