Le DARD ou l’aiguillon ?

Je conserve le souvenir diffus d’avoir entendu Patrick Sébastien, voici déjà longtemps (était-ce bien en conclusion d’un « Grand Cabaret », au moment où les serviettes s’apprêtent à tournoyer au son d’une de ces chansonnettes grivoises dont il a le secret ?…), évoquer son projet d’une initiative originale dans le domaine de la politique citoyenne.

Eh bien, il l’a concrétisé ! Il est passé à l’acte en le baptisant « D.A.R.D. », un sigle qui signifie « Droit Au Respect et à la Dignité ». C’est à Guillaume Durand que je dois de l’avoir découvert, hier soir ; presque par hasard, car « L’objet du scandale ») n’est en général pas ma tasse de thé favorite. Le « presque » est dû au fait que j’avais remarqué qui en serait l’invité, un invité dont je souhaitais entendre les explications.

Naturellement, pour bien justifier le titre de l’émission, une partie non négligeable de la séquence a été consacrée à une digression sur le mot, plutôt que sur la chose. A sa jeune interpellatrice, au demeurant fort sympathique, qui lui en reprochait le machisme, Patrick Sébastien fit remarquer que le sens argotique auquel elle se référait ne venait qu’au cinq ou sixième rang dans les définitions du dictionnaire, ce qui est exact, ainsi que vous pourrez comme moi le vérifier.

Pour autant, je ne peux m’empêcher de penser que, fidèle à son goût de la provocation, l’amuseur public a d’abord choisi l’acronyme avant de lui donner une traduction. Sans pour autant lui en tenir rigueur car si je n’oublie pas sa gouaille, je me souviens aussi de son attachement au créateur de San Antonio (précision qui ne sera utile qu’aux plus jeunes des lecteurs).

Je ne suis pas autrement surpris de ce témoignage de fidélité, pour n’avoir pas oublié cette soirée du 23 décembre 2003 où éclatait l’émotion profonde et non dissimulée du propre fils de Frédéric Dard, alors que l’imitateur faisait revivre son père, « De l’autre côté du miroir » sur France2.

Je ne lui ferai pas non plus procès de prendre le risque de choquer involontairement certains esprits pour y avoir cédé moi-même, voici longtemps aussi, en concluant un exposé, par ailleurs fort sérieux, sur une citation de l’auteur rapportée par l’animateur : « Si j’avais su que je l’aimais tant, je l’aurais aimé bien plus encore ».

Ce n’était à mes yeux qu’un hommage au grand cœur de l’un et de l’autre dont on pourra, s’il en est besoin, se convaincre par cette vidéo  {youtube}CLvqsqEY6DY{/youtube}

Mais tous ne l’avaient pas compris ainsi et peut-être suis-je d’ailleurs en train de récidiver en vous soumettant le présent billet …

Patrick Sébastien a choisi l’emblème de la guêpe ; on pourra regretter, même si celle-ci n’utilise en fait son arme que pour se défendre, que soit ainsi associée une agressivité à ce qui se veut par ailleurs une œuvre de pur humanisme.

Originaire de Limoges, qui n’est situé qu’à quelques encablures de Brive (mais aussi de Martel et de Gluges, chers à Patrick Sébastien et dans le décor desquels fut tourné « T’aime », son unique production cinématographique), je partage avec lui une certaine culture de terroir qui me fait noter qu’une définition (oubliée) manque au dictionnaire.

Au temps de ma jeunesse (et donc assez longtemps avant la sienne), le dard était aussi l’instrument du paysan (dans cette région, on ne parle pas d’agriculteurs et encore moins d’exploitants agricoles !) avant que se généralise la mécanisation. C’était un long bâton, le plus souvent négligemment posé en travers du joug qui ceignait la tête des bœufs accouplés en labour, leur servant de guide pour tracer l’impeccable sillon rectiligne. Mais occasionnellement, la pointe acérée fichée en son extrémité, maniée d’une main experte, vigoureuse mais sans trop, venait parfois piquer leur cuir pour les stimuler lorsqu’une motte particulièrement coriace – quelque granit enfoui peut-être ? – nécessitait un effort particulier.

