Quand un enfant se donne « la mort » de Boris Cyrulnik

     Un nouveau suicide chez un enfant de 11 ans m’interpelle à nouveau sur ce sujet douloureux et dont le tabou commence enfin à tomber.

Regardez d’abord cet extrait

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Sur fond d’actualités, je suis à la fois ravi et peiné que ce livre traitant du suicide chez l’enfant paraisse.

     Ravi, parce qu’il n’y a pas encore si longtemps, j’ai maintenu face à un psychologue qu’un enfant pouvait avoir des pensées suicidaires et passer à l’acte dans un appel au secours de son mal-être. Celui-ci me rétorquait fermement que « compte tenu de l’immaturité du psychisme de l’enfant, l’enfant pouvait ressentir la tristesse mais que la pulsion suicidaire était inexistante chez l’enfant, au pire elle pouvait être compensée par une dépression sévère mais jamais par une autolyse ». Forcément cambrés sur nos certitudes, moi en tant que néophyte, lui en tant que professionnel, vous vous doutez bien que les échanges étaient tendus à ce sujet.

     Et peiné car cet ouvrage confirme bien mes propos voire leur donne du poids. En effet, le suicide volontaire chez l’enfant existe bel et bien, mais ce qui est le plus triste il serait sous-estimé…

     Il est impossible d’imaginer le désastre familial d’un tel évènement quel que soit le membre de la famille concerné. La culpabilisation des proches, des amis, des professeurs…

     Cela me rappelle ma série de trois articles sur les souffrances constatées à l’école, complétée par l’étude récente où 10% de collégiens se sentiraient victimes de persécutions. Certes l’ouvrage nous annonce que les contextes majoritaires sont les situations de séparation, de divorce, de violences conjugales, mais n’oublions pas les causes diverses.

 

      Ce triste bilan, nous ramène à une réalité : l’enfant, bien qu’immature sur la gestion de la vie en général, est bien doté d’un psychisme extrêmement fragile et qu’il est sujet tout comme un adulte à des dépressions, des angoisses et ressent les événements de la société. Peut être d’une manière différentes, mais la société les inquiètes, les comportements de société leur font peur. La preuve :

 

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      Notez la clairvoyance de ces enfants. Nous sommes loin encore des suicides bien sûr. Mais il faut reconnaître que l’actualité les interpelle. D’ailleurs en tant qu’adultes, posons nous un instant…fermons les yeux et replongeons nous dans les souvenirs brumeux de notre enfance…soyons honnêtes envers nous-mêmes…n’ya t’il pas eu des moments où entre enfants on se racontait des histoires à propos de ce qu’on voyait à la télé, aux infos, dans la rue ?

     N’avons-nous jamais eu durant notre enfance un éclair de volonté « d’en finir » avec nos ennuis et de chercher une échappatoire définitive ?

 

     Pourquoi cette pensée est devenue tabou à l’âge adulte ? Peut être parce que l’on considère que tant qu’il ne manifeste aucun signe manifeste de comportement anormal, l’enfant est de facto heureux, insouciant et sans problèmes. Peut-être que l’adulte veut conserver l’idée que dans la vie il y aurait une époque d’insouciance. Peut-être aussi un mécanisme de défense psychologique pour nier que l’on a eu des pensées noires qui mèneraient à l’irréparable.

     Pourtant cet enfant de 11 ans, a été apparemment décrit comme sans histoires, « normal et victime d’un coup de folie ». Peut être, peut être pas. Peut être que tout simplement la réprimande de ses parents étaient peut être la goutte d’eau en trop dans le vase dans lequel coulaient les gouttes d’autres soucis secrets ?

     Beaucoup de « peut-être » au final, on ne sera jamais sûr…

 

    

Boris Cyrulnik, dans son ouvrage a su aborder ce sujet délicat. Parfois de façon crue, parfois plus poétique, il nous explique avec pédagogie comment ce que parfois on a jugé comme les conséquences du « jeu du foulard » peuvent parfois être la résultante d’un mal-être. Il n’y a pas de solutions miracles. L’auteur ne se pose pas en sauveur en ayant réponse à tout, mais il nous apporte une lueur de compréhension dans l’obscurité d’une dimension que l’on a délaissée, ou du moins évitée par peur de l’inconnu…

 

 

Une chose est sûre, la sensibilisation est la première étape pour anticiper…

 

 

4 réflexions sur « Quand un enfant se donne « la mort » de Boris Cyrulnik »

  1. A 8 ans j’ai voulu me donner « la mort » parce que j’étais rejetée dans l’école où je venais d’arriver… c’est pourquoi, maintenant que je suis enseignante, jamais je ne sous-estime la souffrance d’un enfant…

  2. Bonjour,
    Très bien, je vous êtes l’un des relais de prévention de ces actes. On le sous-estime souvent, le professeur est un acteur social auprès de l’enfant. Au delà de sa mission d’enseignement, il a un rôle prépondérant dans la santé mentale de l’enfant et l’adolescent.

    En espérant que l’ouvrage serve de sensibilisation non seulement au grand public mais aussi des professionnels encadrant des jeunes.

    Julien.

  3. Moi-même vers 7/8 ans j’ai eu des pensées suicidaires en cherchant dans la table de nuit de mes parents des médicaments à cause de ma soeur beaucoup plus âgée que moi qui voulait tout gèrer dans la maison et ma mère n’osant pas lui fermer le bec par une gifle. Heureusement que je n’ai rien trouvé ………………..et suis arrivée à + de 80 ans parce que cette soeur a fini par se marier et a mis la pagaille dans une autre famille.
    J’ai lu plusieurs ouvrages de Cyrulnik, je n’en lis plus.

  4. Bonsoir,
    En effet eleina, heureusement sinon vous ne seriez pas là avec nous sur C4N !

    Votre témoignage est important et révélateur d’une chose: c’est que la pensée suicidaire « construite » chez l’enfant n’est pas un effet de mode et qu’il a toujours existé et mis sous silence par le caractère impensable de cette situation.

    Bien entendu, il ne faut pas pour autant voir en chaque enfant un être qui a des pensées suicidaires. Il y a beaucoup d’enfants heureux heureusement.

    Julien.

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