C'est après une conférence de presse, donné par Mgr Gianfranco Girotti au quotidien du Vatican, L'Osservatore romano, que toute la presse a repris une curieuse nouvelle : la "liste des péchés" se serait allongée et comporterait désormais, en plus des sept péchés capitaux classiques, trois ou quatre péchés de plus. Poluer, se droguer, voire même s'enrichir à outrance serait devenu désormais péchés, loin de la désuétude un peu moyen-ageuse de la paresse, de la gourmandise ou encore de la luxure.  

Les qualificatifs ne manquaient pas dans les titres des journaux. Notons à leur décharge que si l'information était vraie, ce serait un petit évènement. Ils évoquent un "dépoussiérage", une liste "Plus sociale, plus verte", etc, etc. Un article va même jusqu'à titrer que l'Eglise rallonge la liste des péchés capitaux…! L'on pourrait s'en amuser, pourtant la situation est inquiétante et laisse mal augurer du sérieux de la presse en général et de la presse professionelle en particulier. D'une information déformée, par une agence de presse, aussitôt tous les journaux ont fait leur titre, sans même vérifier leurs sources. Pire encore, ils se sont entêté dans une information qui pour un lecteur averti ne pouvait que prêter à caution.
Sur Europe1, une jeune femme traite de cette information très sérieusement. Elle affirme "les sept péchés capitaux c'est de la vieille histoire finalement" et qu'à présent il existe  quatre péchés de plus, avant de les citer précisément, sûre de son fait, développant une sorte de programme anti-péché qui sortirait tout droit de l'Eglise. La mondialisation a changé dit l'archevêque, selon elle, la nature des péchés, ce qui explique bien sûr ce revirement du Vatican…
France info a même pris la peine de faire un débat, dans un véritable dialogue de sourd selon le curé bloggeur  Emmanuel Pic. Un autre curé, Emmanuel Schwab, y explique qu'il s'agit juste d'une piste de réflexion sur le péché dans la société actuelle, mais en aucun cas d'une nouvelle "liste". L'essayiste Patrick Banon, "chercheur en sciences des religions et systèmes de pensée" (s'ilvousplait), explique qu'il faudrait classer le racisme comme un péché… Les péchés capitaux ne sont-ils pas dépassés demande la journaliste au curé… Plus qu'un dialogue de sourd, c'est à désespérer des journalistes et des chercheurs…
Pourtant il suffisait de chercher un peu. Le journal La Croix  ou encore le Bien public  font entendre une voix discordante, en citant notamment exactement l'archevêque : "Alors que le péché concernait jusqu'à présent plutôt l'individu, aujourd'hui il a une résonance sociale, en raison de la mondialisation ". Il ne s'agit pas pour le prélat de revenir sur une prétendue "liste de péchés", mais d'étendre la notion de péché à la responsabilité collective, le père Pic l'explique bien : "une invitation à ne pas limiter notre examen de conscience à notre seule responsabilité personnelle directe". Le père Emmanuel Pic traite aussi du sujet sur son blog ( ici et  )
Ne cherchez pas une liste des péchés. Le père Pic, interrogé par le "Bien public " explique "En dehors de la distinction entre les pêchés mortels et les péchés véniels, il n'existe pas de liste exhaustive des péchés. Il y avait autrefois dans les confessionnaux des listes qui permettaient aux pénitents d'établir leur examen de conscience, mais en aucun cas un classement en ordre d'importance pour les faire culpabiliser." Le curé ajoute même que le traitement médiatique de cette information n'est qu'une simple caricature.
Tout cela est regrettable à divers titres. La piste de réflexion, par-delà l'aspect religieux développé par l'archevêque, a toute son importance sur des questions très actuelles. La pollution est l'un des drames de notre siècle, non pas seulement à cause du réchauffement climatique, mais aussi sur le nombre d'espèce qui disparaissent (l'Eglise a d'ailleurs évoqué ce sujet sous l'angle religieux auparavant, évoquant la nécessité de préserver la Création, confiée à l'Homme) et personne ne peut agréer moralement l'exploitation dans le monde de la pauvreté, notamment par les entreprises internationales. Dans un monde qui se "globalise", nous sommes tous un peu responsable les uns des autres, c'est je crois, la piste qu'à voulu développer l'archevêque, mais chacun peut chercher un sens plus large. Par son traitement de l'information, la grande presse a tout simplement désinformée l'opinion publique.
Comment ne pas s'amuser de cette presse? Comment ne pas rire en lisant les papiers sur cette prétendue "liste des péchés" décrite dans nos journaux. La presse professionnelle, toute infatuée d'elle-même, a fait tout ce qu'elle reproche au journalisme "citoyen" : des informations mal développées, aucune recherche à la source, des affirmations lancées péremptoirement… ne manque que les fautes d'orthographe, ce qui serait un moindre mal! Aussi peut-être serait-il temps, qu'avant ou après la grande messe du vingt heure, la grande presse prenne le temps de dresser une liste de ses propres péchés!
L'image est une allégorie des sept péchés capitaux