La Symphonie des Joués.
(op. n°3)
Ouverture
Il est des concerts qu’il ne faut manquer sous aucun prétexte. Dans une loge, sur un fauteuil d’orchestre ou un strapontin. Depuis les la des accords jusqu’à la note finale. Sous vos applaudissements !
Ce soir, comme vous pouvez l’observer, l’orchestre tarde à se mettre en place, il est presque vingt heures, on attend le chef sous la baguette duquel la musique va nous emplir de joies et de folles espérances.
En attendant sa venue, prenons notre temps. Les lumières illuminent toujours les instruments. Les exécutants s’exercent encore, chacun tentant de briller par avance devant la salle comble où nous avons pris place, après une longue attente.
Peut-être, impressionnés par l’apparente élégance de cet hémicycle à l’échauffement, n’avez-vous pas remarqué les menues différences entre les artistes. Quelques-unes sont flagrantes, d’autres plus ténues. Le voisinage cache souvent des antagonismes que seule la musique peut apaiser. Le programme dénonce une symphonie composée par un génie, sorte de destin qui a profité des mouvements musicaux pour attendrir, réveiller, angoisser, terroriser même l’auditoire pour, au final, exulter d’un triomphe immarcescible.
Depuis les coulisses, le détail est plus facile à appréhender. Voyons donc. Avant qu’il n’attaque la symphonie des joués.
Premier Violon Nicolas Sarkozy
Allegro déjà troppo ?
A tout Seigneur, tout honneur.
A celui qui déborde d’ardeur
Qui craint, dit-on, les pauses
Et préfère les anicroches.
Descends d’un ton si tu oses
Soupira-t-il un jour à un proche !
Une dame rivale espéra un bouquet
Mais c’est lui qui gagna le fouquet’
Premier violon depuis cinq ans
Une place qu’on gagne avec les dents
Comme la croissance
Qui l’avait fui en sa jouvence.
Installé dans les cordes
Il fit flèche de tout bois
Semant la discorde
D’un geste du doigt.
En pointant du majeur
Tout exécutant mineur.
En concert à Dakar,
Il étrilla les noires
Pour que des blanches pures
Durent outre mesure
À peine on évita le tintamarre.
Récemment entama
Face aux Turcs un rondo
Puis fit vite le gros do
Arménie ré mi fa
Révision oh ! la la !
Ankara j’en veux pas !
Tout épris d’Italie
Coda et da capo
Pourtant se rembrunit
Car là, pas de repos
Pour un solo
Tutti pizzicati.
Il lui fallait des croches
Pour des crochets, c’est moche,
Il chantonna in petto
À son voisin l’alto
A la claire fontaine
Plein de rancœur et de haine
A New York soudain un couac
Dans une baignoire d’un grand Théâtre
Un soliste saxophoniste d’humeur folâtre
Sur un tempo qui sentait l’arnaque
Maltraita entre autres Dvorak.
Il lui en coûta l’infamie FMI
Sa place et ses amis.
Sur la scène de l’Opéra
Arrivée en berline
Comme il se doit pour les divas
La princesse de Clèves, Angela,
Gloussait des a, a, a,
Etonné de voir sa triste mine.
Le pupitre était là
Juste à portée de bras
L’aurait-il encore cette fois ?
Le violoncelle François Hollande.
Il trima, fut un temps,
Souvent à contretemps
Avec un joueur de Sarcelle
Amoureux de seins clairs
De chairs faibles, de pucelles
Qu’il troussait d’un éclair
Aux alcôves d’hôtel.
Flottait alors dans l’air
Un scherzo de primaire
Qu’il scandait avec le secret air
Du soliste qui toujours espère
Enfin vaincre ses pairs.
Au brie préférez le gouda,
Le gros mage des codas !
Scandait l’amaigri Bouddha.
Une valse, au final
Avec une fugue royale.
Sur son lutrin en tulipier
La partition du violoncelliste
Des rondes, des notes, socialistes
S’égayent sur le papier
Un dièse
Vive la Corrèze
Un bémol
Jadis komsomol.
De Bity, le chapelain
Entonna un solo mutin
Drelin drelin
Oh ! Le nain vilain!
Flairant que ça n’allait pas marcher
Une fois encore
Le vieux lion de Belfort
Qu’on surnommait le Ché
Déposa bientôt son cor
Et apporta son renfort.
Timbale ou Cymbale Marine Le Pen
L’important, c’est le bruit
Quand on est en furie
Pour partout faire front
Et n’y voir qu’affronts.
A l’heure du choix
L’important c’est la voix
Il en faut bien cinq cents
On ne peut chanter sans
C’est comme ça, c’est la loi.
Pourquoi pas les timbales
Plutôt que les cymbales
Ou les deux c’est brutal
Pour haranguer les chorales.
Les timbales
Ou les cymbales
C’est tout halal
Alléluia !
Lui dit une voix
En Do en ré en mi
En dorémi.
Invitée dans l’antre
Où naquit la bête
Elle s’y crut grand chantre
Au bal fit la fête
Car les valses de Vienne
Comme le passé reviennent
Il est de ces antiennes
Qu’on a dans les veines
Injectées par un père
Auquel tout jeune on obtempère.
Le Hautbois François Bayrou.
Au-dessus des violons
Aux longs arias flonflons
Et du joufflu violoncelle
Qui chassait la sarcelle
Résonne le hautbois
Gourmand de poule au pot
Récusant d’être suppôt
D’être avec deux, à tu à toi.
Sur le tracteur du ranch
En douce, il bichonne l’anche
Rêve de tenir le manche
Pendant qu’ils s’emmanchent
Pour une portée de blanche.