En bon français, cela doit se nommer un « aiguillon ».

Cher Patrick, je vous accorde que ce mot est moins percutant (et donc moins médiatique) que celui que vous avez choisi. Je vous ferai remarquer pourtant qu’il rime richement avec Stéphane Guillon ; mais je reconnais bien volontiers aussi qu’il aurait tenu de mission impossible d’en faire un acronyme (« Association d’Individus Guidés et Unis par l’Intense Levier du Lancement d’une Œuvre Nécessaire» ? ? ? ) ; incontestablement, ça aurait moins de gueule !

Mais il aurait eu valeur symbolique car c’est bien de cela qu’il s’agit : nous stimuler au moment où un effort particulier est indispensable.

A ce stade, je m’aperçois que je n’ai toujours rien dit du fond de l’initiative. Peut-être est-ce volontaire, tout compte fait, car ce qui est important n’est pas ce que j’en pense mais comment vous pourriez réagir vous-mêmes. Alors, je me bornerai à vous donner les points d’accès du site (attention, n’oubliez pas le tiret, car il existe un quasi homonyme …).

Je vous recommande tout particulièrement de commencer par lire le manifeste que vous pouvez télécharger ici.

Nous verrons bien quels seront vos commentaires et s’il y a matière à prolonger cette introduction ; je me hasarde au pronostic qu’ils donneront lieu, comme il se doit, à quelques dérives et digressions. Le pire, que je n’ose imaginer, serait l’indifférence.

Alors, « Efforçons-nous ». Dare-dare !

9 réflexions sur « Le DARD ou l’aiguillon ? »

  1. Pas un seul commentaire, jPLt007, vous écrivez des choses intéressantes , c’est vraiment dommage…
    d’autant que vous connaissez parfaitement votre terroir….et que vous avez des choses à dire …

  2. [b]Pas le temps matériel pour commenter ce matin.

    Mais je peux vous assurer que je reviendrai, et pas seulement parce que les amis de mes amis sont mes amis, mais parce que je prends toujours plaisir à vous lire, moi aussi.[/b]

  3. Bonjour Libertinus. Merci de votre visite.

    Puissant paradoxe que celui par lequel le fait de remarquer l’absence de commentaires passe … par un commentaire !… Et puis, Sophy, vous a fait mentir ; il faudrait bien mal la connaître pour s’en étonner.

    Ceci dit, vous avez raison : il n’y a pas foule. Parce que je suis d’un naturel optimiste, je veux croire que la raison en est le temps non négligeable que représente la lecture du manifeste : 56 pages, même écrites en police 18 ou 20, il faut les ingérer, avant de les digérer ! Mais je vous l’assure (je m’adresse à ceux qui ne se sont pas encore manifestés), cela en vaut la peine.

    [i]PS : j’avais été bien inspiré en insérant l’avertissement prémonitoire au sujet de la vidéo : j’ai bel et bien pataugé. Mais je vais y parvenir, foi d’animal ; il n’est pas nécessaire d’espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer.[/i]

  4. ah vous etes là SOPHY ?
    On ne vous voitplus sous votre article un monde meilleur :
    sortez de votre terrier !!!! (je blague!)

  5. [b]Cher JPLT007,
    Voilà près d’une demi heure que j’essaie de trouver (sans télécharger) des renseignements sur le fameux (fumeux ?) programme de Patrick Sébastien :

    « Droit Au Respect et à la Dignité »

    pas moyen de retrouver soit un texte soit une vidéo de l’émission d’avant hier, alors juste pour un sourire j’ai repris le dessin de Hub, que je vous mets en attendant que vous nous distilliez quelques éléments de ce programme « Alléchant »…

    [img]http://www.agoravox.fr/local/cache-vignettes/L373xH454/DardW-83161.jpg[/img][/b]

  6. Bien chère Sophy,

    Je vous remercie de votre précision « pointue ». Est-ce à tort que je la reçois comme une aimable provocation ? 😉 Mais je vais vous faire une confidence : n’étant pas tout à fait un perdreau de l’année, j’avais déjà pressenti que l’acronyme pouvait avoir des dessous libidineux.

