Les espoirs  impulsés par les accords d’Oslo, coup d’envoi inespéré d’un cycle de négociations ont été de brève durée. Dans "le dernier jour d’Yitzhak Rabin", Amos Gitaï revient sur  l’assassinat  de ce dernier survenu après son discours phare en faveur de la paix devant un parterre de sympathisants tout en liesse. Alors que des zones d’ombres entourent le meurtre commis par Ygal Amir, un certain extrémiste religieux, l’enquête passée au crible de la caméra d’Amos Gitaï aide à y voir un peu plus clair. C’est que vingt ans après, croiser les hypothèses à la lumière d’informations plus récentes facilite le décryptage. En mêlant images d’archives et reconstitutions plus vraies que vraies, le film va jusqu’à donner l’impression de revivre cette tragédie en direct.

L’état des lieux de la société israélienne dans cette période pré-attentat est alarmant. Le terreau sur lequel se développe les Ygal Amir est là, alimenté à profusion par le fanatisme que véhiculent les discours incendiaires de responsables politiques et de rabbins. Parmi les premiers, se trouve l’inénarrable Bibi qui à l’époque carburait déjà à la haine, ce qui sans doute l’a propulsé au firmament de la Knessett…Les prêches des seconds, détenteurs d’une grande emprise sur la société, n’ont rien du tout à envier à ceux de leurs homologues salafistes. Et autres radicaux de tous bords…  

De ce fait, après la signature des accords d’Oslo, la campagne de dénigrement et de diffamation à l’encontre d’Yitzhak Rabin était à son paroxysme. Une "fatwa" implicite était lancée contre lui, le nouveau  "Hitler", qui à tout va récoltait crachats et insultes sans jamais baisser les bras. De quoi créer des vocations auprès de ces radicaux qui ne jurent que par la Torah, le Talmud, les lois divines. Pire que ces délinquants recyclés en islamistes de dernière minutes, ils disposent aussi de ce kit élu de Dieu prêt à l’emploi… Vidée de sa dimension spirituelle, la religion à leur contact devient glaçante, semblable à un code de procédure pénale : Rabin est dans le "haram", le tuer devient"halal" , loi divine oblige ! 

Cette tragique page d’histoire qui fait écho à l’actualité apporte un éclairage sur ce conflit qui n’est pas près de se dénouer. Page d’histoire qui suscite plus de peine que de colère selon le témoignage de la la veuve de Ytzhak Rabin, lequel vient clore ce long métrage. Amos Gitaï y invite à la rétrospection dans l’espoir d’un sursaut général qui se traduirait par le recours à une autre politique que celle de la violence qui conduit inéluctablement à une impasse. 

Tellement bien filmé avec  parfois ce floutage de l’image dès lors qu’on est saisi de vertige devant la folie humaine. Les acteurs sont d’un naturel surprenant. Film à voir absolument même si trouver une salle n’est pas aussi simple que lorqu’il s’agit de ceux hebdomadaires qui ont le vent en poupe : ces films genre "vie d’Adèle", "Carol" ou encore "the danish girl", qui ont pour vocation de nous inverser les normes …

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