Faire défaut, c’est faire faillite, dire qu’on ne remboursera pas ses dettes. Au point où on en est, peut-être est-il temps de ne plus écouter les Sarkozy, Le Pen, Bayrou, Hollande, &c., et homologues étrangers, mais les Cassandre et les imprécateurs. Ils ne cherchent pas à se faire élire, n’ont pas à éviter de désespérer Billancourt, le Trocadéro, La Courneuve et Trifouillis-les-Oies.

 

C’est quand même simplissime. Tous les États européens sont surendettés, les États-Unis aussi, et même le très sage Canada est endetté à la hauteur de son PIB. C’est la grosse « crisse » (crise, en québécois), pour tout le monde.
Or, hormis des dosettes répétées de rigueur, personne ne voit d’autre solution, au moins pour l’Europe, que de s’endetter davantage, d’une manière ou d’une autre.

Soit de transformer la BCE (Banque centrale européenne), en « banque pourrie ».

 

Ce, non pas que pour sauver les banques européennes, les assurances, &c., mais aussi la mise des politiques, de quelques bords qu’ils soient du moment qu’ils ont une chance d’être élus, représentés.

Autant le dire très clairement, pour éviter, comme ce fut le cas pour des millions de gens en Russie, pays détenteur de matières premières, de ne plus manger que des patates ou des soupes d’orties (si possible poussant sur son balcon ou son lopin), largement autre chose que ce qu’on nous serine.

Sinistrose

Cela paraît exagéré ? Totalement si l’on s’en remet à la quasi-totalité de la presse française, beaucoup, mais alors beaucoup moins, en se rapportant à d’autres échos. Ce matin, levé à 04:30 (Paris), histoire de faire ma revue de la presse étrangère. Largement plus pessimiste dans son ensemble. Ce n’est guère la première fois que j’en ressors d’humeur de plus en plus maussade.

Pas davantage que Daniel Schneidermann, d’Arrêt sur images ou Rue89, je ne suis économiste, ni même (plus) vraiment journaliste économiste. Juste trop superficiellement formé à la chose économique, antérieurement, mais je me prends des cours de rattrapage. Et cela sent mauvais…

Vraiment mauvais.

Même si l’Allemagne concédait des avancées sur l’action de la BCE, cela risque très fort de ne pas suffire. Même si on fait reculer le pouvoir d’achat, celui de tout le monde, comme c’est parti, en rajoutant de la dette à la dette, cela ne suffira pas, c’est une fuite en avant.

Or donc, pour la première fois, je lis en France que faire défaut, se déclarer en faillite, sera inévitable.

D’autre qu’eux l’ont dit, mais il s’agit d’Olivier Delamarre, de Platinum Gestion, et d’Olivier Berruyer, actuaire, qui ne nous tendent pas vraiment une branche plaisante, bien au contraire…

En clair, il n’y aura pas que les riches à faire payer. Je ne parle même pas des super-riches, des moyennement riches, ou des gens se déclarant plutôt « à l’aise », tout en ayant revendu une voiture sur les deux du ménage, pour faire face, et rouler en scooter.

Chaîne de Ponzi

Ce qu’a fait Madoff, soit de la cavalerie, c’est ce qu’envisagent de faire certains États, d’autres n’en ayant plus vraiment la possibilité. C’est d’ailleurs ce qu’ils ont fait au cours de la dernière décennie, emprunter pour rembourser, réemprunter, &c.

Olivier Delamarre, sur BFM et ailleurs, le répète, et cela donne en substance : « cela fait trois ans que les politiques ne font rien, de sommet en sommet, le point de non-retour est déjà dépassé et il n’y a rien à attendre du prochain sommet. ». Plus crument : « cela peut aller jusqu’à une guerre. ».

Olivier Berruyer l’exprime autrement : « J’ai 36 ans, je ne veux pas passer 20 ans de ma vie à payer pour Liliane Bettencourt. ». Formule sibylline.

On comprend mieux en tentant de comprendre les graphiques du blogue de Berruyer, Les-Crises (.fr).

Pour lui, Mario Draghi, après Trichet, à la BCE, continue le grand jeu du « pourrissons le bilan de la Banque centrale pour soulager les investisseurs privés. ». Cela inclut aussi vous-même, si vous avez une petite assurance-vie, un petit plan d’épargne bancaire, quelques rares Sicav, mais évidemment, surtout, en priorité, de beaucoup, beaucoup plus gros poissons que vous.

Le perdant en continu, c’est la BCE, les gagnants ? « On ne sait pas ». Et pour cause. Confidentialité. Ne pas affoler davantage les marchés.

