La môme ou la vie d’artiste

Comment s’attaquer à un mythe sinon en lui rendant sa part d’humanité, quitte à sacrifier au passage l’aura et le mystère de l’idole. Dans le film actuellement en salle que nous propose Olivier Dahan, on est servi. Misère et décadence plus de deux heures durant. Triste môme, notre Edith, une Cosette de la rue qui connaîtra la gloire et la déchéance physique, la vie de palace et les drames.

 

 

Rien ne sera épargné à Edith. Née à Paris dans la misère, sa mère l’abandonne. Confiée par son père soldat à sa grand-mère tenancière de bordel en Normandie, elle tombe malade et perd la vue. Suite à un pèlerinage à Lisieux où on l’emmène prier Sainte Thérèse, elle retrouve ô miracle, l’usage de ses yeux. Elle grandit dans cette maison close au milieu de prostituées au grand cœur qui la protègent et lui donnent l’affection dont elle a été si cruellement privée. Mais le père revient la chercher. Cris et déchirements de la fillette. Les voilà sur les routes dans le sillage d’un pauvre cirque où le père (joué par Jean-Paul Rouve) exerce son ancien métier de contorsioniste. Puis retour sur les pavés parisiens dans la misère toujours.

 

A 10 ans, Edith commence à chanter pour aider à gagner quelques sous. Elle n’arrêtera plus. Une question à ce stade se pose : Edith est-elle allée à l’école ? Entre les mois de cécité, les tournées avec le cirque et la manche à Belleville, on ne la voit jamais un cahier à la main dans le film. Un détail qui a son importance quand on sait qu’Edith Piaf n’était pas seulement une interprète de génie mais aussi auteur.

De son enfance ballotée, la môme Piaf tirera sa soif d’amour. Une large place est faite dans le film à son histoire d’amour avec le champion de boxe Marcel Cerdan mais rien ou si peu sur les amants qu’elle s’est plu à collectionner jusqu’à la fin de sa vie. Dommage !

 

Olivier Dahan a réussi son pari : faire découvrir derrière le personnage de légende l’existence d’une femme avec ses hauts et ses bas, le tragique l’emportant sur le bonheur plus souvent qu’à son tour. De la petite fille à la santé fragile à la femme qui aime la fête, gouailleuse et paillarde, je conserverai malgré moi l’image de la femme à l’agonie qui paraît avoir 80 ans (je salue la prouesse du maquillage et le courage de mademoiselle Cotillard).

La chronologie est bousculée judicieusement grâce à un montage efficace et au procédé du flash back. Le tout se regarde sans ennui. Parfois même, surgit l’émotion de façon inopinée quand sur scène se marie la grâce de Marion Cotillard avec l’esprit de la chanteuse.

 

En conclusion si je respecte le parti pris du réalisateur de mettre tel ou tel aspect de la vie de la môme en perspective, j’aurai préféré voir la grande amoureuse plutôt que l’ivrogne, l’artiste au travail plutôt que sa décrépitude.

La vie d’artiste n’a de poésie finalement que dans les chansons.

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