Alors que la maison de courtage américaine Peregrine (PFGBest) s’est placé en liquidation judiciaire après enquête du FBI et de l’autorité des marchés financiers, pour fraude et fausses déclarations, Transparency International diffuse un rapport sur les établissements financiers. L’organisation non gouvernementale pointe l’opacité du secteur. 

Denis Robert, le journaliste investigateur des affaires de Clearstream Banking et autres chambres de compensation financière, n’était guère un affabulateur. Non seulement la justice française a reconnu le sérieux de ses enquêtes, mais impunément, Cobus de Swardt, de Transparency International, énonce ce qu’il indiquait : « les multinationales restent une part importante du problème de la corruption. ». Visées en particulier, les banques et la bancassurance, dont les comportements non-éthiques sont dénoncés.

Sur 105 groupes analysés, tous secteurs confondus, 78 se refusent à divulguer la liste de leurs filiales, qui sont parfois des financières localisées dans des paradis fiscaux.
50 se dispensent de divulguer leurs chiffres d’affaires à l’étranger, 89 ne communiquent pas sur les taxes et impôts payés à l’étranger, et 39 (non cotés) ne publient aucune donnée financière.

Ce n’est pas trop une surprise, c’est le groupe norvégien Statoil qui communique le plus ouvertement. Mais en queue de peloton se regroupent la plupart des banques, assurances et établissements financiers. Là non plus, aucune surprise.

Cela ne tient pas qu’aux banques chinoises, les plus opaques. Pour les banques, les programmes anti-corruption doivent rester confidentiels pour être efficaces. Certes, certes… On l’a vu avec l’affaire du Libor (Barclays, RBS, autres…) qui vaut à des banquiers de démissionner et aux déposants de devoir régler à leur place de fortes amendes.

Pour ne pas laisser entrevoir leurs affaires, les banksters communiquent sur des résultats consolidés, toutes filiales étrangères confondues.

Et ils savent convaincre les décideurs politiques… Les banques présentes dans le Square Mile, la City de Londres (dont BNP Paribas et d’autres européennes) ont consacré en 2011 près de cent millions de livres sterling (env. 117 millions d’euros au cours actuel) pour des actions de groupes de pression, du lobbying. 10 Downing Street laisse sa porte largement ouverte, les lobbies du Parlement britannique sont régulièrement arpentés par les démarcheurs et conseillers.

Ils roulent pour eux-mêmes et le grand patronat. Pour Martine Orange, de Mediapart,  « le secteur financier a réussi à abaisser les impôts sur les sociétés, à bloquer les règlements européens sur la spéculation sur les matières premières, à limiter le projet de retraites publiques pour les salariés les moins payés, à enterrer les plans gouvernementaux pour instaurer une nouvelle surveillance sur les sociétés cotées. ». Ce qui vaut pour le Royaume-Uni vaut bien sûr pour Bruxelles, Strasbourg ou Paris et d’autres capitales. G8 après autres G20, relève-t-elle, quand c’est fini (de frauder, d’influer), cela recommence.

Aux États-Unis, le courtier Peregrine Financial Group fait scandale, peu après MF Global. Là, c’est plus de 200 millions de dollars de comptes de la clientèle qui restent introuvables. Le fondateur, Russell Wasendorf Senior, 64 ans, ancien trader, est dans un état grave : sa tentative de suicide ne serait donc pas totalement feinte. Peregrine spéculait surtout sur les matières premières et les devises. Plus de 200 employés vont se retrouver sur le carreau.

Dans le cas de Peregrine, la direction trafiquait les comptes, déclarant avoir 225 millions de fonds propres dans la Bancorp et en dissimulant cinq. La National Futures Association (qui régule le marché des dérivés) exigeait des communications informatisées. Russell Wassendorf a longtemps tergiversé avant de tenter de s’asphyxier dans sa limousine.

Les banksters plaident l’autorégulation mais, dans le cas de Peregrine, falsifient les comptes, dans un entre-soi. Pour MF Global, 1,6 milliard de dollars se sont évaporés… aussi de la poche des clients. Là, ce ne seraient que 200 millions d’USD, les dettes avouées en représentant la moitié. Peregrine avait aussi bien sûr des fonds au Canada, et sans doute dans d’autres pays.

On ne sait trop si Wasendorf s’est suicidé aussi « fort » que l’ancien ministre roumain Nastase, lui aussi poursuivi pour corruption (il se porte à présent comme un charme).

Mais bah, un scandale de plus ou de pire, qu’importe… Du moment qu’on sait contraindre les contribuables à accepter de couvrir, pourquoi changer des équipes qui « gagnent » ?