Le groupe suédois Electrolux fermera son usine de lave-linge de Revin (Ardennes) et transférera à Rottenburg (Allemagne) la moitié de la production de ses appareils et plans de cuisson de moyenne gamme fabriqués à Schwanden (Suisse). Après celui de l’automobile, il semble que le marché de l’électroménager saturerait en Europe.

La Fiat avait dû faire volte-face en Italie. Elle estimait que le marché intérieur et l’européen n’étaient plus porteurs et qu’il fallait donc se porter sur des marchés extérieurs, en fabricant sur place. Pour Electrolux, la firme suédoise qui commercialise sous son nom ou ceux des marques Faure et AEG, le raisonnement est le même : douze usines ont été fermées depuis 2007 (34 en 16 ans), « plus de 60 % de l’électroménager du groupe est actuellement fabriqué dans des régions à bas coût qui sont proches des marchés à croissance rapide. ».

Coup dur donc pour les Ardennes, qui voient Givet et d’autres bassins d’emploi stagner, puisque le site Electrolux de Revin, déjà privé des machines à laver le linge à chargement par le haut Faure à présent fabriquées en Pologne, risque de disparaître à court terme, l’Europe n’étant plus un marché assez porteur. Environ 400 emplois disparaîtront.

Même cause, même effet, pour les appareils de cuisson de Schwanden. Le bas de gamme disparaît, une partie de la fabrication du haut de gamme part en Allemagne, et la localité suisse va perdre 80 emplois sur 230.

Electrolux est le deuxième fabricant d’électroménager après Whirpool, et son marché nord-américain est en régression d’un pour cent, l’européen de deux pour cent. L’usine suédoise de Mariestad, qui fabrique des réfrigérateurs (AEG, Frigidaire), sera aussi affectée.

Pourtant les ventes globales ont progressé de 6 % en valeur et les profits ont grimpé de 19 % pour Electrolux. Le groupe se tourne vers des produits innovants et plus haut de gamme pour lesquels les acheteurs sont beaucoup moins sensible au prix (ou beaucoup plus sensibles à des prix forts qui proclament leur pouvoir d’achat supérieur).

Luxe et innovation

Ainsi, le groupe a développé le concept Electrolux Grand Cuisine, avec un four Molteni (fabricant de pianos de cuisine et fourneaux professionnels) dont le prix de base est d’environ 20 000 euros mais qui peut grimper à dix fois plus cher. Il peut aussi réaliser du « sous-vide » pour préserver les plats à réchauffer ultérieurement. Prix « d’appel » d’une telle cuisine : dans les 89 000 euros. Hors taxes.

Cibles visées, les gourmets, soit des personnes, environ 50 000 par an, qui disposent d’au moins deux ou trois résidences. Pour ce prix, un chef étoilé Michelin se déplace à domicile pour une petite démonstration.

Electrolux avait débuté dans la production d’un modèle d’aspirateur, dans les années 1920. À présent, les marchés asiatiques et sud-américains,  enfin leurs « classes moyennes », de même que ceux de Russie et d’Inde, sont visés. Electrolux pourrait reprendre une partie des activités de Daewoo après avoir acquis Olympic (Égypte) et CTI (Chili).

Le groupe ne lésine pas sur la mercatique et installe des restaurants temporaires dans les capitales, sous la forme d’un module (dénommé à Londres The Cube), placé dans des endroits chics (à Londres, le Royal Festival Hall), dans lesquels il invite des chefs prestigieux qui vous font – pour environ 200 euros – la surprise d’un déjeuner ou d’un dîner « surprise » : pas de foie gras poché dans des figues accompagné de purée de betteraves vanillées aux États-Unis, pays rétif au gavage, mais la truffe est souvent présente un peu partout. À ce prix, estimait un critique gastronomique anglais, Electrolux est peut-être déficitaire sur chaque repas, mais les retombées le valent.

Charité bien ordonnée

Le groupe fait aussi, en Malaisie, dans le charitable : un « marathon de lavage » gratuit en plein air, qui durera quatre jours (à partir du 1er novembre), permettra de laver et sécher, plier, des vêtements donnés qui seront redistribués aux nécessiteux.

Bah, comme le dit si bien Karl Lagerfeld, il ne faut pas traiter le luxe comme une chose honteuse, et il faut « parler d’envies, il faut créer des envies ». Celle de danser devant le buffet ne devrait tarder à être ressentie, à Revin et ailleurs…

Saluons en tout cas ce concept innovant, signé Electrolux : le dégraissage caritatif !