Libye : mission de médiation pour BHL

Le mouvement ukrainien Femen a manifesté devant la résidence, place des Vosges, de Domique Strauss-Kahn. Fort bien. Quelques numéros plus loin, on les attend devant celle de Bernard-Henri Lévy : qu’elles le sortent de son confort et l’expédient jouer le médiateur en Libye.

« On lutte contre les fous comme DSK, » disent les femmes de Femen, le groupe féministe ukrainien qui disent vouloir s’en prendre à la corruption en Europe. Elles ont raté une autre cible : BHL, le voisin de DSK. C’est quand même bien lui qui a salué le soulèvement armé en Libye fomenté par ses amis de Benghazi avec l’appui des services secrets de divers pays, non ? Alors, qu’il use de son entregent et de son argent pour rétablir au moins un semblant d’équité en Libye.

Après avoir, pour la plupart, repris et amplifié les haussements de menton de Bernard-Henri Lévy soutenant le CNT en Libye, la plupart des titres de la presse internationale rendent compte des réalités. Massacres de civils, destruction des infrastructures, et terreur. Une terreur plus pas beaucoup, peut-être) indiscriminée que celle que faisait régner le clan Kadhafi. Après avoir bêlé les slogans de BHL, voici que Mediapart laisse la parole à un envoyé spécial à Tripoli. « Un cocktail explosif », titre pudiquement on ne sait quel (ou quelle) secrétaire de rédaction.

Mais il faut lire aussi le reportage de Ghaith Abdu-Adal pour The Guardian. « Same old fears ». À Tripoli, les brigades antagonistes ne se tirent pas déjà dessus massivement, mais rançonnent, et déterminent qui est pro-Kadhafi au faciès. Oh, quand ils ne sont pas des Noirs, ce sont les yeux qui les trahissent. « Le blanc de ses yeux est rouge, c’est parce que Kadhafi leur donnait des pilules pour nous combattre. ».

« Vous pouvez être arrêté à tout moment pour n’importe quelle raison ou même sans raison, » résume un médecin du quartier tripolitain d’Abu Salim. Et encore, mieux vaut habiter Abu Salim que d’autres quartiers, ou Syrte, ou Bani Walid, ou tant d’autres localités. Ennahar rapporte que la tombe de la mère de Kadhafi a été profanée à Syrte. Les os ont été brûlés. En fait, peut-être, les profanateurs cherchaient-ils des bijoux.

Voilà que The Canadian s’aperçoit que l’Otan a fait retourner la Libye au Moyen-Âge, the Dark Ages. Et que les Nations Unies s’alarment de ce que, tant Kadhafi que l’Otan, a fait amplement recours aux mercenaires. Ann Marlowe, du Wall Street Journal, préfère pointer que les « révolutionnaires » n’ont pas totalement pillé le musée national libyen de Tripoli. Enfin, juste un peu. Personne ne croit qu’Abdul Raheem al-Keeb, le nouveau Premier ministre du CNT, 61 ans, universitaire (surtout aux États-Unis et dans les Émirats), sera autre chose qu’un paravent intérimaire. Mais on peut faire semblant de le croire.

La famille des Senoussi, les descendants du roi Idris, est divisée. Le prince Hassan, petit neveu du roi, s’est trouvé un rival, Idris Ben Abdullah, qui serait le fils cadet du sixième fils du cadet du benjamin du père du roi Idris, ou quelque chose de ce genre, rapporte Gulf News.

Pour le moment, le nouveau Premier ministre reste considéré tel un représentant des puissances occidentales, « neutre » par rapport aux faits tribaux. Pour l’instant, comme le rapporte le New York Times, quand des accrochages meurtriers opposent des membres de milices rivales, on met en cause un ou des Kadhafistes infiltrés. L’ex-place Verte, à présent place des Martyrs, est bouclée et interdite d’accès. Pour la future représentation nationale, Misrata veut imposer un critère : « la priorité donnée à la libération… ». Les trois autres devant être le nombre de la population, l’extension géographique, et le poids économique. Misrata étant densément peuplée, économiquement active, et ayant chassé tout électeur potentiel de sa voisine, Tawergha, ne pourrait ainsi risquer de s’estimer sous-représentée. Pour le moment, la seule décision évidente du CNT semble d’avoir conféré au Bureau de liaison économique libyen à Varsovie le rang d’ambassade et de nommer ou confirmer dans leurs fonctions divers diplomates.

CBS rapporte que les « révolutionnaires » de Misrata et de Zintan se tirent dessus, y compris dans un hôpital de Tripoli. Abdu Raheem al-Keeb n’y peut rien. Mais BHL peut tout. Allez, les Femen d’Ukraine, sortez BHL de la place des Vosges et expédiez-le à Tripoli. Il est temps pour lui d’engranger la moisson de son succès. C’était combien la mise à prix sur la tête de Kadhafi ? Ah, 20 millions d’USD. Le CNT ne peut les régler. Eh, BHL, t’aurais pas cent balles ?

Et puis, il y a les mines, et les restes des frappes à l’uranium. Zyva, BHL, encore un effort pour être révolutionnaire. Donne ! Qui casse, paye, non ?

Auteur/autrice : Jef Tombeur

Longtemps "jack of all trades", toujours grand voyageur. Réside principalement à Paris (Xe), fréquemment ailleurs (à présent, en Europe seulement). A pratiqué le journalisme plus de sept lustres (toutes périodicités, tous postes en presse écrite), la traduction (ang.>fr. ; presse, littérature, docs techs), le transport routier (intl. et France), l'enseignement (typo, PAO, journalisme)... Congru en typo, féru d'orthotypographie. Blague favorite : – et on t'a dit que c'était drôle ? Eh bien, on t'aura menti !

2 réflexions sur « Libye : mission de médiation pour BHL »

  1. Vladimir Yakunin a définitivement mis de côté
    l’habituel langage diplomatique pour mettre
    en cause les intentions de l’Union européenne.
    [b] »L’Europe est intervenue en Libye pour des motifs
    non avoués. Ce n’était pas pour défendre la
    population, mais pour le pétrole »[/b]

  2. Mais il est fou! Oh, oui!
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