Temps scolaire : V. Peillon conforté par son homologue britannique

Vincent Peillon, ministre de l’Éducation, qui vient d’annoncer le recrutement d’un millier de profs de français pour la prochaine rentrée, lira sans doute attentivement les considérations de son homologue britannique, Michael Gove. Pour ce dernier, les longues vacances d’été sont une relique du pénultième siècle et les écoliers doivent passer davantage de temps, chaque jour et chaque trimestre, dans leurs écoles.

On ne sait si chaque nouveau ministre finlandais ou islandais veut marquer son passage par l’Éducation d’une nouvelle réforme. Toujours est-il que Vincent Peillon bute sur le réaménagement du temps scolaire et que Michael Gove risque lui aussi de s’attirer les foudres des enseignants, voyagistes, hôteliers et parents d’élèves britanniques.

Le secrétaire à l’Éducation de “Sa Majesté” se veut thatchérien en matière de réforme du calendrier scolaire. Le temps des longues vacances d’été se justifiait quand les enfants travaillaient encore dans les usines pour aider leurs parents ou participaient aux récoltes dans les campagnes. Surtout, selon lui, quand les mères restaient au logis pour s’occuper des mouflets (plutôt les grands-mères, d’ailleurs, car pour faire survivre une famille nombreuse, la mère ramenait aussi de quoi rendre supportable l’ordinaire).

Comme Vincent Peillon, mais en plus frontal, Michael Gove signale aux parents et enseignants qu’ils placent leur confort devant l’intérêt des élèves.
Au Royaume-Uni, les vacances scolaires d’été sont encore de six semaines, sauf dans certaines écoles publiques ou privées (public schools) ayant eu la latitude pour les raccourcir.

« Nous ne pouvons nous permettre encore un système éducatif essentiellement mis au point lors du dix-neuvième siècle, » a-t-il estimé. Il avait auparavant suggéré que la durée quotidienne scolaire pourrait s’étendre de 07 h 30 à 15 h 30 pour tant favoriser l’acquisition des connaissances que de permettre à davantage de parents de mener une activité professionnelle.

Selon lui, « les meilleures écoles » d’Angleterre et Cornouailles (le Pays de Galles étant autonome en matière de scolarisation) reconnaissent l’urgence d’un réaménagement du temps et du calendrier scolaires. Ce serait aussi davantage “family friendly”, a-t-il considéré.

Élevé en Écosse, à Aberdeen, il se remémore que lui et ses condisciples bénéficiaient d’un congé en octobre pour le ramassage des pommes de terre. Ce devait être vers 1977 (il est né en 1967), ce conservateur, ancien journaliste, avait été adopté par une famille travailliste, le père œuvrant en conserverie ou pêcherie, la mère étant laborantine à l’université d’Aberdeen. Boursier, il put être admis à Oxford avant d’intégrer la presse écossaise puis The Times ou la BBC.
Idéologiquement, on peut le comparer à Luc Ferry. Il a quand même poussé encore plus loin en faisant distribuer des exemplaires de la bible du roi James dans les écoles à l’occasion du quatre-centième anniversaire de sa sortie des presses.
Il a d’ailleurs approuvé l’homologation de trois écoles dirigées par des créationnistes, se mettant à dos ainsi toutes les associations laïques.

Ce mois, réunis à Liverpool, la National Union of Teachers, le plus fort syndicat enseignant d’Europe, a émis une motion de défiance le visant, lui reprochant une approche dogmatique, idéologique, très loin de réalités qu’il méconnait. La NUT a souhaité publiquement sa démission.

Mais foin de considérations politiques, quelques-unes de ses remarques semblent frappées du coin du bon sens. Les enfants issus de familles aisées s’en sortent toujours mieux que ceux provenant d’humbles milieux alors que, selon lui, en Asie, on s’attacherait peu à orienter des élèves vers des métiers manuels pour dégager une élite universitaire en triant le bon grain de l’ivraie scolaire.

Il préconise aussi l’avancement et la rémunération au mérite (au pourcentage de succès scolaire des élèves). De même, s’il plaide pour le renforcement des fondamentaux (anglais, maths, histoire centrée sur celle de la Grande-Bretagne, sciences), il est accusé de négliger les disciplines comme le Design and Technology, lesquelles se fondent principalement sur des travaux pratiques. Il a été de ce fait critiqué fortement par Sir James Dyson qui verrait bien des écoliers désosser ses aspirateurs et appareils ménagers.

La NUT voudrait que les enseignantes et professeurs ne puissent faire plus de 20 heures de cours hebdomadaires. Michael Gove plaide pour des heures supplémentaires.

Les congés scolaires scindent actuellement en Angleterre et Cornouailles les 190 jours annuels travaillés. Outre les vacances d’été (six semaines en général), les élèves sont en vacances deux semaines pour les fêtes de fin d’année et la période de Pâques, avec trois autres coupures d’une semaine en octobre, février, mai. La journée se repartit en cours sur sept heures entrecoupées de récréations. Quelques écoles assurent huit heures de cours quotidiens.

Question crédibilité, Vincent Peillon présente au moins le mérite d’avoir enseigné, ce qui n’est pas le cas de Michael Gove. Par ailleurs, la réussite scolaire à Hong-Kong ou Singapour ne tient pas tout à fait à la seule durée de la journée scolaire.

 

 

 

Auteur/autrice : Jef Tombeur

Longtemps "jack of all trades", toujours grand voyageur. Réside principalement à Paris (Xe), fréquemment ailleurs (à présent, en Europe seulement). A pratiqué le journalisme plus de sept lustres (toutes périodicités, tous postes en presse écrite), la traduction (ang.>fr. ; presse, littérature, docs techs), le transport routier (intl. et France), l'enseignement (typo, PAO, journalisme)... Congru en typo, féru d'orthotypographie. Blague favorite : – et on t'a dit que c'était drôle ? Eh bien, on t'aura menti !