Des oeuvres traversent les décennies, et malgré le temps qui passe ne perde pas de leurs puissances et de l'émotion que l'on ressent en les redécouvrant.

"Le Jour se Léve" fait partie de ces longs métrages, qui illustre ce cinéma d'avant-guerre, à la fois novateur et baignant dans une atmosphère intemporelle. Dés le premier plan, Marcel Carné nous impose de regarder son film dans un état d'immense compassion pour ses personnages..

L'utilisation des flashbacks, technique novatrice à l'époque (1939), immortalisée par la suite avec "Citizen Cane" d'Orson Welles. D'ailleurs à ce titre, les premiers spectateurs furent déroutés et il fallu leur expliquer le procédé…

Le Jour se Léve, drame que l'on pourrait assimiler à une sorte de fatalité sociale, encore bien présente aujourd'hui. L'amour qui méne au désespoir, dans le Paris des "classes laborieuses", la banlieue ouvrière, la petite place, le bistrot et cet immeuble dressé comme un pic. Une véritable randonnée, entre des bouffées de bonheur intense et des rafales de tristesse. Tout le réalisme poétique du tandem Carné &Prévert s'étale à chaque plan, à chaque dialogue, a chaque effet de lumière..

Que dire de la prestation de Jean Gabin. Toutes les facettes de l'immense talent du comédien sont exploitées. Jean Gabin ne joue pas le role de François, l'ouvrier sableur, il est François ! Tour à tour attachant, malheureux ou effrayant, Jean Gabin est tout simplement magnifique, nous offrant pratiquement à chaque minute une surprise. Jules Berry (Valentin) diabolique à souhait, au sommet de son art et de son cynisme !

Marcel Carné, dans des décors somptueux d'Alexandre Trauner, ajoutant la touche crépusculaire, ou le personnagen'a aucune chance d'échapper à son destin et ses origines modestes. Le synopsis :

Un coup de feu éclate (..) et un homme, atteint au ventre, roule dans l'escalier. Bientôt la police fait irruption dans la chambre de François, l'ouvrier sableur (..) qui se souvient. Sa rencontre avec Françoise, une jeune fleuriste, qui le repousse gentiment (..) Le dresseur de chiens Valentin qui cherche a séduire Françoise (..) Clara, la maitresse de Valentinqui tente de le consoler et (..)

Arletty (Clara) nous pousse une fois encore une réplique légendaire du cinéma français :

"Est-ce que j'ai une gueule a faire l'amour avec des souvenirs".

D'ailleurs au sujet de la projection de ce film, une scéne fut censurée par le gouvernement de Vichy et depuis n'a jamais été rétablie dans les copies du film depuis. Une photo partie d'un plan qui a érté tourné et a donc fait partie de la première version du film, sorti dans les salles en 1939. Cette photo aurait été prise à l'insu de Marcel Carné.

Je vous offre ce plan, ou la charmante silhouette d'Arletty, a courroucé l'infame gouvernement de Vichy !arlettyloduca_lo.jpg