Duch, le maître des forges de l’enfer…

 

La proposition de loi pénalisant toute négation de génocide dont celui des Arméniens en 1915 a été rejetée par le Sénat traduisant la divergence des opinions à ce propos. Mais il est des génocides pour lesquels toute circonstance atténuante est irrecevable tel par exemple celui perpétré au Cambodge par les Khmers rouges sous le régime de Pol Pot entre 1975 et 1979.

Le film documentaire de Rithy Panh, Duch, le maître des forges de l’enfer s’apparente à une sorte de confessions auxquelles se livre Duch, cet ancien professeur de math avant de devenir chef du S21, centre d’extermination des khmers rouges, machine macabre de mort. Malgré cette chance offerte au bourreau de pouvoir s’exprimer en portant à l’écran sa rencontre avec le cinéaste, histoire quelque part de plaider sa cause, le tortionnaire loquace très cartésien ne peut que nous glacer attablé qu’il est au milieu de ses documents.

Filmé en plan serré laissant transparaître ses yeux larmoyants et ses dents jaunies, son rire cynique nous blesse et vouant à un échec cuisant toute ses multiples tentatives de justifications reposant parfois sur son capital littéraire dont des vers de Balzac, d’Alfred de Vigny.

Un perfectionniste à la très haute opinion de sa personne, qui tente de se défausser sur les autres alors qu’il s’avère incarner bien plus qu’un simple rouage d’une administration barbare. Un perfectionniste victime aussi du matraquage idéologique qui l’animera d’un profond mépris de ceux qu’il s’évertuera sans vergogne à transformer en zombie avant de réduire en poussière. Des déchets. Film très dur qui se termine d’une manière particulièrement choquante mais qui mérite d’être vu. Rithy Panh le rescapé, malgré la perte des siens a su élégamment pardonner…

Aujourd’hui à Phnom Penh le procès des khmers rouges fait revivre cette terrible tragédie dont les passeurs de mémoire ont été décimés. Duch, le maître des forges de l’enfer écope de 35ans de prison mais a fait appel et c’est cloîtré dans sa cellule, lisant Stéphane Hessel, et priant Dieu qu’il attend le verdict prévu pour le 3 février. Foncièrement attachée à la vie, celle-là même qu’il a ôtée de la manière la plus brutale à  d’innombrables malheureux.

 

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