Le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, n’est pas un homme qui aime la censure ni la polémique, cependant il centralise actuellement la colère de l’opposition, et se trouve au centre d’une controverse pour certaines de ses déclarations.

Depuis une semaine, Erdogan est en train de défendre sa nouvelle législation relative à la limitation de la vente d’alcool, qui attire les critiques de tous les côtés, et dont il est le promoteur le plus fervent. Pour souligner la bonté de l’initiative il a jugé bon de remettre en question l’ancienne loi, qui, selon lui, a été préparé par deux politiciens turcs du passé, qui serait selon lui deux «ivrognes».

 

Petit détail: l’un des deux ivrognes, est Mustafa Kemal Ataturk, fondateur de la Turquie moderne et laïque, et est encore vénéré dans le pays, malgré les tentatives de l’exécutif islamique modéré actuel pour en atténuer le culte.

«Une loi faite par deux facultés affaiblies est respectable? – a déclaré Erdogan hier lors d’un discours à son groupe parlementaire – Alors, pourquoi ne le serez pas par une qui est inspiré par une religion ? ».

 

La réaction de l’opposition ne s’est pas fait attendre longtemps, en particulier le CHP, le Parti républicain du peuple, la voix principale de la minorité au parlement et qui a été fondée par le même Ataturk. La formation politique a entamé une question parlementaire afin de demander au Premier ministre à qui il faisait allusion.

Pour rappel, l’alcool a été réintroduit en Turquie en 1924, par Mustafa Kemal Ataturk, et son adjoint et successeur, Ismet Inönü. Il est également connu de tous, même si beaucoup tergiverse sur le sujet, que le Père de la Nation, était un amateur de belles femmes, un fumeur passionné, ainsi qu’un excellent buveur de vin, de sorte qu’il est mort d’une cirrhose du foie. Un portrait diamétralement opposée à celui de Recep Tayyip Erdogan, un mari fidèle et dévoué et un homme pieux dépourvu.

 

Que les deux hommes politiques n’ont en commun que l’enracinement de Fenerbahce, est un concept clair dans le pays, mais c’est la première fois que le premier ministre ait attaqué le "père de tous les Turcs" de manière si incisive.

La dite loi prévoit l’interdiction de la vente d’alcool dans les magasins agréés et les supermarchés de 22h à 6h du matin. La mesure interdit également la vente d’alcool à 100 mètres des mosquées, des écoles et autres centres d’enseignement. De nouvelles restrictions pour la publicité des boissons alcooliques et leurs présences dans les films et feuilletons. Le Premier ministre a revendiqué le droit constitutionnel de protéger les jeunes contre le fléau de l’alcoolisme, mais il y a ceux qui pensent que les interdictions ont une motivation idéologique.

 

Le samedi prochain, l’opposition descendra dans la rue, non seulement contre le décret, mais aussi contre ce qu’elle considère comme une insulte contre Ataturk.

Pour rappel, selon les statistiques locales, 85% de la population ne consomme pas de boissons alcoolisées.  

Pendant des années, Erdogan qui est au pouvoir depuis 2002, avec son parti islamique modéré « Justice et du Développement (AKP) »,  est accusé de vouloir islamiser la Turquie, cependant  le pays garde son ouverture et connaît aussi un important développement économique, ce qui contribue à la popularité de son premier ministre.