Selon l’adage, la dictature, c’est ferme-la, la démocratie, c’est cause toujours. Oui, mais, pas trop fort en Espagne. L’association de consommateurs Facua avait mis en ligne diverses campagnes de luttes et pétitions contre diverses décisions gouvernementales (hausses de TVA, ristourne fiscale aux fabricants de tabac, autorisation de produits bancaires « frauduleux », &c.). Du coup, l’Institut national de la consommation espagnol, sous tutelle du ministère de la Santé, exige le retrait de ces campagnes. Sinon…

L’association espagnole de consommateurs Facua pourrait perdre son statut si elle n’obtempérait pas aux injonctions de l’Instituto Nacional de Consumo. Du coup, elle serait retirée de la liste des associations de ce type.
En cause, diverses campagnes n’étant pas, selon l’Institut, « en relation directe avec les finalités d’une association de consommateurs ou d’usagers. ». Ah bon ?

« Ce n’est pas une menace, ni une intention de décréter [l’association] illégale, » a précisé l’Institut. Mais l’injonction est claire et nette et bel et bien assortie d’un avertissement pouvant conduire à la saisine d’une autorité judiciaire.
« Des représailles », estime Facua.

Le gouvernement, qui vient d’assurer Bruxelles qu’il prendra toutes les mesures de rétorsion possible pour dissuader ses compatriotes de partir en retraite avant 67 ans (une proposition antérieure de reporter de deux ans, soit à cet âge, le départ légal en retraite, avait été retoquée par les parlementaires), ne dévoile guère d’arguments légaux pour appuyer ses exigences.
Qu’à cela ne tienne.

Parmi les campagnes de Facua les plus gênantes pour un gouvernement soupçonné de sauver d’abord les dirigeants des banques et faire subir les conséquences à leurs clients, il y a celle dénonçant les « produits financiers frauduleux ».

Les compagnies téléphoniques, celles de fourniture d’électricité, sont aussi dans la ligne de mire de l’association. Dernier scandale impliquant les autorités : les soldes. Non seulement ils deviennent de simples opérations de promotion (de moins de 24 heures pour pousser les réflexes d’achat), mais ils ne servent plus à déstocker. Auparavant, ne pouvaient être soldés que des articles comptant au moins un mois de présence en stocks ou en rayon. À présent, ils peuvent être livrés le soir précédant le début des « soldes ». Chaque commerçant décide librement.

En espagnol, TVA (taxe sur la valeur…) s’abrège en IVA (I pour impuesto). D’où la campagne contre la « mentira masIVA ». Le 19 juillet, l’association avait appelé à une grève des achats.

L’association dénonce aussi la complicité des ministères avec les compagnies aériennes qui abusent de clauses frappant les voyageurs. Elle s’oppose à la privatisation des centres de santé publique et les aménagements passés avec les laboratoires pharmaceutiques. Elle proteste contre les accommodements fiscaux passés avec les fabricants de tabac pour qu’ils ne subissent pas les hausses imposées aux fumeurs.

L’association s’était aussi opposée aux directives restrictives portant sur l’avortement que soutenait l’église catholique romaine espagnole, fin juillet dernier. Cela pourrait être le déclencheur de la mesure d’intimidation prise par le gouvernement. Lequel est aussi accusé de vouloir reprendre en main les chaînes du service public de radio-télévision, la RTVE.

 

L’Institut national de la consommation était, depuis 1977, autonome en Espagne. Il a été incorporé à l’Aesan (Agence espagnole de sécurité alimentaire et de la nutrition) par le gouvernement Rajoy.

Bref, au lieu de se livrer à des tests pour conseiller le meilleur produit (certes, autant acheter celui au meilleur rapport qualité-prix, mais a-t-on vraiment besoin d’acheter ?), Facua traque les abus en priorité et dénonce les éventuelles complicités gouvernementales.

Évidemment, si FACUA ne pliait pas, ses subventions seraient retirées ainsi que son droit à intenter des actions devant la justice.