En 1977, avec seulement une quarantaine de têtes, la race du baudet du Poitou était moribonde. À présent, l’espoir de la voir se survivre, voire prospérer, est permis. Grâce aux efforts de l’Asinerie du baudet du Poitou, d’une association de sauvegarde, la Sabaud, mais aussi de particuliers… Comme la Britannique Annick Pollock qui, dans l’Hampshire, accroît son élevage déjà fort de 22 têtes. Soit un peu plus de deux pour cent d’une population mondiale trop éparse pour en assurer encore totalement la sauvegarde.
À Milan, peut-être sensibilisé par le sandale de la viande de cheval gonflant du bœuf au-delà des proportions de la grenouille de Jean de La Fontaine, j’ai dégusté un brasato d’asino con polenta. Enfin, je crois qu’il s’agissait bien de viande d’âne (du sanglier figurait aussi à la carte et de mémoire, le goût m’en a semblé assez voisin). Comme le disent éleveurs, dresseurs, et Bartabas, du théâtre équestre Zingaro, pour préserver les races asines et chevalines, faites-vous tailler des steaks et braisez-en les viandes…
Je ne sais si les restaurants proches du Parc du marais poitevin servent de l’âne, ou de la mule poitevine (dite juments mulassière), mais un braisé de baudet (dans du pinot des Charentes) au chabichou vaudrait bien l’âne braisé à l’urine de moine que, dit-on (mais je n’y crois guère), on servirait à Cahors…
Le baudet du Poitou fournirait nombre de bonnes daubes, préparées à l’étouffée, car c’est l’un des plus forts, robustes, et volumineux des ânes. Connu des gaulois, utilisé pour le trait, l’attelage ou bâté pour accompagner le voyageur, il est sobre et de la taille d’un cheval (voire plus grand, avec 1,50 m pour les mâles). Sa stature, mais aussi son pelage, car fort velu, laineux, font qu’il ne saurait être confondu avec tout autre congénère d’autre race. Les bourailleux, ou guenilloux, surnoms de ces baudets, seront à l’honneur en France, à Dampierre, le 28 juillet pour la fête de l’âne et les 24 et 25 août lors d’un concours national.
L’élevage d’Annie Pollock, créé à Lymington en 2004 sur sa Norley Farm, est en passe de dépasser en nombre, avec 22 baudets, celui de l’asinerie poitevine, forte d’un cheptel de moins du double… Sachant qu’il existe deux élevages en Angleterre, on se demande si l’animal gaulois ne finira pas par braire mondialement (moins d’un millier sont recensés, mais trop dispersés pour se reproduire et prospérer) avec l’accent de Bornemouth.
Mais pour vous familiariser avec cet animal, attachant mais quelque peu cabochard, rendez-vous à l’occasion à l’asinerie de Dampierre-sur-Boutonne. Diverses animations sont proposées, ainsi que des locations (bâté, attelé…) ou des stages.
Vous pouvez aussi vous rendre en Bretagne, à l’Asinerie de la Baie (à Kerjean près de Crac’h). Ou à l’élevage des Baudets du Beruil (à Aigonnay dans les Deux-Sèvres). Aussi sur l’île de Ré, à Saint-Martin, au parc de la Barbette (où vient de naître, à la mi-avril, Darco de Ré, fils de Taquine et d’Unik de Ré). Mais de même dans d’autres régions.
Mais les élevages britanniques, celui du Hampshire ou du Carmarthensire, au Pays de Galles (à Pontyates-Llanelli), celui de l’Hamerton Donkey près de Sawtry (Cambridgeshire) et quelques autres sont en passe de devenir la référence. Les Britanniques semblent (et leur presse en rend compte) s’être entichés de cet animal et de ses très longs crins (qui peuvent balayer le sol). Quant à leur en faire déguster, ce sera une autre histoire…
Mais on le sait, les ânes réthais enfilaient déjà le pantalon : voici que les baudets poitevins passent la Manche…
[b]Merci, Jef ! c’est un très bel animal ![/b]