Rama Yade visée par une plainte à Colombes

Trois électeurs proches du Parti Socialiste ont porté plainte contre Rama Yade à Colombes. Pour faux et usage de faux. Pas de cils ni de marteaux, évidemment, mais du bail de son appartement dans la localité, entièrement vide, selon l’élue minoritaire de Colombes, « à la suite d’un dégât des eaux ». Une défense qui prend l’eau.

Franchement, ce n’est pas très malin. Propulsée par Nicolas Sarkozy, ce qui lui a permis de bénéficier d’une notoriété plus que certaine, Rama Yade ne traînait pour gamelles et casseroles que quelques petites déclarations mal calibrées. Mais elle tourne à l’Éric Woerth au petit pied avec ses dénégations, semblerait-il, au sujet de sa résidence effective à Colombes.

Dans un premier temps, il avait été allégué qu’elle ne vivait qu’à Paris et sa radiation des listes électorales de sa commune d’adoption avait été de ce fait rendue effective.
Elle a voulu répliquer.
Mais plutôt maladroitement, selon toutes apparences.

Dans un premier temps, elle obtient, lundi dernier, qu’un juge d’instance d’Asnières se déplace à son domicile de Colombes. Le trois-pièces est vide. En raison d’un dégât des eaux, rétorque-t-elle. Avec double de la déclaration d’assurance IARD à l’appui ? On ne sait.

Là, elle se retrouve avec une plainte au parquet de Nanterre pour faux et tentative d’escroquerie au jugement. Un truc à se faire décréter inéligible. Selon les plaignants, proches du PS, le bail qu’elle aurait produit serait un faux. Le bail daté du 7 décembre devant la justice aurait bénéficié d’un rajout de date et il aurait concerné, peut-être, le local de la permanence de Rama Yade à Colombes et non l’appartement en question. En fait, ce n’est guère clair, mais le contrat de location présenté au juge n’aurait plus laissé apparaître ni l’adresse parisienne, ni celle de la permanence locale. Tipex serait passé par là ? Me Pierre Degoul, avocat des plaignants, assure que la copie du contrat de location présenté au juge, le 17 janvier, était un document « tronqué ».

Au Parisien, elle avait clairement déclaré : « cet appartement existe bel est bien ». Mais Pierre Degoul relevait, « pas de lit, pas un meuble, pas de téléphone, il n’y a rien, c’est un domicile de pure complaisance. ». Rama Yade réplique que cet appartement lui coûtait « très cher ». Il y aurait eu un dégât des eaux, « donc des travaux en cours ». Vous l’avez vue ? « Non, jamais, » réplique un voisin. Tiens, elle aurait dû demander un témoignage à Gaymard (750 m² de logement de fonction), l’ancien ministre UMP démissionnaire. Et à Florence Woerth, tant qu’à faire…

Si les choses se gâtent, Borloo, toujours avocat, assurera-t-il sa défense ? Déjà auprès de Bercy, puisqu’elle ne payait pas d’impôts locaux à Colombes depuis deux ans tout en étant censée y résider. Dans une récente tribune du Monde, elle écrivait : « ce n’est pas de la politique que les Français sont lassés, mais des politiques ». Pas mal vu. Elle dénonçait « les femmes jetées en pâture dans des circonscriptions ingagnables au nom d’une fausse parité. ». Pour conclure que des édiles des Hauts-de-Seine « dont le sort a pourtant déjà été tranché par le suffrage universel, la justice ou les deux, se lancent, avec l’énergie des désespérés, dans des manoeuvres délétères et autres stratégies du pire. ». Imprudent.

On retiendra ce qu’elle disait d’un footballeur de l’OM, Brandao : « Il y a  le droit. Il est difficile de se prononcer avant que la justice ait tranché. Et il y a la morale… ». Là, à défaut de morale, c’est d’un moral d’acier dont elle risque d’avoir besoin. Et du soutien réitéré de Nicolas Bedos.

Se déclarant toujours partie intégrante « de la majorité présidentielle », Rama Yade joue sur beaucoup de tableaux. Elle aurait peut-être gagné à en accrocher quelques-un dans son appartement de Colombes.

Pas convaincante 

Après avoir squatté un ouvrage de Jean-Michel Muglioni pour écrire à la va-vite son Plaidoyer pour une instruction publique, la voilà qui semble priver de logement une famille de Colombes. Car finalement, ce trois-pièces, elle aurait sans doute pu le loger rapidement en y conviant des gens qui se retrouvent à la rue, ou à dormir dans une voiture. Ah, peut-être que non. Colombes est, après Nanterre, la seconde ville du département pour le nombre des logements sociaux. Mais avec près de 30 000 demandes de logement ou de relogement.