    Vous attendez, dites-vous, que je distille ; serait-ce une manière de me traiter d’alambic ? Il est vrai que mes propos le sont parfois, alambiqués …

    Céderais-je ou non à cette provocation ? That is the question … A vrai dire, la tendance du moment serait plutôt de tenter d’instiller une réflexion (le jeu de mot, facile, fait écho à celui de Sacha Guitry ; à une jeune fille qui lui faisait reproche de la dévisager avec insistance, il répondit : « [i]Vous faites totalement fausse route : je ne vous dévisage nullement ; tout au contraire, je vous envisage ![/i] »). Je me sens en résonance avec lui, parce que l’humanisme traite de l’Homme et que s’il m’arrive de parler d’hommes, soyez assurée que j’y embrasse, bien entendu, toutes les femmes.

    Allez, je m’accorde encore un instant de réflexion ! Le doute m’habite ; s’il n’y a pas davantage de commentaires, est-ce parce que le sujet laisse indifférent ou parce que les C4Newsiens sont en train d’ingérer les 56 pages du manifeste, indispensable prélude à les digérer ? Pour mémoire, je rappelle qu’on peut le télécharger sur http://www.le-dard.com/wp-content/uploads/manifeste.pdf.

    A+

  7. J’ai parcouru le manifeste…du Dard….cela vaut le détour….J’ai un peu de mal à y trouver des propositions concrètes ! ….je souhaite néanmoins beaucoup de chance à Patrick Sébastien…et aux adhérents du Dard…..Je suis curieux de voir si la mayonnaise va prendre…

  8. J’ai le sentiment que grâce à vous, Libertinus, nous sommes en train de progresser. Vous êtes le premier (et provisoirement le seul) à émettre une opinion après avoir pris connaissance du document. Jusqu’à présent, je n’avais lu ça et là que des prises de position abruptes qui témoignaient de réactions épidermiques. La vôtre a le mérite de la nuance.

    Mais permettez-moi de n’être pas tout à fait d’accord avec vous (n’est-ce pas la substance même d’un débat ?) : des propositions concrètes, il y en a quelques-unes et d’assez facilement réalisables. Par exemple : « [i]… pensez à sourire, à tout hasard. Qui sait si ce n’est pas seulement ça dont l’autre a besoin ? Juste la sensation d’exister. Et surtout n’oubliez jamais : partager les joies, ça les augmente, partager les peines, ça les diminue ! [/i]».

    Ainsi que d’autres, en rafale :
    •« [i]Rendez-vous disponibles pour passer du temps avec ceux qui sont en détresse.
    •Donnez un coup de main, dix coups de main.
    •Dépannez, aidez, accompagnez, encouragez.
    •Assistez des malades.
    •Tenez compagnie à des vieux.
    •Gardez des enfants.
    •Soutenez les familles en deuil.
    •Offrez votre table.
    •Faites profiter de vos plaisirs.
    •Prêtez ce qui ne vous sert pas vraiment.
    •Donnez ce qui ne vous sert plus à rien[/i] ».

    A défaut d’un petit pas pour l’humanité, ce pourrait être un pas de géant pour l’homme, notre voisin, non ?

    De nouveau, merci de contribuer à faire prendre au moins la mayonnaise de ce débat. Serait-ce le doux bruit d’une pompe en train de s’amorcer ? Souvenons-nous de la litanie de Michel Serres, dans un article que j’ai livré par ailleurs (« [i][b]Yes, we can – suite[/b][/i] » sur http://www.come4news.com/yes,-we-can-suite-michel-serres-446762): « [i]Je vous invite à réfléchir …[/i] ».

    Aïe, Sophy m’a démasqué : je commence à distiller …

  9. JPL 007 Je suis pour toute initiative qui vise à retisser du lien social ….euh presque toutes….

    PS

    le Hamas était au départ une organisation purement charitative, subsidiée comme telle par Israel puis le sheikh Yassine est arrivé…..

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