C'est donc dans la France de 2008, et non au fin fond de l'Afghanistan qu'est intervenu cette étrange précepte d'un autre âge voire d'une autre religion : la femme se marie vierge ou l'homme, et la société via sa justice, la répudie. Je n'ai pu savoir si la Grand Place de Lille a ensuite été la scène de lapidation exutoire mais cela ne saurait peut être tarder…

Volonté de quelque magistrat d'un coup de pub carriériste, interprétation intégriste ou inconscience coupable toujours est il que voilà au pays des droits de l'homme (mais visiblement moins de la femme) et depuis peu de la parité un sacré camouflet. Non pas que je n'ai jamais trop considéré que nous ayons à nous distinguer vraiment des républiques bananieres par bien des pratiques, non. Mais je nous pensais benoîtement dans un Etat de droit garant. Oui mais voilà, le droit ne garantit plus, il s'émancipe ou se ringardise, c'est selon.

Les réactions hostiles n'ont heureusement pas manquées depuis les mouvements féministes aux spécialistes légalistes en passant par les politiques de tous bords. Avec une angoisse, la jurisprudence annoncée. Notons que cette jurisprudence dans un contexte de parité exacerbée n'est pas dénuée de cocasseries. Car ce que l'on exige de la femme doit également l'être auprès de l'homme. Messieurs, à vos carnets de… virginité, à vos costumes blancs immaculés !

Alors que la pression religieuse d'un Islam disons peu modéré conduit déjà de nombreuses jeunes françaises à se faire opérer pour retrouver l'hymen originel, le jugement rompt, si j'ose dire, avec le principe de laïcité républicain. Si la femme refuse de porter le voile, pourra t'on également considérer qu'"il y a eu erreur sur la personne, ou sur des qualités essentielles de la personne", ou si elle refuse de se convertir, ou si elle souhaite travailler… et les catholiques ne reviendront ils pas non plus à la charge au nom de la … parité des religions ?

Est ce donc du domaine du droit que d'investir le monde des croyances, des cultures, des pratiques et surtout d'en valider certaines ?
Peut être mais dans ce cas je propose que nous élargissions le débat. Toute femme ne pourra plus désormais en France se marier qu'à condition d'apporter une dote d'un million d'euros. Dans le cas contraire, je dénoncerai l'union pour "erreur sur la personne, ou sur des qualités essentielles de la personne". je précise que je suis célibataire, mesdames si vous répondez au critère, j'habite impasse de la… Mairie, c'est dire !

Dans le concert de critiques, il faut saluer la prise de position originale de notre Garde des Sceaux dont le temps passant nous confirme surtout qu'elle se garde elle même. "La justice est là pour protéger. Le fait d'annuler un mariage est aussi un moyen de protéger la personne qui souhaite peut-être se défaire du mariage, parce que je pense que cette jeune fille (…) a souhaité également, sans doute, se séparer assez rapidement". Peut-être, sans doute… quelle analyse pertinente que voilà, digne d'une Madame Irma.

Mais pouvait on réellement attendre autre chose qu'une prise de positon incongrue de la part de celle qui peine si maladroitement à mener la réforme de la constitution autant improbable qu'inutile ?
En affirmant "on n'est pas à l'abri de circonstances particulières, notamment dans un contexte lié au terrorisme" au sujet de l'article 16 de la V° République, elle a élevé le débat à des niveaux insoupçonnés de négligence et d'amateurisme. Pour mémoire, l'article 16 stipule que "Lorsque les institutions de la République, l'indépendance de la Nation, l'intégrité de son territoire ou l'exécution de ses engagements internationaux sont menacées d'une manière grave et immédiate et que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels est interrompu, le Président de la République prend les mesures exigées par ces circonstances, après consultation officielle du Premier Ministre, des Présidents des assemblées ainsi que du Conseil Constitutionnel."


C'est un tantinet plus complexe à mettre en oeuvre que si une bombe explose comme cela s'est produit déjà maintes fois.
La dernière représentante de la période Bling Bling ne parvient plus à cacher derrière ses apparences luxueuses et sophistiquées ses limites. Voilà qui la rendra plus fragile et peut être plus humaine mais, en ces temps difficiles pour son mentor, voilà qui la met également en danger car ses soutiens se comptent sur "les doigts du baron Empain" aurait dit Desproges.

En même temps, la Constitution est un texte fondateur qu'on ne peut manier avec tant de légèreté et de désinvolture sans risquer de s'exposer à la critique, même à droite, même radicale comme ce "Elle est nulle" d'Edouard Balladur pourtant Président du Comité pour la réforme de la Constitution.

Comme quoi, quelque part, il y a une justice !