Ce lundi 21 février 2011, j’ai vécu une situation rocambolesque qui ne pourra être illustrée par aucune photo significative pour des raisons que vous comprendrez en allant plus loin dans la lecture.
Pour aider à régler ses factures d’électricité un ami victime d’un empêchement, je me rend à une agence d’AES Sonel située au quartier de la Cité de Palmiers à Douala. AES Sonel est la compagnie nationale d’électricité, filiale de la firme américaine AES Sirocco . Ces factures ont été adressées a mon ami le 28 janvier et la date limite de paiement, fixée le vendredi 18 février, est déjà dépassée. Il est passé pendant quatre jours à l’agence pour s’en acquitter mais en vain.
Du fait des graves perturbations liées à leur réseau informatique, les agences n’arrivent pas à traiter les factures. AES Sonel dispose d’un réseau informatique de transmission de données vers un serveur principal où elles sont centralisées et traitées en temps réel. Ce procédé, qui permet de payer ses factures dans n’importe quelle agence du pays, fut une véritable innovation quand elle fut mise sur pied. Mais les défaillances du système ont vite fait déchanter les usagers.
Dès le matin, des centaines d’usagers s’agglutinent devant l’agence. La bonne humeur ne caractérise pas l’ambiance qui y règne. Deux des quatre guichets de paiement ne s’ouvrent qu’à huit heures et quart. Très vite, il s’avère qu’une seule est en état de fonctionner.
Quand vient mon tour de régler les factures, une perturbation du réseau intervient. Les usagers plongent dans le désarroi. Des plaintes se font entendre. Des mères de famille racontent le calvaire qu’elles vivent depuis deux semaines où, à plusieurs reprises, elles sont venues et reparties sans s’être acquittées de leurs factures.
Les risques du métier
L’idée de réaliser une enquête sur les causes et les conséquences des perturbations du réseau informatique de la société me vient à l’esprit. J’entreprends alors de faire quelques photos pour illustrer mon article. Et je tiens surtout à immortaliser l’image contrastée de trois mères assises sur une banquette, l’air dépité par leur supplice qui ne semble pas prêt de s’achever, et au dessus de leurs têtes, accroche au mur un panneau publicitaire ou le visage radieux d’une belle jeune fille côtoie un texte qui dit en partie :
Engagements CLIENT SASTIFAIT Réduction du temps d’attente
Plus d’écoute, plus de respect.
Malgré ma volonté d’agir discrètement, ces femmes se rendent compte que je les ai photographié à leur insu et se mettent dans une vive colère. Elles me soupçonnent de vouloir user de leurs images pour des pratiques de sorcellerie et menacent même de casser mon appareil. Plusieurs autres usagers me prennent à parti et je me retrouve pratiquement seul contre tous. Sous la pression du nombre, je fais profil bas et je supprime le cliché. L’heure n’est surtout pas à monter sur ses grands chevaux en évoquant le droit du public à l’information, la liberté de la presse -encore que je ne sois pas un journaliste professionnel, ou le droit de prendre des photos sur un lieu public y compris la salle d’accueil des clients d’une compagnie privée.
Un agent de sécurité m’amène chez le chef d agence et m’accuse de vouloir saboter la société d’électricité. Je garde le profil bas tout en rappelant à certains de mes contempteurs des notions basiques de droit telles l’espace public et la liberté de relater des faits. Pour regagner les bonnes grâces de femmes en furie, j’essaie, avec un certain succès, d’établir une ambiance de bonne humeur en les disant que j’écris des articles pour gagner assez d argent afin payer la dot de leur fille que j épouserai. En fin de compte l’agent de sécurité prend mon parti pour me protéger des dernières personnes encore en colère.
C’est soulagé que je ressors de l’agence avec mon téléphone mobile en un seul morceau. Il faut dire que je craignais bien moins pour mon intégrité physique que pour cet appareil, outil de travail indispensable, qui me sert à la fois d’appareil photo, de camera vidéo, de dictaphone et de modem.
Du journalisme stipendié
Chaque après-midi du dimanche, la compagnie d’électricité s’offre une heure et demi d’antenne radiophonique pour faire sa communication sur Equinoxe Radio , la plus écoutée de Douala. L’émission, présentée par l’un de ses journalistes phares, fait pourtant une entorse flagrante au principe déontologique qui proscrit à tout journaliste de signer de son nom des articles de réclames commerciales. Au regard de l’enthousiasme que met la rédaction de cette Radio à produire ce programme, qu’il me soit permis de les soupçonner de violer un second principe qui interdit au journaliste de toucher de l’argent d’une entreprise privée où sa qualité de journaliste, ses influences, ses relations seraient susceptibles d’être exploitées.
Ce media fait pourtant partie du même groupe que le quotidien indépendant La Nouvelle Expression qui fut pourtant, au cours des années 90, un acteur majeur dans les combats pour la liberté de la presse, le droit à l’information mais aussi pour la démocratie. Au regard de la profonde crise de valeur que traverse la presse camerounaise, le journalisme citoyen peut présenter une alternative crédible pour la bonne information des Camerounais.
quel dommage de ne pas pouvoir lire cet article en entier, toutes les lignes sont tronquées !!!
ah, du social, du vivant, de l’humain, du vécu ! Allez, des étoiles !