Le très populaire député de la sixième circonscription du Pas-De-Calais a appelé son ami Bernard Kouchner à "sortir de sa réserve" et à prendre une position officielle face aux troubles entre Pékin et le Tibet. Un appel du pied assez inattendu qui rappelle le mutisme de l'Etat français face aux répressions chinoises. Certes, le Quai d'Orsay avait demandé à la Chine de "rouvrir sans délai le Tibet à la présence étrangère" et notamment aux journalistes, mais le Gouvernement n'a jamais condamné les violences ouvertement !
"Bernard, sors de ta réserve sur un sujet aussi vital pour lequel tu t'es battu tout au long de ta vie !" s'est exclamé Jack Lang, tendant une perche à Bernard Kouchner, ministre d'ouverture du gouvernement Sarkozy et accessoirement ministre des Affaires Etrangères. Tout cela avant de rappeler qu'ils avaient ensemble "à plusieurs reprises reçu le dalaï-lama".
Une incitation dont on se demande si elle est si amicale que cela, vu les paroles suivantes du député socialiste : "Que sont devenues les paroles enflammées et justes que tu prononçais ?". Une question qui vaut pour le Tibet mais peut-être également pour le côté consensuel de Kouchner depuis qu'il est ministre de Sarkozy. Un ministre très arrangeant en comparaison d'une Fadela Amara, qui elle, ne connait pas les concessions.
Jack Lang s'est ensuite adressé à Nicolas Sarkozy, lui demandant d'inviter le Dalaï Lama à Paris, arguant que "c'est un geste qui aura sa valeur emblématique", avant de lui demander de prendre lui aussi une position officielle et de réclamer, à l'instar du Quai d'Orsay, la réouverture du Tibet aux journalistes.
Le député du Pas-de-Calais s'est également déclaré pour une action commune des pays européens. Gordon Brown, Premier Ministre du Royaume-Uni a quant à lui accepté l'idée d'une rencontre avec le Dalaï Lama ce mercredi. Cette action commune pourrait être un boycott des Jeux Olympiques, idée tout de même repoussée par Lang, qui lui préfèrerait d'autres solutions, comme le boycott de la cérémonie d'ouverture. Mais peu importe la décision prise, Jack Lang a rappelé qu'elle n'aurait de valeur qu'à l'unique condition que "beaucoup d'autres s'y associent".
La Chine a quant à elle rappelé aux autres nations de ne pas se méler de ses affaires "internes" et tout spécialement des troubles tibétains. Un avertissement donné à la suite de la visite de Nancy Pelosi, Présidente de la Chambre des Représentants aux Etats-Unis, au Dalaï Lama dans son exil de Dharamsala.
La Chine pourrait retransmettre les images des JO en différé!
Les incidents survenus à Olympie lors de l’allumage de la flamme olympique pour les Jeux de Pékin 2008 pourraient avoir donné la mauvaise idée aux autorités chinoises de retransmettre les compétitions olympiques en différé, afin de ne pas s’exposer au risque de voir des manifestants venir perturber les retransmissions.
Cela permettrait aux censeurs d’avoir le temps d’expurger les images des compétitions de toute éventuelle tentative de critiquer le régime communiste chinois quant à sa politique tibétaine ou tout autre enjeu gênant pour l’Empire communiste du Milieu. Il va sans dire qu’un tel événement sportif, le plus universel qui soit, perdrait énormément de sa saveur dans le cas d’une retransmission en différé, l’intérêt du direct étant de réunir toute la planète en même temps devant un événement sportif en train de se dérouler sous ses quinze milliards potentiels d’yeux ébahis.
Le directeur des sports de France Télévision, Daniel Bilalian, rechigne à imaginer une telle possibilité, mais l’envisage tout de même: « Pour l’instant, nous n’avons pas l’intention de boycotter les Jeux » mais « s’ils sont censurés ou expurgés d’une manière ou d’une autre par les autorités chinoises et que le CIO, ce que je ne crois pas un seul instant, accepte, cela remettrait bien entendu notre position en cause », a-t-il déclaré sur la radio RTL.
