Droites européennes : Ce que cache comme évolutions idéologiques la question du populisme

Incessante de la part de certains médias ou hommes politiques l’accusation de populisme ne doit pas aveugler sur tout ce qu’elle cache d’autre. Plus spécifiquement les droites européennes sont souvent accusées d’être populistes, mais derrière la posture de séduction par les mots que cette accusation  contient, se fait jour toute une révolution idéologique les concernant.

 

Chaque jour l’expression revient, sans qu’on en comprenne nécessairement toutes les implications. En Europe il est assez fréquent que les médias parlent d’une montée des populismes, plus particulièrement pour qualifier les nouvelles postures des partis de droites européens. A tel point qu’il est possible de parler des nouvelles droites européennes.

Mais au-delà de la question, toujours un peu ambivalente, de savoir ce qu’est le populisme et surtout de savoir qui l’est ou ne l’est pas, il est intéressant de s’interroger de façon plus transversale. Et de fait la véritable question est bien de savoir ce que cache réellement cette montée du populisme dans les droites européennes. Plus spécifiquement il peut sembler plus pertinent et productif de savoir ce que cache comme changements idéologiques cette montée du populisme dans les intentions politiques des droites européennes.

Car le populisme semble être la réponse logique et électoralement porteuse à toutes les incohérences idéologiques et craintes politiques que les droites européennes portent. En réalité il s’agit pour elle de se montrer populiste pour tenter de concilier les contraires et de discréditer les forces politiques, elles aussi populistes bien souvent, qui tentent de les déborder par l’extrême droite.

Et de fait toutes les droites de gouvernement européennes font aujourd’hui l’apologie de la mondialisation ultralibérale, au nom de laquelle il est souvent demandé un certain nombre de contraintes sociales ; plus facilement imposables lorsqu’on déplace le débat vers la question de l’identité nationale, ultime refuge de protection et d’appartenance, surtout lorsqu’on en propose une définition de plus en plus étriquée.

Sociologiquement liées à des secteurs sociaux économiques à l’aise dans la globalisation, les droites se voient de plus en plus concurrencer par une droite plus radicale en ce qui concerne les franges de population plus en difficulté, et qui sont indispensables pour toutes logiques de conquête du pouvoir. Recourir au discours populiste devient, ici, nécessaire pour élargir sa base électorale.

De même soucieuses de représenter les classes moyennes craintives pour leur statut, tout comme désireuses de représenter la frange basse des entrepreneurs en prise avec une économie plus locale, les droites s’essayent à un nouveau mélange idéologique. Le pari pour elles étant de concilier le discours économique libéral et une demande de protection de l’Etat, qui pour garder de son efficacité et de son exclusivité, doit s’adresse aux seuls nationaux. Pour réussir à se convaincre des bienfaits de l’Etat qu’elles aimeraient pourtant de plus en plus modeste elles s’acharnent à en réserver les bienfaits aux celles détenteurs d’une identité nationale, vantée comme seul type d’appartenance impliquant un devoir de solidarité.

D’où pour elles la nécessité de promouvoir comme valeur d’importance l’identité de ses origines. Dans certains cas on a là les bases d’une dérive ethnique (Flandre, « Padanie »). Si elles s’opposent à l’immigration c’est en oubliant les bienfaits économiques qu’elle peut procurer et en réponse à ce souci d’identité. Pour elles il s’agit d’être pour l’identité et donc contre ce qui est sensé l’altérer et non le contraire. Comme l’illustre le cas allemand la question du multiculturalisme (le « multiku » pour Merkel) est désormais à combattre ; officiellement pour l’échec qui est présentement le sien, officieusement pour les risques d’altération identitaire qu’il génère, surtout en échouant.

Sur le plan géopolitique il s’agit de défendre un modèle de civilisation occidental en bute à ce nouvel ennemi qu’est l’Islam. D’où des droites européennes moins obsédées d’antisémitisme, voire pro-sioniste et qui ont fait d’Israël la ligne de front symbolique et première contre cet « Empire du mal » qu’est l’Islam.

Enfin cette nouvelle droite doit se battre contre l’ancienne droite pour contrôler les élites politiques. D’où le lancinant discours sur les trahisons de l’élite vis-à-vis du peuple et les appels pour une démocratie plus directe, avec en ligne de mire ce qui dans le débat européen est transposable de ce que propose le Tea Party par exemple. C’est-à-dire de ce que propose le discours de droite libertarien.

Ainsi se trace le sillon d’une démocratie qui à vouloir être plus directe n’en finit pas de devenir un régime gouvernant par des consensus d’opinion, de passion et d’émotion.