Gaffe du service de presse de l’ambassade de France en Grèce ? Selon la revue de presse diffusée ce jour à Athènes, dans d’autres pays européens que la Grèce, le rapport détenus/gardiens de prison « est souvent de l’ordre d’un pour deux, comme par exemple en France, qui compte 29 000 gardiens pour 64 000 détenus ». Ah bon ? Mais qu’en est-il exactement ? Difficile de le dire avec certitude…

La surpopulation carcérale est un phénomène quasi général en Europe. Mais particulièrement crucial en Grèce où, selon Ta Néa, près de 130 000 prisonnières et prisonniers se retrouvent dans des établissements prévus pour 9 000 personnes. Tandis que selon Kathimérini, un gardien de prison grec peut avoir sous sa garde de 150 à 450 détenus.
Fort judicieusement, le service de presse et de communication de l’ambassade de France à Athènes a placé ces informations dans un contexte européen. En indiquant que, par exemple en France, le rapport numérique entre gardiens et détenus était de l’ordre d’un sur deux.

Évidemment, il y a détenu·e et détenu·e puisque l’un·e finira peut-être en régime de semi-liberté, ne rentrant à la prison que le soir. Il y a aussi local et local, et si on peut ajouter un lit dans une cellule, rajouter un bureau dans le poste des gardiens n’est pas toujours facile. En sus, pour la durée de sa peine, le détenu reste quasi en permanence tandis que le gardien a des horaires de présence plus restreint et dispose souvent de beaucoup davantage de congés que le détenus de permissions.

C’est un peu comme la cabine de pilotage d’un hélicoptère. Il n’y aura sans doute qu’un pilote, mais il en faudra au moins deux pour assurer un service quotidien, par rotation de personnel.

N’empêche, on se demande si l’ambassade n’a pas rapporté le total des fonctionnaires de l’administration pénitentiaire (du ministère, des directions, des syndicats, et toutes catégories confondues, gardiennes et infirmiers, soignantes, surveillants, &c.) au nombre des détenus.

J’ai cherché à comprendre, mais les chiffres manquent. Toujours est-il qu’à l’ancienne maison d’arrêt de Rodez, celle de la rue Mazenq, selon La Dépêche, l’effectif de surveillance était de 41 gardiens pour 55 détenus. Celle de Druelle, qui la remplace, comptera 60 gardiens pour 100 détenus. C’est sans compter les médecins, dentistes, assistants sociaux et autres  personnels.

Si les trois-huits (sur 24 heures) sont observés, cela fait en permanence une vingtaine de gardiens (hors périodes de congés, hebdomadaires ou prolongés), soit un pour cinq détenus.

En fait, en ce mois de juillet, selon d’autres sources, il n’y aurait pas 64 000 détenus, mais plus de 81 100 dans les maisons d’arrêt et les centrales françaises. Pour à peine plus de 57 300 places.

En 2009, pour Lyon Capitale, Jean-Michel Deboille, un surveillant délégué CGT, indiquait que l’organigramme de Lyon-Corbas prévoyait « 208 surveillants, ce qui fait un surveillant pour 90 détenus » (ils étaient alors 450, puis 690, nombre officiel de capacité, puis 900). Selon le délégué, un gardien ne devrait pas gérer plus de 65 détenus. Mais le cinquième de l’effectif de surveillance se trouvait en arrêt maladie.

En fait, il semble qu’un gardien fasse 44 heures sur cinq demi-journées.

Le ministère de la Justice français faisait état (janvier 2013) d’un effectif de 35 670 agents, dont 26 329 personnels de surveillance (plus les personnels des services pénitentiaires insertion et probation). Pour près de 68 000 (juin dernier) personnes détenues.

Mais ce que cela signifie au quotidien (allez, mettons, un mardi, jour de moindres visites de proches à surveiller au parloir), bien difficile de le cerner. Surpopulation carcérale, certes, sous-population de surveillantes et surveillants ? Allez savoir.

De temps à autre, on dénonce que l’Éducation nationale perd des profs, si ce n’est dans la nature, du moins dans ses statistiques. Là, on ne sait trop non plus ce que cela signifie très concrètement. D’autant qu’on a l’impression que les chiffres syndicaux divergent de ceux de la chancellerie. En juin dernier, l’Ufap-Unsa Justice faisait état, dans Ouest-France, de 25 000 agents au total (soit quand même un bon millier de moins que les chiffres de la chancellerie).