Lettre au Président de la République: L’éducation nationale est malade

Voici une touchante lettre qui circule sur la toile, qu’il faut relayer pour transmettre, informer notre société sur les boulots "bouche trou" de l’Education Nationale. Pour tous les emplois précaires perdus au milieu de fonctionnaires, et oh combien utiles, au bon fonctionnement du service public.

 

 

"Monsieur Le Président,

Merci de lire ce message,

Un petit bonheur sur une page,
Une douceur… pour l’éducation Nationale.

Je le confie à la toile,
La grande toile du progrès,
Afin qu’il tisse les voiles…
De la solidarité,
Et qu’il rayonne aux ondes…
de l’humanité.

Je suis Professeur des Écoles
Dans un petit village de l’Eure,
Trois cents âmes y demeurent,
Et vingt-six élèves à l’école…
Une classe, dite « unique »,
Mais cinq cours, dits multiples…

Dans cette école une chance,
Un p’tit morceau de bonheur,
Qui s’écrit avec ces trois lettres :
Employée de la Vie Scolaire…

Pour l’Education Nationale,
Un p’tit bonheur, c’est pas banal,
Un léger baume sur le cœur
De cette Grande Dame
Un peu… bancale !

Notre bonheur, c’est Géraldine,
En silence elle participe
A la guérison d’la Grande Dame…
Elle est… une Valeur Ajoutée
HUMAINE rentabilité,
Et c’est du bonheur… assuré !

Dès le matin, elle s’active,
C’est sur le net qu’elle s’incline
Les courriers, les notes de service,
Toutes les infos de l’inspectrice,
Et celles de l’Académie….

Mes mots notés au brouillon,
Les compte-rendu de réunion,
Tapés, imprimés, photocopiés,
Enveloppés, adressés, timbrés,
Prêts à être distribués…
Encadrés, les derniers dessins des CP,
Affichés, sinon… à quoi bon dessiner ?
Un CM vient montrer son texte sur le musée,
Elle l’aide à le recopier, à taper sur le clavier…
Afin de ne pas gêner, le travail commencé,
Un autre enfant vient finir avec elle l’exercice,
Elle explique et décortique, redonne de l’énergie…

Rangée la bibliothèque,
Notés les livres prêtés,
Elle prépare la maquette,
La une du journal scolaire…

Ah! Notre petit journal
« Magique », ils l’ont appelé
Quel travail de fourmi,
J’y passerai…….des nuits ?

Sonne la récréation, une mi-temps pour souffler,
Elle me rejoint, souriante, à la main nos deux cafés,
Quelques chaudes gorgées, entre… deux conflits à régler,
Des solutions à trouver, des mots à reformuler,
Une écorchure à soigner, une blessure à consoler….

Et puis…. c’est reparti !
Sur les chemins de la connaissance,
Vaincre ainsi sans cesse l’ignorance,
Avec labeur, effort, sérieux,
S’ouvrir l’esprit, être curieux.

Ne pas oublier l’insouciance,
De tous ces êtres en enfance,
La bonne blague !… On la mettra dans le journal,
Les bons gags, et les rires, c’est vital !

Dans les pots
Les peintures sont bien préparées,
Quatre enfants sur un chevalet,
Deux sur l’ordi pour recopier,
Les autres en dessin sur papier,

…Sans elle, jamais…
Ce ne serait si bien géré.

Le soir, coup de fil…
C’est Géraldine,
A sa voix, je perçois,
Une blessure qui abîme…
Ecoute, me dit-elle… c’est à pleurer !
Du « Pôle Emploi » j’ai reçu… un imprimé,
Dans quelques semaines, c’est marqué,
Votre contrat est terminé…
Ils me demandent ce que j’ai fait,
Pour trouver un futur emploi..

Sa voix se fêle… "J’ai..un emploi! »
Ils me demandent ce que j’ai fait,
pour me former, pour m’insérer,
Sa voix se gèle…. puis accélère: « Je… suis formée,
depuis trois ans, j’me sens utile, insérée et c’est varié,
pas bien payé, mais… j’veux rester ! »
Sa voix s’étrangle…. c’est à pleurer…

Ils me demandent mes compétences
Ce que j’ai acquis, que vais-je répondre ?
Il y a l’espace… d’UNE LIGNE
UNE LIGNE…. mais tu te rends compte !

J’ai honte, honte… il aurait fallu UNE PAGE
Au moins UNE PAGE pour répondre,
J’ai honte, honte… pour notre Grande Dame
Pour ceux qui l’ont créée, l’ont fait évoluer,
Qui a tant appris aux enfants,
Qui a tant encore à leur apprendre..