Cependant M. Bilalian reste optimiste: « Mais on est loin d’en être là, il faut attendre que les choses avancent », précisant que le président du CIO, le Belge Jacques Rogge « est en train de régler le problème avec les autorités chinoises et je ne veux pas croire qu’un tel événement peut être annulé. »
Thomas Halter
La France hausse le ton! (lol)
PARIS (Reuters) – La France a, par la voix de Bernard Kouchner, haussé le ton mardi face à la Chine à propos du Tibet en demandant que la « répression » y cesse.
Le ministre des Affaires étrangères a estimé que la première des exigences à formuler aux autorités chinoises était de permettre la libre circulation de l’information concernant les troubles qui secouent le Tibet et ont fait, d’après le gouvernement tibétain en exil, 140 morts.
« Il faut que les violences cessent, surtout que la répression cesse », a-t-il dit au micro d’Europe 1. « Maintenant on ne peut pas aller au Tibet, il faut que les journalistes puissent s’y rendre, l’information doit circuler ».
Le chef de la diplomatie française a expliqué en avoir fait la demande lors d’une conversation téléphonique lundi avec son homologue chinois.
« La réponse a été : il y a des questions de sécurité. Je crois qu’elles ne tiennent pas », a-t-il dit au micro d’Europe 1.
« La première des exigences, avant de parler des Jeux olympiques qui se tiendront aux mois d’août, ce serait l’accès au Tibet et dans les autres provinces pour que les journalistes puissent faire leur travail », a souligné Bernard Kouchner.
Le président Nicolas Sarkozy a appelé lundi à la retenue et à la fin des violences au Tibet. Dans un message au président chinois Hu Jintao, qui a constitué son premier commentaire public depuis le début des manifestations anti-chinoises au Tibet, il s’est dit prêt à faciliter la reprise du dialogue.
« PERSONNE NE VEUT DU BOYCOTT »
Bernard Kouchner s’est placé mardi sur la même ligne.
« On a un absolu besoin d’être efficace, c’est-à-dire prendre en compte à la fois la position des Chinois et celle de nos amis tibétains », a-t-il fait valoir, soulignant qu’on ne peut réduire la politique extérieure à la question des droits de l’homme.
Interrogé sur la possibilité d’un boycottage des Jeux olympiques de Pékin, qui doivent s’ouvrir le 8 août soit pendant la présidence française de l’Union européenne, le chef de la diplomatie française a mis en avant le souci d’efficacité.
« Arrêtons de parler du boycott, personne ne réclame, surtout pas le dalaï-lama, le boycott des Jeux olympiques, ne soyons pas plus tibétain que le dalaï-lama », a-t-il dit.
« Il faudrait trouver une façon de parler avec les Chinois, une façon d’exiger, de permettre que les Chinois parlent avec les Tibétains », a expliqué Bernard Kouchner.
« Si la cérémonie d’ouverture ou si les Jeux olympiques permettent cela, de la façon la plus insistante, la plus douce et la plus têtue possible, eh bien ce sera bien », a-t-il ajouté.
Le ministre des Affaires étrangères a toutefois rappelé qu’une telle question – boycottage, gestes de protestation ou autre – incombait au Comité international olympique (CIO).
« S’ils avaient quelque chose à dire, ce serait le moment de nous en parler », a-t-il fait remarquer.
Bernard Kouchner a souligné au passage, à l’adresse de ses amis socialistes qui lui reprochent son manque d’engagement clair sur le dossier du Tibet, qu' »être ministre des Affaires étrangères ce n’est pas complètement être militant » et que les droits de l’homme il ne faut pas « s’en servir, mais les servir.
Il a émis le voeu que les ministres des Affaires étrangères des 27 pays de l’Union européenne, qui se réuniront vendredi en Slovénie, adoptent « une position commune » parce que « cette répression n’est pas supportable ».
Gilles Trequesser