Ce soir, il baille
Rouspète aïe, aïe, aïe…
Il sifflote à l’écart
Partout met des bécarres
Glissando contre les archets
Fustige son ami huchet
Comme s’il manquait un dièse
Qu’allait jouer l’autre balèze
Dont l’oncle aima les jèses.
Il aurait pu longtemps avant
Des triolets aidant
Souffler dans un violon
Comble de l’inaction
C’eût été boucher son pavillon.
La trompette J L Mélenchon
Une trompette bien embouchée
Voulait sa part de renommée.
Il joua longtemps du cor social
Jusque dans les chasses royales.
Sommé de souffler en sourdine
Un jour d’humeur badine
Il choisit de vivre
Seul sa vie de cuivre
Lors il brassa du vent
Décida de faire front
Contre la démente du Front
Tous en avant et lui devant.
Derrière lui suivaient aussi
Bugles et cornets rougis
Aux chorus rancis
Anciens de la Cour neuve
Fanas d’un facteur d’orgues
Méli mélo où Mélenchon
Beuglait des chansons
La Harpe Eva Joly
Dieu qu’elle était jolie
La petite fille de Norvégie
Toute sevrée d’énergie.
Elle avait tâté de l’éolienne
Dans ses cordes mais
Pas assez musicienne
Pour un joli mois de mai.
Un Glockenspiel roux
Sans rage ni courroux
Craignait qu’elle se la joue
Toute seule c’est fou
Et quand c’est mou, c’est mou.
S’il y eut des vivats
Admirant l’octava
Pas de bossa nova,
Pas de java
Ne décollait pas l’Eva.
L’alto. Dominique de Villepin
A l’écart des badauds
Frise l’alto
Une âme toute en vibrato
Une tête chenue
Qui sied au parvenu
Au sommet de son art.
On jalouse sa prestance
Qu’il parle ou qu’il danse
Le geste
Leste
Doublé d’effets de manche.
Qu’il destine à la France.
Tout est affaire de cordes
Enfin plutôt de croches.
On l’y verrait suspendu
Pour un moto trop tendu.
Habile en ronde de jambe
Comme en viole de gambe
Il méprise c’est profond
Le tout petit violon
Son archer
Qui parcourt les villes
Plein d’émois et moi que moi
Toute ouïe pour un choix
Ecoute le hautbois
A deux devient-on roi ?
Pour l’heure il est sans voix.
La contrebasse Christine Boutin
Fan d’oratorios
De Sanctus, de Kyrie,
Al dente con moto
Chef vous oseriez ?
Me tenir à l’écart dans les cordes
Pleurant miséricorde
Au long d’un lamento
En vain d’échos
J’aurais pu être une bombe
Diatomique
Je ne suis qu’un rhombe
Anémique
Sans notes pour mes rondes
Et déjà vers la tombe
A toutes pompes.
Le huchet Hervé Morin……….
Le huchet
A trébuché.
Il ne concourra pas
Au bal des prétendants
Une valse à mi temps.
Il se voulait mutin
Il se voulait malin
Il ne fut que bou(que)tin
Gong et crécelle Dupont Aignan
Tout en haut des percussions
Un vibrion
Agace le premier violon
Un voleur de partitions
Que ce gong qui confond
La notation et la nation.
Il le croyait gnangnan
Alors qu’il est saignant
On l’estimait sous-franc
L’ouïe fine du ci-devant.
D’un geste souverain
Debout en public
Et en ré public
Il persiffle l’hymne à la joie
Prend de la voix
Au lieu de se tenir coi.
Quand il joue à Bruxelles
Il préfère la crécelle
Honnit cette citadelle
Qui décervèle
Abhorre la chanterelle
Qui en accepte la curatelle.
Pipeau appeau Nathalie Arthaud Corine Lepage.
En cette rare occasion
Elles avaient pour mission
De dépasser l’intro.
Répondre aux maestros
Se donner dès l’ouverture
Sans trémolos
Sans fioriture
Offertes à l’aventure.
L’une, hardie, sifflait hello
L O et l’eau
D’un bel appeau
Presque dame de vent
Mais inconnue avant.
L’autre venue d’un cap vert
S’invite au concert
Y cherche son couvert
Parmi les choristes
Loin de la harpie harpiste
Et faute de voix
Conteste les lois
Qui font les rois.
Un coup de pipeau
Acheva son duo.
Le cor G Nihous
De chasse ou d’harmonie
Risquant la cacophonie
Un proche de l’aphonie
S’initia au cor
Planté dans un décor
Plus vrai que nature
Comme une appogiature.
Une nuit de grande frousse
Il mit le cor dans sa housse
Le tendit au premier violon
Charmé par ses flonflons.
Le biniou P Poutou
Un autre, descendant de facteur
D’instruments anciens de bonheur,
S’essaya au biniou
Ou à la cornemuse
Pour que l’on s’amuse
Il eut beau faire le coucou
C’est fou comme chacun s’en fout.
Dès le début il est déjà à bout.
La flûte J Cheminade
A la dernière minute
Une ombre se profile,
Dans le dos une flûte
Aux notes quasi subtiles
Sourdes et sans cible.
Entame une ballade
Vite réduite en aubade
Sur un rebord d’estrade
Appellerait à la croisade
Tocade, foucade
Qui finit en mascarade.
Il est vingt heures.
Nous sommes le 6 mai 2012
La Symphonie des Joués
……………………………………….
[b]BRAVO à Modérato, qui a réussi à mettre « en scène » cette sympohonie, orchestrée par Jacques Monnet, qui passe en revue tous les candidats à la Présidentielle, sous forme d’instruments d’un orchestre qui va jouer la même partition pendant 5 années, après le 6 Mai.
Tout cela en vers.
Très long, et très veau travail d’artiste…
L’excellence est sur C4N, et en particulier sur cette page.
SOPHY l’enchantée…[/b]