C’est ce que je subodorais depuis que je me livre à des revues de presse matinales, j’ai l’impression que je vais pouvoir rester couché (qui dort, dîne).

Autre extrait de la chronique d’O. Berruyer de ce jour : « notre Banque centrale (…) se transforme semaine après semaine en bad bank, avec des effets de levier… ».

Vous n’êtes pas forcés de tout comprendre, de savoir lire les graphiques. D’ailleurs, même si on comprenait vraiment tout, cela n’éviterait pas qu’on doive aussi subir, mais peut-être quand même un peu moins…

Pour comprendre

Pour comprendre, il ne suffit pas d’écouter béatement Sarkozy, Le Pen, Hollande, Bayrou, ou même Mélenchon. Il faudrait disposer, selon O. Berruyer, d’informations qui ne leur sont même pas disponibles. Par exemple :

• les règles réelles de la Banque centrale, ses mécanismes quand elle achète des avoirs pourris ;

• l’identité des vendeurs d’obligations et leurs durées de remboursement, car pour l’instant, la BCE subventionne à 100 % des investisseurs privés sur fonds publics, et s’il n’y a pas abus de droit…

Commentaire d’un certain Marcus : « c’est du jamais vu à une telle échelle. Le défaut est la moins mauvaise des solutions, ce n’est pas la panacée, loin de là… ».

Pour Paul Jorion (sur France Culture ce matin), « il n’y a plus de pilote dans l’avion financier (…) c’est l’avion cargo des Polynésiens : on fait des sacrifices humain pour faire revenir l’avion-cargo, et faire repartir la machine. ». Pour lui, il est possible que l’euro n’en ait plus que pour deux semaines. La dépression (et non pas la récession) mondiale, ce n’est pas, sans correctifs drastiques, guette à court-terme et « les marchés n’existent plus… c’est un cadavre… ils savent que la machine est cassée mais ne savent plus quoi faireC’est un grand Moloch d’un dieu mort, le cœur est fondu… ».

Le fallacieux filet de sécurité du FESF ne peut apporter à l’Italie ou à l’Espagne qu’un peu plus du dixième de leurs besoins pour faire face aux impératifs : faire fonctionner les services publics, régler les retraites, &c., en 2012. Mais les banques peuvent aussi faire appel au FESF.

Les 8 et 9 décembre, prochain sommet européen. Le nombre des observateurs et analystes qui considèrent que c’est joué d’avance, soit qu’il n’en sortira rien à la hauteur des besoins réels, s’enfle de jour en jour.

Les à-coups des bourses

Oh, certes, aujourd’hui, le CAC 40 semblait triompher. Motif, une intervention concertée des banques centrales, l’européenne, la britannique, celles du Japon, de Suisse, du Canada, et la Federal Reserve. C’est ce qui avait été fait en septembre 2008, après la formidable faillite de Lehman Brothers. Mais comme rien n’a été entrepris vraiment depuis fin 2008, qu’à Bruxelles, personne ne s’entend vraiment sur des dispositifs d’urgence communs efficaces, et que de plus en plus d’institutions financières « too big to fail » sont au bord du précipice, ce qu’indiquent sans détour divers titres économiques, le rebond des marchés n’est pas forcément un si bon signe…

Armageddon ! Soit l’Apocalypse. Cela fait près de trois semaines déjà que le mot a été lâché… Je le reprenais le 10 décembre (« Zone euro : après l’Italie, la France… puis l’éclatement »). Très franchement, la nuit dernière, le revoyant dans la presse internationale, certes sur le site du Progressive Economics Forum canadien (plus ou moins proche d’Alternatives économiques), j’ai ressenti comme un frisson.

Plus tard, lisant à l’instant Ken Rogoff sur CNN exprimant que « c’est la course pour sauver l’Europe, » j’ai repris une (trop) faible bouffée d’espoir. Si l’Europe s’effondre, les exportations américaines s’effondrent. Des banques américaines s’effondrent. « They will come up with another patch…, » soit une rustine, dit Ken Rogoff de nos dirigeants, le 9 décembre. « Maybe enough to quiet markets for a while. ». Suffisante rustine pour calmer les marchés un moment. Oui, admettons, mais dans trois semaines ???

Le problème, c’est qu’une rustine ne peut suffire pour réduire la pression, seulement la contenir un peu. Et questions mesures vraiment décisives, imaginez-vous vraiment Sarkozy et Merkel capables de revenir devant les banquiers français et allemands, pour annoncer du sang et des larmes ?