Pour Sarkozy, les peuples méditerranéens ne sont ni « imaginatifs », ni « courageux »

"J'ai fait un rêve, c'est que les peuples de la Méditerranée du Nord et du Sud soient aussi imaginatifs et courageux que les peuples de l'Europe continentale", a déclaré vendredi à Monaco Nicolas Sarkozy, à propos de son projet d'Union méditerranéenne. Incroyable déclaration que les grands médias ont rapportée sans la relever, au contraire du blog Les mots ont un sens. Ils en ont un en effet, et quel est-il en l'occurrence : que les peuples méditerranéens soient aussi imaginatifs et courageux que ceux de l'Europe continentale est un rêve. La réalité est donc qu'ils n'ont aucune imagination, autant dire qu'ils sont stupides et bornés, et qu'ils sont constitués de lâches. […/…]


Comment expliquer cette phrase ? "Après tout réconcilier rive Nord et Sud ne devrait pas être une tâche plus extravagante que celle qui a consisté à réconcilier les Français et les Allemands il y a soixante ans. Ce chemin a conduit au succès, voilà l'idée pour l'Union de la Méditerranée", a poursuivi le président. Qui s'enfonce : il y a soixante ans, on était en 1948, trois ans après la seconde guerre mondiale, elle-même suivant la première. La France et l'Allemagne venaient de se déchirer dans deux conflits ayant causé la mort, respectivement, de 2 millions de personnes côté allemand et 1,3 millions côté français, pour "la grande guerre", et de 7,06 millions en Allemagne et 541 000 en France pour la seconde. Que l'on sache, les peuples méditerranéens du nord et du sud ne sont pas absolument pas dans un cas de figure comparable.

Ou alors le président parle-t-il des séquelles de la guerre d'Algérie et de ses 400 000 victimes algériennes (estimation minimale) ? Mais dans ce cas, l'idiotie et la lâcheté seraient partagées par les peuples français et algériens. Les Algériens, parce qu'ils ne sont pas capables de pardonner les exactions françaises (par exemple la pratique systématique de la torture par l'armée) et de reconnaître le "rôle positif de la colonisation" (sic). Quant à nos compatriotes, ils se seraient montrés imaginatifs et courageux pour enterrer la hache de guerre avec l'Allemagne, mais feraient preuve de bêtise et de couardise, incapables de se réconcilier avec leurs anciens colons d'Afrique du Nord.

Accordons ce dernier point à Sarkozy, appliqué à lui-même : il n'a fait preuve ni d'imagination, ni de courage, en draguant ouvertement l'électorat raciste de Le Pen et en stigmatisant les immigrés avec constance. Souvenons-nous qu'il a présenté, durant la campagne électorale, les musulmans comme une communauté d'égorgeurs de moutons, ou qu'il a déclaré : "Qui ne voit qu'il y a un lien évident entre la politique d'immigration non maîtrisée depuis 30 ou 40 ans et l'explosion sociale dans nos quartiers ? Ça crève les yeux qu'il y a une liaison entre les deux. Si on ne peut même pas dire que dans nos quartiers il y a une population récemment française et que le nombre de cette population a créé des problèmes d'intégration qui font que le pacte républicain menace d'exploser, si on ne peut même pas dire cela, il y a aucune chance qu'on résolve le problème". Ainsi stigmatisés comme délinquants, comment les Algériens ou les Français d'origine algérienne ne se sentiraient-ils pas visés, eux qui forment le plus important contingent d'immigrés ou de population d'origine immigrée sur le territoire français ?

Bref, Sarkozy se prend pour Martin Luther King, avec son "J'ai fait un rêve" qui plagie le célèbre "I have a dream" du pasteur américain, mais le discours qui suit est d'une rare stupidité ! Et il est vraiment gonflé d'en appeler implicitement à la mémoire du militant de la fraternité entre blancs et noirs, lui qui n'a de cesse de cultiver le rejet de l'autre, à travers son abjecte politique d'immigration choisie, ses quotas d'expulsés et la suspicion qu'il entretient constamment à l'encontre des populations d'une autre origine ethnique que blanche.

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