Eh oui, rien n’est éternel sur cette terre des hommes. Rien. Et pourtant, certaines personnes sont moins mortelles que les autres. Parmi elles Guy Béart, bien entendu, car la vie d’un poète ne se termine pas nécessairement avec sa mort. Ses chansons continueront à vivre dans le cœur et l’esprit de ceux qui les ont appréciées un jour. Et pas seulement en France où Guy Béart fait déjà partie du patrimoine, ou dans les pays francophones, mais également dans les pays où l’on apprécie la culture, la langue, la littérature et la chanson française. De quels pays s’agit-il ? De la Russie, avant tout, où le français était la langue de la cour impériale et de la noblesse.*
Par conséquent, la presse russophone n’a pas pu passer à côté de cette triste nouvelle. Plusieurs articles ont paru dans les médias russes pour rendre le dernier hommage à cet homme qui semait à tout vent les valeurs universelles.
Parfait inconnu à la nouvelle génération, Guy Béart ne l’était guerre à l’heure de sa gloire. Ainsi, en 1972, il fait une tournée de 15 jours à travers l’URSS. Il se produit avec succès à Moscou, à Kiev, à Riga. A la suite de cette tournée, l’incontournable maison de disques « Mélodia » sort la même année l’album (mono) du chanteur intitulé «Guy Béart chante. (France)»**.
Les chansons reprises sur cet album sont les suivantes : « La vérité », « Les souliers », « Le grand chambardement », « Allo, tu m’entends ? » « Les grands principes », « Vive la rose », Couleurs vous êtes des larmes », « Lune ma banlieue », « L’espérance folle », « La fenêtre », « La berceuse », ainsi qu’une chanson que Guy Béart chante en un très bon russe « Dorogui » (Les chemins).
« La berceuse » porte également un cachet russe car il s’agit de la traduction d’un poème de Sacha Tcherny effectuée par Elsa Triolet.
Un seul bémol : la version de la chanson « La vérité » enregistrée sur le disque soviétique n’est pas intégrale. Deux passages ont été supprimés par la censure soviétique ou par l’auteur lui-même… Le premier morceau censuré est, bien entendu, le suivant:
Le monde doit s’enivrer de discours, pas de vin
Rester dans la ligne, suivre les consignes
A Moscou, un poète à l’Union des Ecrivains
Souffle dans la soupe où mange le groupe
Le poète a dit la vérité
Il doit être exécuté
Le second passage supprimé est le tout dernier se terminant par les paroles suivantes : « Ma chanson a dit la vérité, Vous allez m’exécuter ». Guy Béart s’est-il senti obligé d’enlever cette dernière partie de la chanson après la suppression du morceau précédent ?
Par contre, le passage où l’auteur évoque Jésus Christ qui «dit la vérité », ni plus, ni moins, ne subit aucune modification. Et ce, dans un pays où les histoires de Jésus sont considérées en tant qu’opium du peuple… Quoi qu’il en soit, la chanson est enregistrée et le message du poète passe : « Le premier qui dit la vérité, Il doit être exécuté ».*** Guy Béart a sans doute mis de côté son orgueil d’auteur de textes pour avoir la possibilité de communiquer avec le peuple dont il partage les racines.
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Par ailleurs, le thème de l’entente entre les peuples est évoqué dans sa chanson « La Tour de Babel » (1963) :
Un jour nos langages
Chanteront еn choeur
Pour lе mariage
Des quatre couleurs…
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Tous les exemplaires du disque "Guy Béart chante" rapidement vendus, celui-ci devient introuvable dans le commerce. Ensuite, l’arrivée de Mireille Mathieu et de Joe Dassin sur la scène soviétique fait oublier les chansons de Guy Béart.
Néanmoins, aujourd’hui, sur la toile on trouve pas mal de sites russophones consacrés à Guy Béart et à son œuvre. Le fameux disque soviétique est actuellement vendu sur Internet. On peut également le télécharger ou l’écouter en ligne. Un certain Psoï Korolenko traduit et enregistre quelques chansons de Guy Béart en russe:
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Et c’est ce qu’on appelle « la vie après la mort »…
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* Ainsi, le tsar de la Russie Alexandre Ier parlait le français mieux que le russe.
** Plusieurs pochettes de ce disque existent. Ci-dessous, la plus belle des pochettes:
*** Renaud n’a pas pu chanter "Le Déserteur" à Moscou…