Mais n’en rajoutons pas sur une sinistrée, victime de fuites d’eau ayant ravagé son domicile fixe. Au conseil municipal, elle s’était penchée sur le sort des habitants de l’île Marante (300 logements détruits, tous les résidents relogés, selon un autre conseiller municipal).
Pour elle, « le logement social n’est pas une fin en soi. ».
Peut-être avait-elle pensé « en soie » ? Celle dont elle se promet de couvrir les murs du fameux appartement après la fin des travaux ? Eh, il conviendrait peut-être d’arrêter les frais, non ?

En tout cas, lundi 23 janvier, la justice a pris sa décision : Rama Yade ne sera pas réinscrite sur les listes électorales à Colombes. Elle peut cependant se présenter aux législatives. Elle peut se pourvoir en cassation ou choisir de s’inscrire dans une autre ville (et circonscription). Va-t-elle se parachuter dans les Vosges, la Haute-Marne, la Picardie ? Allez savoir…
Du coup, la charmante enfant se surprend à fredonner « Rama-Bayrou, Rama-Bayrou, Bayrou, Bayrou, Rama-Bayrou » sur l’air des Haré Krishna.

Elle s’est confiée au Figaro : « Bayrou, pourquoi pas ? ». Elle réfléchit.

« Avec Bayrou, nous avons des points communs, la posture d’indépendance, » a-t-elle constaté… Financière, sûrement… Mais elle hésite, car : « On ne sait pas s’il va gouverner avec la gauche ou la droite. Il faut clarifier ce point. ». Ou le contraire (la gauche ou la droite va-t-elle gouverner avec Bayrou ?). Il paraîtrait que Nicolas Sarkozy l’aurait lâchée en rase campagne, avec tout juste une nuisette, dans le froid. Donc : « Je ne peux pas soutenir un candidat qui soutiendrait les méthodes que j’ai rencontrées dans les Hauts-de-Seine. ».
Y sévirait une « voyoucratie ». Elle y constate l’existence « d’un système UMPS ». Une véritable attaque frontale. Que dans le Neuf-Deux, la voyoucratie ? Elle a passé trop peu de temps au gouvernement pour se rendre compte de rien, faut-il croire. Daniel Rondeau lui dit merci, il a quitté son ambassade de Malte pour la remplacer à l’Unesco. Alors qu’elle ne siège même plus dans un comité bidule quelconque. Encore quelque mois de purgatoire et on la retrouvera à la tête de la commission camouflage chez Chasse, pêche et traditions.
  

Auteur/autrice : Jef Tombeur

Longtemps "jack of all trades", toujours grand voyageur. Réside principalement à Paris (Xe), fréquemment ailleurs (à présent, en Europe seulement). A pratiqué le journalisme plus de sept lustres (toutes périodicités, tous postes en presse écrite), la traduction (ang.>fr. ; presse, littérature, docs techs), le transport routier (intl. et France), l'enseignement (typo, PAO, journalisme)... Congru en typo, féru d'orthotypographie. Blague favorite : – et on t'a dit que c'était drôle ? Eh bien, on t'aura menti !

3 réflexions sur « Rama Yade visée par une plainte à Colombes »

  1. Vous vous rappelez la visite de Rama Yade à des squatteurs expulsés en Seine-Saint-Denis ? À Aubervilliers ? Comme c’était touchant.
    À l’époque, elle s’était concertée avec le député-maire UMP d’Asnières, Manuel Aeschlimann.
    À présent, elle veut se présenter contre lui à la députation.
    Elle devrait plutôt tenter sa chance à Compiègne et se faire héberger dans les bâtiments de l’hippodrome.

  2. Une autre bonne de Rama Yade. Pour soutenir le maire UMP d’Argenteuil, elle avait justifié le recours à un produit en aérosol, le Malodore, pour éloigner les SDF. Là, dans un premier temps, elle déclarait :
    « [i]Il faut tout tenter dans une ville, il faut essayer[/i] ».
    Deux jours plus tard, elle se rétractait.
    Auparavant, c’était « parce que noire » que ses adversaires socialistes de Colombes la malmenaient. Et aussi femme, et aussi quoi, au juste ?

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