Et Géraldine ???
On n’ lui dira même pas MERCI
Bien sûr, pas de parachute doré,
Et même pas d’indemnité
Ils lui précisent… Oh!..comme ils disent
D’étudier ses droits… pour… le R.M.I.
Elle a raison… c’est à pleurer…

Alors qu’on demande chaque jour,
A nos élèves de dire « Bonjour »
De dire « Au revoir » et…. « Merci »
De s’ respecter, d’être poli
Comme vous dites, Monsieur Sarkozy…
Que vais-je dire, à la p’tite fille,
Qui l’autre jour, près de moi, s’est assise,
Et, tout fièrement, m’a dit :
« Tu sais, Maîtresse, moi, quand je serai grande,
J’irai au collège, comme mon grand frère,
J’irai au lycée, je passerai mon bac,
Et je ferai… comme Géraldine! »
Je sursaute… Mon cœur se serre…C’est à pleurer."

C.Picavet
Professeur des écoles
à l’école des Livres Magiques
Saint-Grégoire du Vièvre (Eure)

"En hommage à toutes les Géraldine, Florence, Sabrina, Laurence, Elodie,
à tous les Philippe, Sébastien, et bien d’autres qui ont valorisé
mon travail, et participé à la guérison de la Grande Dame…
qui est encore bien malade…

Je ne crois pas à la peur, je crois à la force et à la magie des mots,
Et pour garder notre bonheur, il suffirait de quelque Euros…
Quel patron, quelle entreprise, après trois ans de formation,
Jetterait son salarié, pour prendre un autre, recommencer ?
Quel jardinier, quel paysan, brûlerait sa récolte mûre, après
avoir semé, soigné ?

Je n’ai pas fumé la moquette
Je veux seulement que l’on arrête,
De prendre les gens pour des pions,
Qu’on arrête de tourner en rond !
Torpillé le « Chagrin d’école »
En mille miettes de BONHEUR !

En l’honneur de tous ces petits bonheurs..
INONDONS LE NET
les amis, les décideurs,
les chômeurs, les travailleurs,
les directeurs, les inspecteurs,
employés et professeurs,
députés, ministres,
RMIstes ou artistes,
chanteurs, compositeurs, rappeurs, slameurs,
radios, journaux, télés,

et à tous ceux qui sont…. parents… d’un enfant…
enfin à chaque être humain de ce pays
qui j’espère un jour dans sa vie,
a bénéficié d’un peu de bonheur,
de cette Valeur Ajoutée
HUMAINE rentabilité,
dans le giron de la Grande Dame.

P.S : Ironie…… A la rentrée, c’est presque sûr
Notre petite école rurale
Sera dotée d’une Valeur Matérielle Ajoutée,
Des fonds ont été débloqués,
Huit ordinateurs et un tableau interactif
Une « classe numérique »
Nous serons à la pointe du progrès ! Et pour cela, je serai
formée !
Mais, qui m’aidera à installer, et à gérer, sans Valeur
Humaine Ajoutée ?"

 Lettre transmise par une institutrice du Morbihan

 

4 réflexions sur « Lettre au Président de la République: L’éducation nationale est malade »

  1. Cette lettre est vraiment touchante !
    J’ai fais tourner votre article sur facebook, j’espère que cela ne vous dérange pas…
    Bonne soirée Fata.

  2. Comment cette magnifique lettre a-t-elle pu m’échapper ? ce n’est pas la première fois: je n’ai plus vraiment confiance dans « le fil info »…

    En tout cas, bravo pour cette lettre-poème, si authentique ! cela me rappelle le magnifique travail effectué il y a quelques années par « les aides -éducateurs », remerciés et jetés après 3 ans de bons et loyaux services: je veux ici remercier; Stéphane, Florence, Karine et Maya, la dernière venue; Stéphane et Florence avaient un don inouï pour les Arts Plastiques, Karine pour l’informatique et Maya pour le théâtre, le mime.
    Tous les petits devenus grands de l’Ecole Popincourt à Paris XI se souviennent d’elles, de leur patience, de leur joie de vivre, de tout ce qu’elles ont pu apporter.
    Toutes les instits à qui elles ont apporté leur aide précieuse ne les ont pas oubliées non plus.
    Voila des idées intelligentes qui sont parties en fumée, et des Jeunes que l’on a jeté sur le marché du travail après un investissement humain considérable: quel gâchis !!!

  3. Pour info tout de même sur l’aspect précaire de ces emplois:[url]http://www.lepartidegauche.fr/notes/833-employes-de-vie-scolaire[/url]

  4. Merci pour vos comm et pour le lien Siempre !
    cette lettre est très bien tournée, vrai et très touchante, comme toutes ses vies et emplois précaires de l’EN.
    à faire tourner absolument !
    Bonne journée 🙂

Les commentaires sont fermés.