Quel sous-fifre, assez haut placé, faire sauter ? C’est la question qui bruisse dans les couloirs du siège de BNP Paribas.
« BNP Paribas a perçu, au travers de certaines de ses filiales gestionnaires et dépositaires de certains fonds Madoff off shore, des commissions considérables, » consigne Laurent Mauduit, de Mediapart.
Damned, une filiale Woerthgate, d’Éric Woerth, pour pomper les sous de Liliane Bettencourt ? Non pas, c’est plus complexe que cela.
BNP était très impliquée dans fonds Oréades de Madoff, et tout comme UBS, savait à quoi, plus ou moins (peut-être plus que moins), s’en tenir.
« La banque a perçu des millions de dollars en échange de services qui n’ont jamais été rendus, alors qu’elle détenait des éléments, qui auraient dû l’inciter à enquêter sur Bernard L. Madoff Investment Securities, » indique un arrêt de fin janvier dernier de la cour d’appel de Paris. C’est gentiment dit. Ouvrant la voie au plaidoyer de négligence et de j’m’enfoutisme. Si BNP, sciemment, en toute connaissance de cause, avait laissé faire, ce serait beaucoup plus gênant.
Qui tient qui ?
BNP Paribas, c’est Michel Pébereau, le véritable patron de Bercy, avec Christine Lagarde pour prête-nom ou potiche. Sarkozy va-t-il sauter sur l’occasion pour le piler et s’affranchir de sa tutelle, ou faire savoir au Garde des Sceaux jusqu’où il convient (de ne pas) d’aller ? C’est un peu tout la question.
Le liquidateur de Madoff & Co Inc., Irving H. Picard, a établi que Madoff n’écrêtait que le haut de la crème du lait, laissant à des intermédiaires l’essentiel du bouchon du col de la bouteille. Jusqu’à présent, Martine et Kléber Rossillon avaient été les seuls, en France, à dénoncer BNP Paribas. Ils avaient investi dans une société basée aux îles Vierges, par l’intermédiaire du bankster gang de Pébereau. Là, des commissions rogatoires sont lancées… évidemment pas par le parquet, mais par la chambre d’instruction.
La complicité active de BNP est la clef de la poursuite contre la « banque de la Sarkozye ». Pébereau est en retrait, remplacé par Baudoin Prot. Le fonds conseillé par BNP Paribas n’était ouvert à qui pouvait débourser un million d’USD. Un idiot utile, qui a eu le bon goût de se suicider, Thierry Magon de la Villehuchet, jouait les intermédiaires entre les très puissants nantis et Madoff. Mais il les rabattait sur la banque de Pébereau. Histoire d’opacifier un peu, de masquer l’identité des vrais investisseurs, sécurisés par le fait de passer par une banque ayant pignon sur rue.
Quand cela devient un peu trop chaud, on change les statuts pour réserver l’accès au fond à d’autres banques ou sociétés financières et à des investisseurs professionnels. Vous comme moi si nous grattons un carton de la Française des Jeux, ou tentons notre chance au casino, sommes des investisseurs professionnels : qui définit la frontière entre l’amateur et le pro ?
En fait, il suffisait de signer un protocole pour se retrouver investisseur professionnel (à condition d’avoir les ressources suffisantes). Mais par là même, on reconnaissait que l’on était « en mesure d’évaluer et d’assumer les risques encourus. ». Mieux que BNP Paribas, dont c’est, théoriquement, le métier. Sauf que les richissimes gogos d’avant n’ont pas été avertis du fait qu’ils devenaient des clairvoyants.
M’est avis qu’au Premier Cercle, celui animé par Éric Woerth et d’autres, et au Fouquet’s, quelques noms d’oiseaux ont dû s’envoler et quelques portes être claquées.
En sus, x, qui pourrait être un sous-fifre de Pébereau, aurait falsifié des signatures.
Couler ou non avec Pébereau ?
Cruel dilemme pour le candidat Sarkozy, toujours président, et ses courroies de transmission. Mordre la main qui les avait nourris et qu’ils ont sans doute payé de retour (en sauvant quelques banques sans les nationaliser comme l’ont fait les Britanniques) ?
Autre question : Madoff était-il un homme de paille consentant ?
BNP Paribas a répondu à Mediapart : « BNP Paribas n’entend pas formuler d’observations sur une procédure toujours en cours d’instruction. Elle souhaite néanmoins rappeler qu’elle n’a jamais été mise en examen dans cette affaire dans laquelle la Banque s’est contentée d’exécuter des instructions données par des clients qui ont investi dans des fonds nourriciers de Madoff sur les recommandations d’un conseil financier totalement extérieur à BNP Paribas. Le juge Van Ruymbeke a diligenté des investigations pendant près de deux années et a conclu que la responsabilité pénale de BNP Paribas ne pouvait pas être mise en cause. Aujourd’hui, la Chambre de l’instruction demande au juge Van Ruymbeke de poursuivre ses investigations. BNP Paribas, simple témoin assisté dans cette procédure, attend sereinement que la justice passe. ».
Bah, question tours de passe-passe, on sait à quoi s’en tenir. BNP Paribas s’est goinfrée. Comme le relève Mediapart, qui fait état d’un clip publicitaire faisant dire à un vigneron sosie de Depardieu « ce n’est quand même pas avec notre argent que vous spéculez sur les marchés ? », BNP a su fait prendre de l’argent pour en gagner. Sarkozy va-t-il réclamer des têtes comme il l’avait fait pour la Société générale, suggérer un référendum sur la séparation des activités de banque de dépôt et de banque casino, ou quoi ? On attend ! Ou plutôt, on peut toujours attendre…
101 plaintes de particuliers
Par ailleurs, près de 4 000 particuliers qui avaient fait confiance à BNP Personal Finance se sont retrouvés avec des casques rapidement trop lourds à porter. Ils avaient souscrit un prêt Helmet Immo pour financier l’achat d’un appartement aux revenus défiscalisés dans le cadre du dispositif Scellier. Les démarcheurs allaient tout prendre en charge : le financement, la gestion de la location, et le placement des loyers. Le prêt, souscrit en francs suisses mais remboursable en euros, semblait avantageux et BNP PPF vantait « l’un des refinancements les plus bas du marché et durablement stable. ».
Cela partait du principe que l’euro restait stable face au franc suisse, voire allait s’apprécier contre la devise helvète. Dans ce dernier cas, la banque était gagnante, mais les emprunteurs n’étaient pas lésés. Dans le cas contraire, qui s’est produit, le coût du crédit s’alourdissait de près de 74 000 euros pour un capital de 200 000.
Helmet Immo n’a plus été proposé qu’à partir de fin 2009. Les emprunteurs ont tenté de renégocier leur prêt mais se sont vus opposer qu’ils devaient s’en libérer totalement, sans frais toutefois, par anticipation, mais au montant gonflé par le renchérissement du franc suisse. Dans une quarantaine de cas, la BNP à consenti à un petit effort (de l’ordre de 10 000 euros).
Par conséquent, 101 autres ont saisi la justice. Le dispositif Scellier n’a pas été mis à profit que la BNP, Hermès Conseil, le cabinet IFP, d’autres, ont démarché les particuliers. Parfois pour leur faire acquérir des appartements dans des lotissements très peu susceptibles de générer une demande de la part de locataires. Les dispositifs « pour le logement » de l’ère Sarkozy ont surtout profité aux financiers.